La Fédération béninoise de football (Fbf), à l’occasion de l’atelier de travail qui a réuni, le lundi 28 févier 2022, les membres du comité exécutif à Porto-Novo, a exprimé son ambition de changer le nom « Ecureuils » dédié à l’équipe nationale de football du Bénin par un autre identifiant. Une décision diversement appréciée par les acteurs du sport roi du Bénin. Lire ci-dessous leurs impressions.
Beaugard Koukpaki, historien culturel : « Là, n’est pas l’urgence » : « Si le nom suffisait pour gagner les matchs, plusieurs équipes ne passeraient pas leurs seuils au niveau national.
Mon analyse ira terre à terre puisque je ne sais rien du football contrairement aux experts. Mais puisque ce n’est pas le nom qui joue et gagne les matchs, je dirai quelques mots. Pas parce que ma thèse de doctorat porte sur un siècle d’étude (1910-2010) de football au Dahomey-Bénin mais en tant que citoyen lambda.
Le lundi 28 février 2022, inscrit à l’ordre du jour à la séance tenue à Porto-Novo par la Fédération béninoise de football, le point portant changement de nom de notre équipe nationale semble diviser les acteurs du cuire rond. Et moi, suffisamment novice dans le secteur pense que là n’est pas l’urgence.
Entre la charrue et le bœuf, c’est le bœuf qu’il faudrait avoir d’abord, puis la charrue viendra tenir l’animal, puis encore, la marche s’enclenche.
C’est déjà bien que de telles réflexions se mènent autour du football. C’est déjà bien que l’on pense à mieux faire et rattraper le retard grave de notre équipe nationale de football. Mais changer de nom sans changer d’habitudes serait faire du surplace car, face à une situation où face à un problème encore technique, il faut évaluer. Et si ce travail technique avait été fait, je ne pense pas que ce serait le nom de notre équipe qui serait la faiblesse de l’équipe et qu’il faudra changer. Il faut travailler mes chers et respectables dirigeants à divers niveaux de la fédération. Il faut travailler à revoir notre méthode de travail, de sélection. Je parle ici de sélection de joueurs et d’entraîneurs.
Quels résultats voudrions-nous avoir si nous n’avons pas une équipe nationale ? Quels résultats espérons-nous lorsque nous n’investissons pas dans nos clubs pour promouvoir davantage nos talents locaux? Quels résultats attendons-nous lorsque, c’est à la veille des matchs qu’on débarque des « Experts internationaux » qui viennent tout internaliser en notre défaveur ?
Si le nom pouvait faire gagner une équipe, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Nigéria, la Tunisie, l’Egypte, etc., n’auraient pas raté la finale de la Coupe d’Afrique 2022, pour que le Sénégal l’emporte fièrement.
Il faut travailler. Il faut consolider l’équipe nationale pour en avoir désormais une et digne du nom.
Des Ecureuils au Ratel, des Fourmis au Cobra, du Requin à la Vipère, je pense que ce n’est pas là le problème du football béninois.
Le ministre Oswald Homéky fait assez d’efforts et je le salue. Le gouvernement a beaucoup investi dans les infrastructures et le peuple ne dira pas le contraire. Tout ça, c’est bon. C’est à féliciter. Mais si nous continuons toujours dans des choix hasardeux et précipités ou passionnés, rien ne changera de notre football puis, nous risquons de rester à l’étape de chargeur de bus pour faire voyager d’autres équipes. Puisque nous ne voulons pas être accompagnateurs assidus, pour ne pas tout le temps organiser la fête et laisser les sages en jouir, il faut qu’on s’essaye pour repenser convenablement notre football qui nous unit tous.
Je sais que le nom influence beaucoup. Je suis Africain et né dans la culture. Mais que Ratel ait une endurance féroce, soit tenace, ou ait une capacité de vie de 25 ans et plus sur l’éléphant ou sur l’Ecureuil, à mon humble avis, le problème de notre football n’est pas là. Cherchons en changeant de méthode dans la gestion des sélections, de nos clubs dans lesquels il faudra plus encore investir, repenser l’organisation des championnats vu que nous avons assez d’infrastructures sportives, il faut travailler et oublier pour l’instant ce projet de changement de nom. Même si notre équipe nationale de football s’appelle la Feuille morte, si nous travaillons réellement, beaucoup viendront à notre porte. Je finirai pour rappeler à tout le monde que le Bénin a changé. Qu’il est temps que son sport roi suive également le pas. »
Pérez Lèkotan, journaliste-sportif : « …le nom n’a rien à voir avec la performance»
« Ma position n’a pas changé depuis 2018 quand ce dossier est déposé sur la table du président de la Fédération béninoise de football (Fbf), Mathurin de Chacus en août 2018 après sa brillante élection. J’avais eu la chance de faire partie du groupe très restreint de journalistes sportifs consultés par le Cabinet commis à la tâche. Je leur avais souligné clairement que le nom d’une sélection nationale ou d’une équipe ne fait pas d’elle, une meilleure performance. C’est donc avec consternation totale et une déception sans limite que j’apprends qu’en réunion du Comité exécutif de la Fbf, le changement du nom Écureuils a été validé à l’unanimité des membres. Pour moi, c’est une aberration et une incongruité totale. Nous sommes en 2022, le ministre des Sports, Oswald Homéky et le président de la Fbf, Mathurin de Chacus, devraient savoir que le nom d’une équipe n’a rien à avoir avec sa performance. C’est de la pure comédie, cela me semble bizarre mais en même temps, je me suis dit que cela témoigne de la maladresse de nos dirigeants à tenir compte des problèmes minimes que de chercher à vouloir faire les choses normalement. La vraie priorité aujourd’hui est de nommer un sélectionneur national à la tête des Ecureuils dont ils veulent changer de nom alors que les éliminatoires de la Coupe d’Afrique des Nations (Can) Côte d’Ivoire 2023 s’annoncent à grands pas. Vous comprenez avec moi que c’est du grand n’importe quoi. On laisse les problèmes majeurs du Football béninois de côté et on s’attaque à un mythe. Le surnom ne remplace pas l’organisation de notre Football. La France avec son surnom Le Coq Sportif a été deux fois championne du monde et une fois championne d’Europe. Il faut donc arrêter de commettre des bêtises. Mais, je suis rassuré que c’est un projet mort-né si le peuple sera vraiment consulté. Le chantier du Football béninois est trop vaste pour s’accrocher à ce projet. Même les Fourmis du Bénin peuvent bien jouer si toutes les structures de développement sont mises en place. A ce jour, le Bénin n’a même pas un Directeur technique national (Dtn) avant qu’on ne parle d’une Direction technique nationale. Si c’est le nom qui faisait gagner, les Lions de la Teranga, Les Lions de l’Atlas et Les Lions Indomptables seraient déjà champions du monde de football. Que les gens cessent les petits jeux et aillent à l’essentiel. Pour le championnat professionnel on soumet les clubs à un format sans aucun résultat depuis 2 ans. Les stades nouvellement construits sont fermés aux clubs de 3ème division qui continuent par sortir de gros moyens pour se déplacer avant de jouer sur un terrain gazonné exigé par la Ligue. Aucune équipe nationale ne participe à aucune compétition continentale, toutes ont été éliminées ; de même que les clubs. En somme, les mots qui minent notre football sont ailleurs. »