Après l’annonce des grandes tendances des présidentielles aux Etats-Unis d’Amérique, deux experts des questions internationales ont opiné sur les points ayant favorisé cette victoire de Trump. Ils n’ont pas manqué d’évoquer ce que pourrait être sa politique étrangère à l’égard de l’Afrique.
Landry Angelo Adelakoun, juriste, consultant en droits humains, analyste politique : « La philosophie du président Donald Trump est aux antipodes de la promotion des Lgbtq+ »
« Ce qu’il convient de retenir de la victoire du président Donald Trump, c’est d’abord que cette victoire est assise sur un certain nombre d’éléments clés. Le premier, c’est le bilan relativement catastrophique du point de vue économique de la gouvernance de Biden. Un bilan qui a été maquillé par des chiffres intéressants, mais dans la réalité, l’analyse révèle que ce n’est exactement pas ce que les Américains auraient souhaité. L’autre chose, c’est le bilan mitigé ou encore controversé du président Biden en ce qui concerne la politique étrangère des Etats-Unis avec les foyers de tension mal gérés un peu partout. Aussi un troisième élément, qui est un élément clé à ne pas perdre de vue, c’est l’attachement du peuple américain au conservatisme. Or, à l’analyse, c’est avec la présidence des démocrates donc du président Biden, qu’on a vu certaines remises en cause d’éléments qui étaient consacrés comme des éléments apparemment intangibles, notamment la question de l’avortement et bien d’autres questions. Donc, il y a ces éléments qui ont beaucoup joué, qui ont beaucoup pesé dans la balance pour que finalement les Américains veuillent accorder leur confiance une fois de plus à un candidat républicain notamment le président Donald Trump qui avait déjà fait ses expériences. Et peut-être qu’il y a aussi des raisons sous-jacentes qu’il serait difficile de mentionner publiquement. C’est aussi une question de classe de puissance. Pour ne pas aller dans les détails, il y a une certaine force qui préfère la carrure de quelqu’un comme Donald Trump pour venir remettre en cause un certain nombre d’éléments. Au vu de tous ces éléments, il faut se demander si le peuple américain est prêt à accepter les remises en cause qui ont été faites par le président Biden, la réponse est non. Il faut se demander si le peuple américain est prêt à accepter d’être gouverné par une figure féminine. La réponse au regard des faits, c’est non. Nous l’avons vécu notamment en 2016 avec la candidature de Hilary Clinton qui était bien partie plus que Kamala Harris, mais à la dernière minute, a perdu par le jeu des grands électeurs. Les Américains ont fait parler leur voix, ils ont fait un choix clair. Il faut retenir aussi qu’il y a la Russie qui, d’une façon ou d’une autre, a pesé dans les élections américaines, parce que les services russes n’ont pas manqué de faire un travail pour que Donald Trump qui s’entend le mieux avec le président russe, Vladimir Poutine, puisse être élu 47ème président de la République des Etats-Unis. Par ailleurs, je ne pense pas que l’Afrique ou encore les Africains trouvent quelque chose à gagner de façon particulière dans l’élection du président Donald Trump parce qu’il s’agit d’abord de l’élection d’un président pour les citoyens américains. C’est vrai qu’il s’agit de la première puissance mondiale qui essaie quand même d’imprimer une dynamique à la politique étrangère, ce qui se passe un peu partout sur les autres continents. Vu sous cet angle-là, on peut dire effectivement quelle est la part de l’Afrique. Ce qu’il faut retenir, c’est que pour le mandat que le président Donald Trump a eu précédemment avec son élection en 2016, il a affiché une politique claire vis-à-vis de l’Afrique. Il a essayé d’asseoir sa politique sur le néo isolationnisme, ce qui a fait qu’il a préféré se retrancher et il a mis l’Afrique complètement dans une autre dynamique. L’Afrique n’était pas sa priorité, la preuve, il n’a jamais visité l’Afrique durant son mandat contrairement à ses prédécesseurs. Il n’a reçu à la Maison Blanche que deux présidents africains notamment de la région Anglophone. Le président du Kenya et le président du Nigeria à l’époque le président Buhari et le président Uhuru Kenyatta. Il n’intervenait pas trop dans les questions africaines. Il a même tenu des propos qui ont été mal appréciés par les Africains. Pour lui, l’Afrique n’est pas sa priorité et je pense qu’il va continuer dans la même logique. Sa priorité d’abord, c’est le nationalisme, l’unilatéralisme et aussi le bilatéralisme avec certains Etats. Il n’y a pas grand-chose à gagner pour les Africains, si ce n’est que l’autonomie. Ça permet aux Africains de comprendre que leur destin est entre leurs mains. Je vois quelques éléments de perte sur la question de planification familiale et les questions de minorité, je veux parler de minorité genre et minorité sexuelle, les questions d’avortement sécurisé également. Les Etats-Unis étaient le plus grand pourvoyeur qui finance ces questions-là. L’Afrique peut avoir une enveloppe restreinte parce que la philosophie du président Donald Trump est aux antipodes de la promotion de la planification familiale, de la promotion des Lgbtq+ et de la promotion de l’avortement sécurisé. Donald Trump est contre tous ces éléments-là. Il est fort probable qu’il y ait un certain nombre de limitation. Ce que l’Afrique peut gagner, c’est par rapport aux foyers de conflit sur le continent notamment les pays de l’Afrique de l’Ouest, le Sahel surtout, on peut voir une autre ouverture, une autre politique vis-à-vis de ces États-là de la part du président Donald Trump. »
Serge Winner Abbecy, chercheur à Hartford University Connecticut : « Trump est en train de réussir le grand chelem »
« Ce qui s’est joué sur nos yeux c’est du Alexandre Dumas, le comte de Montecristo. Nous avons tous vu le come-back, la revanche d’un homme, parce que nous venons de loin. Il faut se souvenir que son élection en 2016 avait été contestée, qu’il a eu deux tentatives de impeachment de renversement au cours de son mandat. Qu’il était isolé le 6 janvier dernier, qu’il avait été combattu par tous, que les médias et l’establishment. Ensuite, il a connu une traversée de désert. Personne ne pariait pour son retour, il a connu 02 procès au pénal, 19 inculpations, une tentative d’assassinat presque réussie le 13 juillet dernier, 2 autres dont on a peu parlé. Donald Trump a fait campagne avec énergie et détermination 900 réunions électorales ces derniers mois et il a réussi quelque chose d’historique. C’est historique en ce sens que c’est seulement la seconde fois en 230 ans et en 60 élections présidentielles qu’un président battu une première fois est revenu quatre ans après et a réussi à se faire élire. Le précédent s’était Grover Cleveland 22ème et 24ème président élu en 1884 battu en 1888 et de retour à la Maison Blanche en 1892. Trump est en train de réussir le grand chelem si les chiffres de la nuit électorale se confirmaient. Ça veut dire une victoire à la présidentielle, une victoire républicaine au sénat et peut être une victoire à la chambre au congrès, mais surtout une victoire dans le vote populaire. Ce n’est pas arrivé depuis 1992 à l’exception de 2004, la réélection de Bush. Il n’est pas arrivé qu’un républicain gagne une présidentielle avec le vote populaire. Il faut se souvenir qu’il a perdu le vote populaire en 2016 qu’il a perdu à nouveau en 2024. En 2016, il a été élu grâce au vote des grands électeurs, donc la victoire par Etat. Il faut rappeler que pour être élu, il faut 270 grands électeurs sur les 538. C’est la victoire de la vérité sur l’idéologie, du concret. Quelqu’un disait que la réalité c’est quand on se cogne. L’Amérique est en proie à de grandes difficultés sous l’administration Biden. Grandes difficultés en ce que l’inflation a explosé. Tout le monde connait l’inflation à travers la planète. Le Covid, la guerre en Ukraine. Mais ici aux Etats-Unis, il y a des causes beaucoup plus endogènes. Les Démocrates quand ils sont allés au pouvoir en 2020, ont limité l’exploitation du pétrole. Il faut savoir que les Etats-Unis ont les premières réserves de pétrole et de gaz dans le monde, davantage que l’Arabie Saoudite et la Russie. Il y avait un boom du secteur pétrolier. Mais au nom des accords de Paris, au nom de la lutte contre le réchauffement ou ce qu’ils appellent le dérèglement climatique, ils ont décidé de limiter l’exploitation du pétrole provoquant de fait une hausse des prix. Nous avons connu plus de cent pour cent d’augmentation des prix du pétrole dans ce pays, de l’essence ou du gasoil. Il faut savoir que c’est un pays très grand que les villes s’étendent et que les Etats s’étendent à perte de vue et qu’il n’y a pas de transport en commun. Tout le monde ici ou presque roule en voiture. Donc quand vous avez des dizaines de centime de dollars ou un doublement des prix en une année, ça mal au portefeuille. Les Américains ont voté cette fois-ci avec leurs portefeuilles et leurs caddies. Leurs caddies parce que l’inflation a été absolument insoutenable. Je parlais du prix du pétrole, ça a baissé un peu ces dernières semaines à la veille des élections. Les prix des produits de première nécessité ont explosé, il n’y a pas du tout une maîtrise. On ne demande pas au gouvernement de fixer les prix. On n’est pas en Corée du Nord ou en Union Soviétique ou à Cuba ou au Venezuela. Mais il y a quand même une politique commerciale qui devrait permettre de soutenir les salaires et de contenir les prix. L’immobilier est devenu inabordable, les prix ont explosé. Parce qu’il n’y a pas une politique qui favorise la construction de nouvelles maisons. Il n’y a pas beaucoup de nouvelles maisons sur le marché donc les prix ont explosé. Les murs porteurs de la politique de l’administration démocrate. Ça été un accent mis sur le droit des minorités, en ce que le premier décret que le président Biden a signé en arrivant au pouvoir portait sur les toilettes non générées. Je vous parle d’un pays où il y a de graves problèmes sociaux ou énormément de gens dorment dans la rue, y compris en hiver, où les gens ont du mal à boucler leur fin du mois. La première des préoccupations de l’administration démocrate ça été de favoriser les droits des lgbt. Je n’ai rien contre les lgbt. Il faut savoir que c’est la marge. Ça ne peut pas devenir le cœur d’une politique et l’autre chantier a été de promouvoir la trans-identité. Favoriser les questions de changement de sexe. Le droit à l’avortement est devenu l’étendard, l’axe de fixation de la politique démocrate. Et tout ce qui est politique (avortement, euthanasie) de mort a été promu au nom des droits individuels, la famille a été déconstruite en ce qu’elle a de conceptuelle. Et au bout de tout ça, puisqu’ils n’ont de programme à vendre, ils ont vendu aux Américains la figure d’un Donald Trump démonisé affublé de la figure du diable. Ils ont passé leur temps à semer la peur. Voilà on ne peut mentir à un peuple tout le temps. L’élection de Donald Trump, c’est la victoire d’un homme qui a ses défauts, qui n’est pas fin qui n’est pas raffiné, mais qui a un bilan. Son bilan c’était une économie en parfait état de croissance forte. Son bilan c’était une politique internationale fondée sur la paix et le règlement des conflits. Je rappelle les accords d’Abraham pour pacifier le Proche et le Moyen Orient. Il est allé jusqu’à tendre la main à un Etat toxique comme la Corée du Nord »
Sergino Lokossou