Dans quelques heures, Savalou va vibrer au rythme de l’édition 2024 de la fête de l’igname qu’abrite la ville chaque année. Bien plus qu’un simple évènement festif de dégustation de différents mets, cette fête qui coïncide avec l’Assomption est le reflet d’une riche tradition culturelle et d’une profonde connexion avec l’histoire locale.
Le 15 août est une date particulièrement marquée dans la ville de Savalou, au Bénin, où se déroule chaque année la célèbre fête de l’igname. Vieille de 69 ans (1952), cette fête identitaire trouve son historique dans la fête de l’Assomption, et permet non seulement de rendre hommage aux ancêtres et aux esprits de la terre qui veillent sur les cultures, mais aussi d’instaurer un climat d’empathie, de tolérance, d’ouverture d’esprit, de solidarité, de cohésion et de fraternité entre les natifs. La fête de l’igname qui marque la fin de la saison des récoltes à Savalou, trouve ses racines dans les traditions ancestrales des peuples du Bénin. Ce moment de réjouissances est également l’occasion pour les populations de se rassembler et de rendre grâce pour les bénédictions de l’année écoulée. En 1954, cette fête fût réadaptée en une célébration pour rassembler les membres de la diaspora de Savalou. Déjà le 14 août soit la vieille de la fête, des sacrifices, des prières aux différentes divinités, mais aussi des activités culturelles sont organisés par la Cour royale et les dignitaires des cultes endogènes. Des offrandes et des rites traditionnels sont initiés en l’honneur des ancêtres du royaume. Le roi de Savalou profite de cette réjouissance populaire pour autoriser officiellement la consommation des ignames fraîchement moissonnées des champs.
Un moment de réjouissance…
La fête de l’igname n’est pas seulement un moment de pratiques rituelles pour l’autorisation de consommation de la nouvelle igname. Elle est aussi une occasion de convivialité et de renforcement des liens communautaires et de transmission des valeurs culturelles entre l’ancienne et la nouvelle génération. Les plus vieux partagent leurs expériences et leurs histoires avec les plus jeunes, soulignant l’importance de l’igname dans la culture Mahi. Cette tradition préservée, qui rassemble au-delà des peuples ayant la même expression culinaire et culturelle, contribue aussi à la préservation des traditions et au maintien de l’identité culturelle face aux défis de la modernité. Le 15 août, la ville de Savalou se transforme en un véritable carrefour de festivités et un point d’attraction touristique. Le palais royal grouille de monde. Les Mahis de la diaspora, les autochtones, les curieux et autres prennent d’assaut la ville. La grande attraction de la fête est la cérémonie au cours de laquelle les ignames nouvellement récoltées sont présentées en offrande au monarque. Ces tubercules sont méticuleusement sélectionnés et préparés de diverses manières, allant des plats cuisinés aux présentations rituelles. Après les cérémonies traditionnelles, place à la fête. Un géant pique-nique s’installe. Les populations venant de diverses contrées s’organisent pour passer d’agréables moments de fête. Des activités variées sont organisées dont des concours de danse, des chants, des pièces de théâtre et des jeux traditionnels. Elles sont accompagnées de repas communautaires où l’igname occupe une place centrale. Les plats à base d’igname sont préparés et servis lors de grandes tablées où tous les membres de la communauté, ainsi que les visiteurs, sont invités à se joindre aux festivités.
Un lien entre tradition et modernité
Bien que profondément enracinée dans les traditions, la fête d’igname de Savalou évolue avec le temps. Au-delà de l’aspect festif, la célébration de la sortie de la nouvelle igname est aussi une occasion pour organiser une séance d’échanges et de reddition de comptes entre les autorités et les administrés. La mairie et le palais royal de Savalou saisissent cette occasion pour apporter des réponses concrètes aux préoccupations des populations. Au fil des années, la fête de l’igname a étendu ses tentacules et est devenue une célébration populaire. Elle n’est plus l’apanage des Mahis, mais beaucoup d’autres peuples la célèbrent. L’igname pilée se mange aujourd’hui dans toutes les 77 communes du Bénin. La nouvelle génération apporte des touches modernes à cette célébration, intégrant des éléments contemporains tout en respectant les rites ancestraux.
Une opportunité touristique et économique
La ville de Savalou est sous les feux de rampe à compter du 15 août. Des milliers de béninois et individus d’autres nationalités affluent la localité. Une occasion pour trouver des opportunités d’affaires et de faire des rencontres d’affaires. Une foire commerciale s’ouvre dans le but de promouvoir les produits locaux. Les touristes achètent les objets d’art et découvrent les sites touristiques phares tels que la mare aux crocodiles, le palais royal, les palmiers à sept branches, le site Yokpota, le Panthéon de la résistance africaine et des paysages exceptionnels. Les spectacles et les prestations des artistes bondent la ville. Les lieux d’hébergement, de restauration et de divertissement accroissent leurs chiffres d’affaires. La fête de l’igname est une occasion pour les populations locales de faire d’argent. En somme, la fête de l’igname de Savalou est bien plus qu’une simple célébration culturelle et traditionnelle. Elle contribue au développement économique, la prospérité et à la promotion touristique du Bénin.
Mohamed Yasser Amoussa (Coll)