La huitième législature est en train d’achever sa mission. L’une des actions menées par le président Louis Vlavonou est le renforcement de la coopération inter-parlementaire. A cet effet, le Chef de service de la coopération interparlementaire à l’Assemblée nationale et conseiller aux affaires étrangères, du président Louis Vlavonou, Constant Hermann Dazan, s’est prononcé sur le bilan de la huitième Législature et des avancées enregistrées sous le leadership du président Louis Vlavonou et de son bureau.
Le Matinal: Dites-nous ce qu’on peut entendre véritablement par diplomatie parlementaire ?
Constant Hermann Dazan : Comme vous le savez, l’Assemblée nationale du Bénin, à l’instar de beaucoup de Parlements dans le monde, a trois missions essentielles : celle de légiférer, celle de représenter le peuple et celle d’assurer le contrôle de l’action gouvernementale. Ces trois missions que je viens d’énumérer ne peuvent s’opérer dans un encroisement avec l’environnement international. C’est pourquoi justement l’Assemblée nationale pose constamment des actes qui participent de la politique extérieure des États. Vous avez par exemple l’autorisation de ratification des traités et conventions internationaux. Vous avez par exemple les activités de coopération liées au fonctionnement des groupes interparlementaires d’amitié. Vous avez, par exemple, la participation de l’Assemblée nationale aux rencontres internationales. Et par rapport à tout ça, cela suppose que l’Assemblée nationale intervient quand même dans la mise en œuvre de la politique étrangère des États. Et à ce titre, vous savez bien que l’Assemblée nationale en exerçant sa fonction de contrôle de l’action gouvernementale, a également pour pouvoir d’allouer des ressources justement pour financer l’action diplomatique de l’État. Cela dit, je pourrais résumer la diplomatie parlementaire comme une série d’actes et d’actions que mènent les parlementaires et bien sûr les Assemblées nationales dans les enceintes internationales, les cas de coopération entre plusieurs Assemblées nationales et également des actions au niveau des parlements régionaux et des organisations interparlementaires.
Dans cette mission diplomatique de l’Assemblée nationale, est-ce qu’il arrive que le Parlement agisse de concert avec le Ministère des affaires étrangères ?
Bien sûr et d’ailleurs à l’occasion de la célébration en juin 2022 de la 3ème édition des journées de la diplomatie parlementaire, nous avons procédé à la signature d’un accord-cadre de coopération entre justement l’Assemblée nationale et le ministère des Affaires étrangères et de la coopération. Cela participe justement à la complémentarité qui devait y avoir entre la diplomatie classique des États et la diplomatie parlementaire qui revient aux Assemblées nationales.
Aurélien Agbénonci : la diplomatie parlementaire est très importante et il est important qu’il y ait une cohérence entre ce que le gouvernement décide de faire, les positionnements stratégiques que nous faisons par rapport à certains États; les positions que nous prenons par rapport à certains conflits car nous sommes tenus de prendre position, nous sommes tenus de voter au conseil des droits de l’homme à l’Assemblée générale des Nations Unies, que toutes ces positions prises par l’exécutif soient en phase avec la posture que pourrait prendre le Parlement. Ce n’est pas seulement grâce au Gouvernement que le Bénin est respecté à l’étranger. Le Bénin est respecté à l’étranger parce que nous avons voté des lois, nous avons fait des réformes, et sans le Parlement, il n’y a pas de réforme. Parce que le Parlement a joué sa partition, c’est parce que le Gouvernement fait son travail, le Bénin se porte mieux et est mieux perçu, respecté et a une diplomatie que d’aucuns se plaisent à présenter comme une diplomatie qui est dynamique et qui fait son travail sans tambours ni trompette, mais qui est résolument au service du développement de notre pays.
A suivre le ministre Aurélien Agbénonci. Ce n’est pas seulement grâce au Gouvernement que le Bénin est respecté à l’étranger. Dites-nous en quoi la diplomatie parlementaire aura contribué à l’image de marque du Bénin et plus particulièrement de l’Assemblée nationale après 2019 quand nous avons connu le contexte dans lequel cette législature a été installée ?
Je vous remercie, car vous me donnez une fois encore l’occasion de revenir justement sur ce que la huitième législature a pu faire, a pu mener comme actions pour améliorer et rétablir l’image de marque de l’Assemblée nationale dans les enceintes internationales. Comme vous le savez, le Parlement du Bénin après les élections d’avril 2019, avait été mise sous alerte par l’Assemblée parlementaire de la francophonie (Afp). Et grâce justement au leadership éclairé du président Louis Vlavonou et également à la diplomatie parlementaire, le Parlement du Bénin a quand même réussi à faire comprendre disons à l’Assemblée parlementaire de la francophonie qu’il n’était pas du tout question de mettre le Parlement béninois sous alerte. Et dans ce cadre justement, nous avons reçu deux missions de l’Assemblée parlementaire de la francophonie. Nous avons reçu une première mission en février 2020 qui a été conduite par le président du bureau de l’Apf feu Amadou Soumahoro qui était venu au Bénin avec une forte délégation. Au cours de cette mission, cette délégation a écouté toutes les parties prenantes impliquées dans les négociations après les élections de 2019. Nous avons également reçu une deuxième mission courant mai 2022 et là, c’était plutôt la commission politique de l’Apf et je pus vous dire qu’aujourd’hui, le Parlement du Bénin n’est plus sous alerte puisque cette sanction a été levée au cours de la session plénière qui s’est tenue à Kigali en juillet 2022. Donc je pus vous dire qu’aujourd’hui, le Parlement du Bénin n’est plus sous alerte parce que justement nos partenaires internationaux ont compris qu’effectivement les choses s’étaient bien déroulées au cours des élections législatives d’avril mai 2019. Et d’ailleurs, vous savez bien que le Parlement béninois a joué sa partition dans ce processus. Déjà en participant au dialogue national qui a été convoqué par le président de la république en octobre 2019 et la partition de l’Assemblée nationale à jouer, c’était de voter une loi d’amnistie au profit de tous les acteurs qui étaient impliqués dans les troubles qui ont mis un peu en branle notre démocratie. D’ailleurs au cours de ces assises de Kigali, la sanction a été levée et le président Louis Vlavonou a été élu membre du bureau de l’Apf.
Cela était-il déjà arrivé par le passé ou c’est une première ?
C’est une première
Donc, ça fait partie certainement des succès à l’actif de la huitième Législature ?
Bien sûr
Pouvez-vous nous parler de quelques autres succès qu’on pourrait mettre à l’actif de la 8ème législature en matière de diplomatie parlementaire ?
Il y a eu de grands succès à l’ère de la 8ème législature. Aujourd’hui par exemple, nous avons réussi à placer beaucoup de nos députés dans les enceintes parlementaires internationales. Lorsque vous prenez par exemple l’Union interparlementaire, l’ancien ministre des affaires étrangères, l’honorable Bako Arifari a été nommé envoyé spécial de l’Oci pour l’Afrique. En dehors de ça, il avait été le président du comité des droits de l’homme de l’Uip. L’honorable Mariama Baba Moussa est membre du bureau du forum des femmes parlementaires de l’Uip. Et il y en a beaucoup d’autres. Lorsque vous prenez par exemple le Cip-uemoa, le député Lucien Houngnibo en est le président actuel. Il y a encore beaucoup de députés que nous avons réussis à placer dans ces enceintes internationales.
Notre pays a aussi abrité des rencontres internationales sous la huitième Législature. On peut citer la Conférence des parlements africains contre la corruption.
Bien sûr. C’était en juillet 2022. Nous avons organisé une grande conférence au niveau continental qui a connu la participation du président de l’Assemblée nationale de la Côte d’Ivoire, avec le vice-président du Parlement panafricain. Et à cette occasion, le Benin a été élu justement président de l’Apnac c’est- à-dire le Réseau des parlementaires africains de lutte contre la corruption.
L’Assemblée nationale a organisé courant 2022 la 3ème journée de la Diplomatie parlementaire. En quoi a consisté cette journée ?
Vous savez, à un moment donné, il fallait quand même faire un bilan de la diplomatie parlementaire à l’ère de la huitième législature. Et à cette occasion, nous avons invité la quasi-totalité des membres du corps diplomatique qui ont fait le déplacement sur Porto-Novo. Ce qui témoigne de l’image de marque que cette assemblée nationale a pu avoir sur la scène internationale. Et comme je le disais tantôt à l’entame de cet entretien, nous avons eu un accord-cadre de coopération entre le Ministère des affaires étrangères et l’Assemblée nationale. Cet accord que nous avons signé permettra en réalité de renforcer les liens de coopération institutionnelle entre le Ministère des affaires étrangères et l’Assemblée nationale. Il est un secret de polichinelle de dire que souvent lorsque nous recevons des visites de parlementaires étrangers, il y a souvent quelques problèmes de collaboration entre le Ministère des affaires étrangères et l’Assemblée nationale, mais grâce à cet accord que nous avons signé, nous avons aplani toutes les divergences et là, chaque partie a pris des engagements pour une coopération plus intelligente et plus franche. En dehors de ça aussi, la journée de la diplomatie parlementaire a été l’occasion pour les différents présidents de groupes nationaux tels que le Groupe national Uip, le Groupe national Assemblée nationale de la francophonie, le groupe national Cedeao, de passer devant leurs collègues députés pour faire un bilan un peu des acquis du Parlement du Bénin au sein de ces organisations interparlementaires. Déjà quand vous prenez par exemple l’Uip, Union interparlementaire, qui est une organisation à l’échelle mondiale, qui regroupe tous les Parlements du monde. C’est comme l’Onu au niveau du pouvoir exécutif, on essaie de créer au niveau des parlements nationaux des groupes nationaux qui représentent les parlements auprès de ces organisations interparlementaires. Et c’est ce que nous avons fait avec les groupes nationaux. Nous avons par exemple au niveau de l’APF où nous avons le président qui naturellement le président Vlavonou, assisté du vice-président qui est l’honorable Assan Séibou. Nous avons également des groupes nationaux au niveau d’autres parlements panafricains comme par exemple l’Union parlementaire africaine, le Parlement panafricain, le Cip-uemoa, la Cedeao.
Et si aujourd’hui Dazan, on devrait évaluer la présence du Bénin sur l’échiquier politique international en termes de diplomatie parlementaire. Quelle place occuperait notre pays ?
Mais attention ! Vous savez, je me suis amusé une fois à faire un peu le point de nos députés dans les enceintes parlementaires internationales. Mais, je pus vous dire que les députés béninois sont un peu partout. Que ce soit à l’Apf dans presque toutes les commissions que ce soit la commission des affaires politiques, que ce soit la commission des affaires parlementaires, que ce soit la commission des affaires politiques…, ils sont presque partout. Vous savez très bien que l’honorable Rachidi Gbadamassi qui est d’ailleurs le président de la commission des relations extérieures est le vice-président du comité des présidents des commissions des relations extérieures de l’Afrique. L’honorable Lucien Houngnibo est le président du Cip-Uemoa qui est une instance sous régionale qui n’est pas à négliger.
Qu’est-ce que cette présence apporte-t-elle de façon concrète au Parlement béninois ? Est-ce qu’on va dire qu’on y va pour se retrouver en position de président ou de vice-président ou est ce qu’il y a une plus-value qu’on pourrait évaluer sur l’Assemblée nationale ?
Vous me donnez encore l’occasion de vous dire d’abord vous savez lorsque vous êtes membres actifs d’une organisation pareille, c’est déjà le nom de votre pays que vous portez haut au-delà des frontières nationales. Et puis en dehors de ça au sein de ces genres d’organisation, vous avez souvent des voix prépondérantes. Lorsque vous êtes membres d’un bureau par exemple, votre pays a une voix prépondérante par rapport aux autres. Donc, c’est quand même beaucoup de facteurs qui militent en notre faveur. Par exemple lorsqu’il est question d’organiser ou d’accueillir une réunion ou une session internationale, on peut facilement gagner ces genres de positionnement. Mais, là grâce aux positionnements de vos députés dans ces enceintes internationales.
Quels sont les défis qui resteraient à relever pour le Bénin en termes de diplomatie parlementaire ?
Il y a quand même beaucoup de défis à relever. D’abord il faudrait déjà procéder à l’élaboration d’un plan stratégique de la diplomatie parlementaire parce que vous savez quand on a une vision, des objectifs, il faut nécessairement élaborer et définir disons un plan stratégique. C’est le premier défi. Le deuxième défi comme vous l’aviez dit tantôt, le service de la coopération interparlementaire est un peu comme le Ministère des affaires étrangères du pouvoir législatif. Ce qui suppose qu’on pourrait aller vers la création d’une direction de la coopération interparlementaire. Et d’ailleurs le président Louis Vlavonou l’a bien compris puisqu’il l’a martelé à plusieurs reprises lors de la journée de la diplomatie parlementaire. En dehors de ça, comme défi nous devons encore travailler à une présence plus accrue du Parlement béninois dans les enceintes internationales.
Parlons des femmes parlementaires. Est-ce que quand on entend toutes ces prouesses réalisées par le Bénin à l’international en matière de diplomatie parlementaire, on a des femmes qui sont de plus en plus introduites dans ces instances-là ?
Oui bien sûr. Je vous ai rappelé tout à l’heure l’honorable Mariama Baba Moussa qui est membre du bureau du réseau des femmes parlementaires de l’Uip. C’est à notre actif.
Il y a-t-il des parlements sous- régionaux qui viennent chez nous pour suivre un peu ce qui s’y fait ?
Bien sûr. À l’entame de la 8ème législature, nous avons réussi à avoir avec nous le président de la République de l’Inde en mai 2019. Nous avons reçu également le vice-président du Parti communiste chinois qui est venu à la tête d’une forte délégation au Bénin. Nous avons accueilli des sénateurs français, des députés autrichiens, des députés allemands pour ne citer que ceux-là. C’est pour vous dire qu’en réalité le Parlement béninois a quand même une crédibilité aujourd’hui sur le plan international.
Quel est votre mot de fin
Ce que je voudrais dire pour conclure c’est qu’il faudrait que nous croyions aujourd’hui en l’existence d’une diplomatie parlementaire. Il faudrait aussi comprendre que la diplomatie parlementaire n’est pas en concurrence avec la diplomatie classique. C’est juste des liens de complémentarité parce qu’il y a même des domaines que la diplomatie classique n’arrive pas encore à explorer mais que la diplomatie parlementaire explore. Je crois qu’il faudrait qu’on aille vers le développement de ce lien de complémentarité. Car vous savez l’action diplomatique doit être une action une et indivisible. D’où l’idée d’une complémentarité entre la diplomatie classique et la diplomatie parlementaire.
Propos recueillis par Martial Agoli-Agbo (Br Ouémé-Plateau)