Malgré le plaidoyer mené à l’endroit de l’Assemblée nationale pour la non adoption du projet de loi portant relecture de la loi organique sur le Conseil économique et social (Ces), les députés ont, dans la journée du vendredi 21 juin 2024, examiné et voté le document qui exclut désormais les Centrales et Confédérations de l’institution. Joint par la rédaction de « Le Matinal », le secrétaire général de la Confédération des organisations syndicales indépendantes du Bénin (Cosi-Bénin), Codjo Hinlin, regrette l’acte posé par les élus parlementaires malgré les démarches menées vers l’institution par les leaders syndicaux. A l’en croire, les responsables syndicaux ne baisseront pas les bras. Toutes les voies de recours seront utilisées pour obtenir une seconde lecture de la loi ou la déclarer contraire à la Constitution.
Le Matinal : La nouvelle loi organique sur le Conseil économique et social (Ces) a été voté malgré l’alerte sonnée par les Centrales et Confédérations syndicales le vendredi 21 juin 2024. Votre réaction.
Codjo Hinlin : Comme tous les Béninois, nous avons été informés du projet de loi portant loi organique sur le Conseil économique et social qui serait sur la table des députés et qui était prévu pour être adopté le vendredi 21 juin 2024. Notre réaction en tant que secrétaire général de la Cosi-Bénin, de concert avec les autres secrétaires généraux, a été dans un premier temps d’alerter l’opinion nationale et internationale à travers le point de presse que nous avons tenu à la Bourse du travail le mercredi 19 juin. Le même jour, nous avons introduit au cabinet du président de l’Assemblée nationale, une lettre de demande d’audience. Une demande à laquelle un avis favorable a été donné le jeudi 20 juin dans la soirée pour que nous puissions répondre le lendemain matin au cabinet du président de l’Assemblée nationale qui a bien voulu nous faire recevoir par le président de la Commission des lois, le député Orden Alladatin. A cette occasion, nous avons transmis notre document de plaidoyer aussi bien au président de la Commission des lois qu’à un certain nombre de députés avec l’espoir qu’ils vont comprendre en lisant le plaidoyer qu’il n’est en réalité pas possible que les Centrales et Confédérations syndicales soient exclus du Conseil économique et social pour plusieurs raisons que nous avons énumérées. Nos sentiments sont des sentiments de déception. Que des députés qui plus est des représentants du peuple ne puissent pas comprendre que les syndicats en tant que confédérations syndicales, nous avons une fonction représentative de tous les travailleurs salariés comme non salariés du Bénin ; que nous avons une fonction sociale et régulatrice de l’action publique et au nom de cette fonction, nous avons nos sièges au sein du Ces. Ils ont décidé puisque c’est eux qui ont le pouvoir de légiférer au nom du peuple, de remplir le Ces des partisans politiques parce que pour l plupart, ils seront désignés par l’Assemblée nationale, le président de la République et comme pour masquer un peu la face, il y a le président de la Chambre nationale de l’agriculture, de la Chambre des métiers et de la Chambre de commerce et d’industrie du Bénin. Nous, en tant Centrales et Confédérations syndicales, nous sommes très déçues du vote de cette loi sous cette forme. Nous n’entendons pas baisser les bras. Nous allons utiliser toutes les voies de recours et les textes législatifs et réglementaires pour que cet acquis puisse être rétabli.
Parlant de voies de recours, que comptez-vous faire de façon concrète ?
Nous allons nous référer au chef de l’Etat afin qu’il demande une seconde lecture de la loi. Nous allons également saisir la Cour constitutionnelle pour que cette loi puisse être déclarée non conforme à la Constitution parce qu’elle ne l’est.
Au cas où ces voies n’aboutissaient pas, qu’allez-vous faire ?
Ce qui est sûr, nous n’entendons pas baisser les bras. Au cas où ces voies n’aboutiraient pas, nous allons nous réunir pour apprécier et prendre d’autres décisions pour que l’essentiel soit préservé. L’essentiel, c’est l’éthique, l’essentiel c’est que chaque acteur puisse se retrouver là où il doit être pour contribuer au bien-être commun et au développement du pays.
Pensez-vous que le vote de cette loi organique est une sanction contre les syndicalistes qui ont agité récemment l’opinion à travers les mouvements de protestation contre la cherté de la vie au Bénin ?
Le chef de l’Etat est d’un certain niveau. Il ne se laisserait pas aller à un jeu comme celui-là. Ce n’est pas parce qu’on a contesté ou protesté contre quelque chose qui n’est pas bien qu’il faut dire que les institutions républicaines dans lesquelles nous devons être présentes pour contribuer à enrichir les débats et au développement du pays, qu’il faut nous sortir. C’est un peu comme si on se retrouve dans une République où la seule loi qui règne, est celle de la jungle, la loi du plus fort.
Propos recueillis par Serge Adanlao