La forêt sacrée de Ouidah a abrité le dimanche 20 octobre 2024, une cérémonie de prières et de libations organisée pour implorer la paix aussi bien pour le président Patrice Talon, après la tentative de remise en cause de l’ordre constitutionnel, que pour les populations béninoises. Dans l’interview ci-dessous publiée, l’initiateur de cette activité, le promoteur du journal « L’indépendant », Dr John Akintola, revient sur la pertinence de cette cérémonie qui a connu la participation de plusieurs personnalités politico-administratives dont le maire de Ouidah Christian Houétchénou, le député Maixent Djéïgo, d’acteurs politiques toutes tendances confondues, de chefs traditionnels et religieux.
Le Matinal: Lors d’une récente cérémonie de prières organisées dans la forêt sacrée de Ouidah, visant à implorer la paix tant pour le chef de l’État, suite à la tentative de coup d’État, que pour l’ensemble des populations sous votre leadership, pourriez-vous nous éclairer sur la pertinence de cette initiative, Dr John Akintola ?
Dr John Akintola: En cette période marquée par une profonde crise politique et l’émergence de doutes quant à l’ordre constitutionnel, comme l’a souligné le procureur spécial, il est crucial de créer des espaces de dialogue et de communion. Ainsi, organiser une prière et des libations pour la paix représente non seulement un moment de recueillement, mais aussi un symbole fort d’espoir et de solidarité entre les membres de notre communauté. Ce rassemblement spirituel, qui s’inscrit dans une démarche inclusive, aspire à rassembler des personnes de diverses confessions, renforçant ainsi le tissu social et promouvant une guérison des tensions politiques et sociales. En cet instant de doute et de suspicion, il est essentiel de susciter un appel à l’unité pour favoriser la réconciliation et la compréhension entre les citoyens de notre nation. Notre démarche se veut être un soutien tant spirituel que moral à l’égard de notre président, Patrice Talon, tout en encourageant la population à se rassembler autour des valeurs de paix, de solidarité et de fraternité. En fin de compte, ce type d’initiative transcende les clivages et vise à instaurer un climat de confiance afin de bâtir un avenir harmonieux pour tous.
Au cours de cette activité, vous avez été accompagné de personnalités politiques telles que le maire Christian Houétchénou et le député Maixent Djéïgo. Peut-on alors considérer cette initiative comme étant motivée par des enjeux politiques, ou s’agit-il d’un élan patriotique qui vous a conduit à l’organiser ?
Je tiens à préciser que cette cérémonie ne revêt aucun caractère politique. Il s’agit d’une initiative profondément spirituelle, imprégnée d’un sentiment patriotique que la conjoncture actuelle nous incite à exprimer. Nous ne poursuivons aucun agenda politique à travers cet engagement, qui est avant tout orienté vers la paix et la sauvegarde de la vie humaine. Le choix de la forêt sacrée de Ouidah, un lieu empli de symbolisme et de sacralité, témoigne de notre volonté de nous inscrire en dehors des considérations politiques habituelles. Cette dimension spirituelle a d’ailleurs permis de rassembler des personnes issues de divers horizons sociaux et de différentes obédiences politiques, toutes unies par une cause commune : la cohésion sociale et la recherche d’un avenir pacifique. Ainsi, notre approche transcende les clivages politiques et affirme notre détermination à travailler ensemble pour un objectif noble et essentiel, éloigné de toute instrumentalisation politique. C’est dans cette solidarité que nous puisons la force nécessaire pour avancer, car notre seule préoccupation demeure la paix et la protection des vies humaines, éléments fondamentaux à préserver dans notre société.
Quelles sont les autres personnalités présentes à la cérémonie en dehors des deux mentions précédentes ?
En plus des deux personnalités précédemment citées, à savoir le maire de Ouidah, Christian Houétchénou, et le député Maixent Djéïgo, de nombreuses autres personnalités ont été conviées à cette cérémonie. Nous avons notamment remarqué la présence notoire du coordonnateur communal du Bloc républicain (Br) à Ouidah, ainsi que des militants représentant divers partis politiques, dont la Force cauris pour un Bénin émergent (Fcbe), le Rassemblement national (Rn) et Les démocrates. Cette ouverture politique témoigne d’un réel engagement civique, transcendant les clivages partisans. En outre, la cérémonie a vu la participation de chefs traditionnels et religieux, parmi lesquels Sa Majesté Iya Lodé, Dah Boya, et Dah Menou Tchiakpe. Le président des Bokonos de Ouidah, Kpomassè, ainsi que des figures éminentes telles que Tori (Okt), ont également honoré l’événement de leur présence. Cette réunion de diverses personnalités démontre non seulement la cohésion sociale qui règne au sein de la communauté, mais elle souligne aussi l’importance des valeurs spirituelles qui unissent les filles et fils de Ouidah, en prière pour la nation et son chef. Les participants se distinguent par leur volonté collective de s’élever au-dessus des divergences politiques, s’engageant ainsi dans une démarche de solidarités et d’espérances pour l’avenir de leur localité et du pays tout entier.
Peut-on s’attendre à une multiplication des cérémonies de prières et de libations dans la ville de Ouidah à l’avenir ?
Il est indéniable que la ville historique de Ouidah, qui a su conserver les traces de son riche héritage culturel et spirituel, se tourne résolument vers la réaffirmation de son identité en tant que berceau du Vodoun et de ses traditions. Ainsi, les pratiques spirituelles et religieuses, longtemps en retrait, deviennent progressivement des éléments centraux du quotidien des habitants et des visiteurs. De fait, il est prévu que ces cérémonies de prières et de libations, emblématiques du Vodoun et de l’ancestralité de la région, connaissent un regain d’activités significatif. Les lieux de culte, ainsi que les couvents traditionnels, joueront un rôle primordial dans ce renouveau, en accueillant un nombre croissant de rituels et de célébrations. Cela traduit non seulement une volonté de préserver et de transmettre un patrimoine culturel indissociable de l’identité locale, mais également de revaloriser les pratiques spirituelles qui font partie intégrante de la vie communautaire. Les organisations, les artisans et les praticiens du Vodoun se mobilisent pour faire vivre ces rites, attirant ainsi des passionnés, des chercheurs et des curieux, tout en soutenant le développement d’un tourisme culturel responsable. À cet égard, Ouidah s’affirme comme un lieu de rencontre et d’échanges, où se mêlent traditions ancestrales et modernité, au bénéfice d’une dynamique inclusive et enrichissante pour tous. Par conséquent, il est à prévoir que les cérémonies de prières et de libations deviendront de plus en plus fréquentes et populaires, témoignant ainsi d’un véritable élan de renaissance spirituelle dans cette cité emblématique.
Cette cérémonie trouve son inspiration dans la sagesse et les recommandations de nos ancêtres. Il s’agit là d’un moment revigorant pour la mobilisation des différentes entités spirituelles de Ouidah, qui se sont unies pour insuffler un nouvel espoir dans la communauté, après les incertitudes et les craintes engendrées par une récente tentative de coup d’état. Cette initiative symbolise non seulement une renaissance collective mais également le ciment d’un engagement partagé pour la paix et l’harmonie sociale. En rassemblant les membres de la communauté autour de valeurs spirituelles et culturelles, cette cérémonie vise à forger des liens renforcés, à promouvoir la cohésion et à instaurer un climat de sérénité indispensable à la prospérité de la ville. La présence de diverses entités représentatives, telles que les chefs traditionnels et les acteurs sociaux, souligne l’importance de cette rencontre qui s’inscrit dans une démarche de paix et de réconciliation. En définitive, cette cérémonie est bien plus qu’un simple événement : elle incarne l’espoir d’un avenir serein et le désir ardent d’une communauté soudée autour de ses valeurs ancestrales.
Propos recueillis par Serge Adanlao