Le Commissaire de Hwlacodji à Cotonou est condamné par la Cour constitutionnelle dans un dossier où il lui est reproché d’avoir placée arbitrairement une dame en garde à vue.
C’est à la suite d’une plainte à Godomey en date du 10 février 2021 que dame Marina Adjoh a saisi la haute juridiction pour « garde à vue arbitraire et abusive ». Dans sa plainte, elle a fait savoir que dans le cadre d’un litige relatif au non-paiement de loyers, elle a été conduite au commissariat de Xwlacodji par le représentant de son propriétaire. Après audition, la requérante informe avoir été placée en garde à vue du 04 février vers 14 heures au 06 février à 21 heures 49 minutes. Elle a également dénoncé des actes de violence dont elle a fait l’objet dans le commissariat. A l’analyse, et conformément aux dispositions de l’article 18 de la Constitution alinéa 1 et 4, et de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, la Cour constitutionnelle a jugé que dame Marina Adjoh a été placée en garde à vue « en dehors de toute infraction pénale ». Une telle garde à vue selon les sages de la Cour, est « arbitraire et contraire à la Constitution ». La requérante a été placée en garde à vue au-delà de 48 heures sans être présentée à un magistrat, ont déploré Joseph Djogbénou et les autres membres de la Cour qui n’ont pas hésité à condamner le commissaire.
Léonce Adjévi
Décision Dcc 21-115 du 1er avril 2021
La Cour constitutionnelle,
Saisie d’une requête en date à Godomey du 10 février 2020, enregistrée à son secrétariat le 03 mars 2020 sous le numéro 0641/305/REC-20, par laquelle madame Marina Adjoh, BP 2819 Abomey-Calavi, forme un recours contre le commis s aire du commissariat de police de Hwlacodji pour garde à vue arbitraire et abusive ;
Vu la Constitution ;
Vu la loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour constitutionnelle modifiée le 31 mai 2001
Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle ;
Ensemble les pièces du dossier;
Ouï monsieur Fassassi Moustapha en son rapport ;
Après en a voir délibéré,
Considérant que la requérante expose que dans le cadre d’un litige relatif au non paiement de loyers, elle a été conduite au commissariat de Hwlacodji par le représentant de son propriétaire, monsieur KarimouTella, et après audition, elle a été gardée à vue du 04 février vers 14 heures au 06 février 2020 à 21 heures 49 minutes, pour une affaire civile sans avoir commis une infraction à la loi pénale ; qu’elle soutient n’avoir été libérée qu’après avoir été contrainte de prendre un engagement écrit; qu’elle ajoute avoir subi des actes de violence audit commissariat et saisit la Cour pour garde à vue arbitraire et abusive ;
Considérant qu’en réponse, le commissaire de police de Hwlacodji rejette les allégations de la requérante ; qu’il observe que la requérante a été con d u ite a u commissariat par son propriétaire pou r n on paiement de loyers qui constitue un a bus de con fiance; qu’il soutient qu’elle a été gardée à vue par mesure de sécurité en attendant l’appui financier de ses parents ;
Vu les articles 18 alinéas 1 et 4 de la Constitution et 6 de la Charte africaine des droits d e l’Homme et des peuples ;
Considérant qu’aux termes des articles 18 alinéa s 1 et 4 de la Constitution et 6 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples : « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des sévices outraitements cruels, inhumains ou dégradants. Nul ne peut êtredétenu pendant une durée supérieure à quarante-huit heures quepar la décision d’un magistrat auquel il doit être présenté. Ce délaine p eut être prolongé que dans des cas exceptionnellement prévuspar la loi et qui ne p eut excéder une période supérieure à huit jours» ; « Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne.
Nul ne p eut être privé de sa liberté sauf pour des motifs et dans des conditions préalablement déterminées par la loi, en particulier nul ne p eut être arrêté ou détenu arbitrairement » ;
Considérant qu’en l’espèce, il ressort du dossier que dans un litige de loyers impayés, le commissaire de police de Hwlacodji a mis en garde à vue madame Marina Adjoh, du 04 a u 0 6 février 2020 en dehors de toute infraction pénale ; qu’une telle garde à vue est arbitraire et contraire à la Constitution ;
Considérant qu’en outre, la requérante a été gardée à vue du 04 février 2020 vers 14 heures a u 06 février 2020 à 21 heures 49 minutes, soit au-delà des 48 heures prévues par la loi sans être présentée à un magistrat en violation de l’article 18 ci-dessus cité; qu’il s’ensuit que la durée de sa garde à vue es t abusive et qu’il y a lieu de conclure que la garde à vue de madame Marina Adjoh est abusive ;
En conséquence,
Di tque la garde à vue de madame Marina Adjoh est arbitraire et abusive.
La présente décision sera notifiée à madame Marina Adjoh, au commissaire du commissariat de police de Hwlacodji et publiée au journal officiel.
Ont siégé à Cotonou, le premier avril deux mille vingt-et-un,
Messieurs Joseph Djogbénou Président
RazakiAmoudaIssifou Vice- président
Madame Cécile Marie José de DravoZinzindohoué Membre
Messieurs André Katary Membre
Fassassi Moustapha Membre
Sylvain M. Nouwatin Membre
Rigobert A. Azon Membre
Le Rapporteur, Le président