(L’avenir de la formation politique, compromis)
Le dernier congrès du parti « Les démocrates » a consacré le retour spectaculaire au-devant de la scène politique de l’ex-chef d’Etat béninois, Boni Yayi. Une nouvelle diversement appréciée au sein de l’opinion et qui sonne comme une mauvaise nouvelle pour le parti au regard du bilan calamiteux qui a caractérisé la gouvernance de l’homme.
Président manu-militari du parti « Les démocrates », Boni Yayi a désormais choisi de descendre de sa chaire d’ancien président de la République pour revenir sur le terrain de la politique active. Il devra subséquemment accepter d’être désormais traité comme tel avec tous les risques y afférents. En clair, l’homme a finalement jeté le masque, donnant de ce fait raison à ceux qui estiment qu’il n’a jamais cessé d’être obnubilé par la politique spectacle teintée de populisme, depuis son départ forcé du pouvoir en 2016, lui qui rêvait de 3ème mandat. Avec ce retour dans l’activité politique, Boni Yayi devra accepter d’être régulièrement interpellé par le Béninois lambda pour répondre de son bilan. En effet, tant qu’il n’avait plus un rôle exécutif en politique, se contentant d’être président d’honneur d’un parti, il pouvait échapper au procès de sa gouvernance désastreuse. Désormais, ce ne sera plus le cas. Car, pour prétendre proposer un candidat au peuple béninois demain encore, il devra montrer pattes blanches, ce qui semble impossible. En effet, il n’aura pas échappé au peuple béninois que Boni Yayi en plongeant le pays dans une morosité économique foudroyante avec un taux de croissance d’à peine 1% en décembre 2015. C’est cette gouvernance qui a fait que tout le pays était plongé dans le noir à la fin de son mandat et que les activités étaient, par conséquent, au ralenti. C’est encore cette gouvernance catastrophique qui a plongé des dizaines de milliers de Béninois dans le désarroi parce que le grand économiste Yayi a laissé Icc Services emporter impunément leur argent. C’est toujours la gouvernance Yayi faite de scandales en tous genres, les uns plus puants que les autres, qui a destructuré le pays avant 2016. Par ailleurs, sous la même gouvernance Yayi, on ne pouvait pas réussir aux concours d’entrée dans la fonction publique si on n’était pas militant Fcbe ou recommandé par les caciques du régime avec ce qu’il était convenu d’appeler le 13ème département. C’est sous ce régime donc que les plus méritants étaient laissés de côté car leur réussite était volée au profit des médiocres et autres enfants de politiciens. En clair, c’est ce régime qui a renforcé l’inefficacité de l’administration publique à travers sa politisation à outrance.
Les démocrates au creux de la vague
Au regard de ce piteux tableau, l’on se demande si le nouvel homme fort du parti Les démocrates, Boni Yayi pourra se prévaloir d’une virginité politique pour prétendre, en 2026, proposer un candidat crédible au peuple béninois. Ce peuple qui se relève vaille que vaille de la gadoue dans laquelle l’a plongé l’ancien régime et ses thuriféraires, va-il renouer avec l’anarchie qu’il a vécue de 2006 à 2016 ? Les Béninois seront-ils prêts à cautionner le retour au sommet de l’Etat d’un système de gestion du pays au pifomètre, sans réelle boussole à travers une gouvernance pulvérisée par des scandales cycliques ? De toute évidence, le choix de Boni Yayi à la tête du parti Les démocrates apparait comme une option suicidaire pour ce parti. Le parti voit du coup son avenir obscurci, et ses chances pour les échéances électorales 2026 dangereusement compromises. Le rêve d’une alternance au pouvoir apparaît dès lors une utopie avec ce cliché dont a accouché le congrès des 14 et 15 octobre 2023. Au-delà de l’euphorie qui a suivi ce « coup d’Etat politique », contre Eric Houndété qui, malgré lui, continue de faire contre mauvaise fortune bon cœur, Les démocrates se doivent de revenir à la raison, faire preuve d’objectivité pour analyser les réelles implications de ce choix hasardeux qui signe l’arrêt de mort du parti.
Abdourhamane Touré