Le déguerpissement de la berge lagunaire de Cotonou en peu de temps par le gouvernement du Nouveau départ est un inédit exploit pour qui connait bien depuis 2003, le projet d’assaisonnement des berges lagunaires de Cotonou. Exigé par l’Office alimentaire et vétérinaire de l’Union européenne, le Bénin n’a pas pu honorer cet engagement et a perdu la commercialisation des crevettes à cause du trop plein de sentimentalisme des gouvernants. Mais le gouvernement du Nouveau départ, intraitable, a relevé le défi en peu de temps. A travers le Projet de modernisation et de gestion des déchets dans le Grand Nokoué, il a donné un signal fort du processus de l’amélioration du cadre de vie au Bénin. Pour amorcer ce projet a plusieurs variables, le gouvernement a commencé par la destruction des points noirs. Il s’est agi pour lui de donner un nouveau visage à la berge lagunaire de Cotonou. Déjà, lors du bilan An 4 du gouvernement Talon en 2020, le ministre en charge du Cadre de vie, José Tonato a fait la lumière sur l’opération et ses contours avec les grandes précisions en 2022.
La berge lagunaire de Cotonou est sauvée des déchets composés en grande partie des sachets plastiques très nuisibles à l’émergence des ressources halieutiques beninoises vendues à l’étranger. Le gouvernement du Nouveau départ, dans son optique de révéler le Bénin, a entamé la libération de la berge lagunaire de Cotonou. Selon le numéro 1 du Cadre de vie, le projet a permis de rendre salubre la berge lagunaire de Cotonou qui fait partie d’un autre projet beaucoup plus grand qui est le projet de modernisation et de gestion de déchets dans le Grand Nokoué. Ce projet, dit-il, a plusieurs composantes dont la salubrité qui a déjà commencé. Aujourd’hui, les Cotonois voient que leur ville est beaucoup plus propre avec des voies balayées et désensablées. Il faut rappeler que ce n’est pas Cotonou seule. On peut citer Abomey-Calavi, Sèmè-Kpodji et même les voies interurbaines comme Cotonou-Lomé, Cotonou-Bohicon… Aujourd’hui, les gens constatent que ces voies sont subitement devenues propres parce que 2 ou 3 fois par semaine, il y a des gens qui balayent, qui désensablent. Ça c’est le volet salubrité. Ce que vous avez vu sur la berge de Dantokpa, participe d’une autre composante appelée la destruction des points noirs. Les points noirs sont les dépotoirs sauvages qui se sont accumulés dans l’agglomération de Cotonou et environs durant ces 10 dernières années parce que de la collecte à la gestion des déchets, tout a été défectueux. Donc, nous avons décompté plus de 1.000 dépotoirs sauvages dans le Grand Nokoué dans le cadre de ce projet. Certains dépotoirs sont au bord de la lagune et polluent les produits halieutiques provenant de la lagune. Vous n’êtes pas sans savoir que les crevettes du Bénin, ne vont plus à l’Union européenne à cause de la pollution .Comme le projet contournement Nord a un volet qui prévoit l’aménagement d’une corniche et une d’une voie lagunaire pour permettre que le bord de la lagune de Cotonou, comme dans tous les pays où les gens pensent bien ces choses, soit aménagé, qu’on puisse développer des commerces comme les restaurants, les hôtels, … donc, c’est en prévision du démarrage des travaux d’aménagement de la voie lagunaire que nous avons immédiatement attaqué la berge lagunaire de Dantokpa. Sur cette berge libérée grâce au génie militaire, nous ne permettrons à aucune activité de la salir à nouveau. Actuellement, une clôture grillagée est en cours pour empêcher son accès », a expliqué le patron du Cadre de vie avant de continuer :
« C’est vrai qu’on n’a pas tout enlevé. Mais il y a une étude technique conduite par Esgis sur la voie sur la berge. Cette voie est calée à une hauteur donnée. Il a été aussi démontré que, compte tenu du fait que les déchets ont été entassés pendant plusieurs années, il ne sera pas nécessaire de tout enlever. Si on enlevait tout, le poids du remblais sera exorbitant. Par contre, on peut facilement contenir ce qui est en-dessous avec un mur de soutien qui est prévu par le projet avant de construire la berge. Voilà pourquoi, nous avons donné une côte précise au génie militaire pour arrêter l’enlèvement des déchets avant de mettre la terre. »
Puisque c’est un côté de la berge qui a été pris premièrement en compte, José Tonato a annoncé ce qui est réservé à l’autre côté. « L’autre côté constitue la 2ème phase de ce projet qui sera bientôt entamée. Puisque de l’autre côté, il y a une voie qui passe et que nous avons appelée barreau qui sera dédiée au transport des poids lourds qui quitteront directement le port autonome de Cotonou pour rejoindre le contournement Nord par le biais d’un pont aménagé à cet effet. Pour ce qui concerne la date de démarrage de ces travaux, mon collègue des infrastructures vous en dira plus. Quant au nettoyage, c’est le ministère du cadre de vie qui le fera dans un bref délai », a-t-il laissé entendre.
Un regard dans le rétroviseur pour juger
Avec ce qui est fait aujourd’hui, l’on peut certifier la main sur le cœur que le Bénin retourne progressivement à la conformité de l’Union européenne . Comme souligné ci-haut, le déguisement de la berge lagunaire de Cotonou est un atout économique pour le Bénin. Mais depuis 2003, les gouvernements qui se sont succédé n’ont pas gagné le pari. En effet, la lagune de Cotonou est un chenal de plus de 4 km construit à l’époque coloniale par les Français pour relier le lac Nokoué, situé à l’intérieur des terres, à l’océan Atlantique. C’est autour de cette lagune que s’est développée la capitale économique béninoise mais, progressivement, ses digues se sont surpeuplées de manière illégale, favorisant les dépotoirs sauvages. A la suite d’une mission effectuée en 2002, l’Office alimentaire et vétérinaire de l’Union européenne a demandé au Bénin de se conformer aux normes sanitaires européennes. Les sociétés de pêche et de commercialisation ont alors fermé mais la population est restée. Dans la perspective d’éviter que les pays d’Europe ne suspendent l’ importation de crevettes béninoises, le ministère de l’Environnement a décidé de remédier à l’insalubrité des lieux. En 2003, le projet d’assainissement des berges lagunaires de Cotonou a été initié en Conseil des ministres.
Malgré ce projet et les insistance du pouvoir central, les populations n’ont pas obéi. En 2012, le gouvernement de Boni Yayi a procédé début mai au déguerpissement des populations propriétaire ou non des berges lagunaires de Cotonou. Le lundi 04 mai 2012, sous les ordres du ministre de l’environnement, de l’habitat et de l’urbanisme, environ trois mille commerces ont été rasés malgré les lamentations et plaintes de leurs propriétaires. « L’opération a été lancée très tôt dans la matinée de ce lundi. Les premiers tenanciers de commerces qui ont pu sauver quelques marchandises ne sont pas nombreuses. Le ministre de l’Environnement, de l’habitat et de l’urbanisme a mis à profit la levée du jour pour faire déguerpir tous les occupants illégaux de la berge lagunaire de Cotonou. Les commerçantes habituées à se rendre au marché vers 10h n’ont fait que constater les dégâts. Et dans leurs pleurs et lamentations, elles s’en prennent à la mairie de Cotonou qui jusqu’à la veille de l’opération continuait à collecter des taxes chez elles », a raconté afrik.com. « La mairie aurait pu nous avertir. On ne nous a rien dit. Et voilà tout est casé », a dénoncé Marie, une commerçante. « Un peu plus loin, coulant des larmes devant les décombres de sa boutique, Jeanne déclare : « le Mehu (le ministère de l’Environnement, de l’habitat et de l’urbanisme, Ndrl) a dépassé ses prérogatives. Il ne doit pas caser ici, car moi c’est la Sogema (la Société de gestion des marchés autonomes) qui m’avait recasé ici. Et je paye pour cette place. » Selon le point fait par le média en ligne, les plaintes n’ont pas émoussé les ardeurs des autorités du ministère de l’Environnement, de l’habitat et de l’urbanisme. Pour elles, il faut assainir la berge lagunaire qui jouxte le marché international Dantokpa de Cotonou parce que les commerçants y jettent toutes sortes de déchets au point où les usagers du plus grand ouest-africain marché qu’est Dantokpa ne sont plus à l’abri des maladies diarrhéiques. « La berge était trop sale », a martèle un cadre du ministère de l’environnement. « Je ne veux plus voir personne sur les berges, je veux que ce soit propre», a déclaré Blaise Ahanhanzo Glélé, ministre de l’Environnement à l’époque.Pour Imorou Ouro-Djeri, directeur général adjoint au ministère de l’Environnement, il y a une prolifération de dépotoirs sauvages qui crée une insalubrité indescriptible. La défécation sur les berges et dans la lagune à cause des toilettes sur pilotis entraîne un péril fécal. Il y a les animaux domestiques qui divaguent. Les teinturiers déversent leurs produits dans la lagune.
L’échec du régime Yayi sur le projet
Très tôt, ce déguisement a donné lieu à des polémiques. Dans la foulée les administrés ont accusé le maire de la ville, Nicéphore Soglo, d’avoir été informé de cette opération sans les avertir. «En fait, la décision d’assainir les berges a été prise en 2003 en Conseil des ministres à la suite d’une mission de l’Office alimentaire et vétérinaire de l’Union européenne. Elle avait conclu que les conditions de production des ressources halieutiques (surtout les crevettes) ne répondaient pas aux normes européennes. Si rien n’était fait, les produits béninois seraient suspendus pour dix ans. Rien n’a été fait. Les unités de production ont fermé, mais la population présente sur les berges a augmenté et la pollution aussi. En 2003, il y a eu les premières réunions avec la population de Placodji pour qu’elle quitte les lieux. Ils ne sont pas partis. On n’a rien fait. Nouvelles discussions en mai-juin 2006, mais les habitants ont dit que c’était la saison des pluies et la période des examens. Même statu quo. Et ça a traîné jusqu’à cette année pour plusieurs raisons: changements de ministres, négociations sans fin avec les habitants, pression sociale et électorale. Fin février 2012, l’Etat a décidé d’agir. La population a été informée, mais sans savoir quand l’opération aurait lieu. C’est lors d’une réunion le 24 avril que la date a été fixée et tenue secrète. Deux jours après, le marquage des sites à détruire commençait. Mais l’histoire avait tellement duré que beaucoup n’ont pas cru que la menace serait mise à exécution », a déclaré Imorou Ouro-Djeri, selon SlateAfrique.
Selon les propos rapportés par » la Nouvelle tribune », en visite aux populations sinistrées le samedi 12 mai 2012, le maire de Cotonou avait exprimé les yeux larmoyant toute sa désolation. Il s’est offusqué en sa qualité de Chef de terre de n’avoir pas été mis au courant de la décision du ministre de l’Environnement de dégager les populations des quartiers en question. Voici un extrait du discours qu’il avait prononcé à cet effet. « C’est une provocation, car tout ce qui a été fait n’a rien à avoir avec le programme initial. Cela vous a causé de graves dommages et des désagréments de tout genre. Cela me crève le cœur. C’est d’autant plus grave et déplorable que nous sommes en pleine saison pluvieuse et que les activités scolaires au titre de cette année se poursuivent encore. C’est un manque d’humanité que de vous jeter à la rue et vous obliger à dormir à la belle étoile ; même si j’en conviens, il faut effectivement assainir la berge lagunaire à la fois pour des raisons économiques et pour des raisons de sécurité publique. Je vous exprime à nouveau, comme je l’ai expressément fait à travers les médias, mes sentiments de compassion et de profonde sympathie.» Il avait, pour joindre l’acte à la parole, offert des enveloppes financières aux sinistrés. Soit 10 millions à Xwlacodji, 1 million à Dédokpo, 1 million à Abokicodji. »
Bienvenue Agbassagan
(Suite dans la prochaine parution)