Le débat sur un troisième mandat présidentiel anime régulièrement les discussions politiques en Afrique. Au Bénin, pays souvent cité comme un modèle de démocratie en Afrique de l’Ouest, cette question refait surface alors que le mandat du président Patrice Talon arrive au terme de son second et dernier mandat en 2026. Cependant, plusieurs obstacles rendent cette perspective hautement improbable, voire impossible.
Dès son accession au pouvoir en 2016, Patrice Talon a affirmé sa volonté de rompre avec les pratiques du passé en instaurant une gouvernance basée sur la rigueur et la transparence. Fidèle à son engagement initial de ne pas briguer plus de deux mandats, il a maintes fois réaffirmé son intention de quitter le pouvoir en 2026. « Je ne ferai pas un jour de plus », a-t-il déclaré publiquement, coupant court aux spéculations sur une modification constitutionnelle qui lui permettrait de prolonger son règne. Le Bénin dispose d’un dispositif constitutionnel strict en matière de limitation des mandats présidentiels. La Constitution de 1990, consolidée par la révision de 2019, stipule clairement que le mandat présidentiel est de cinq ans, renouvelable une seule fois. Toute tentative de modification pour ouvrir la voie à un troisième mandat se heurterait à un obstacle juridique majeur. En effet, l’article 42 de la Constitution dispose que « nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels », et l’article 156 interdit toute révision qui affecterait la durée du mandat ou le nombre de mandats du président en exercice. Ainsi, contrairement à d’autres pays où les chefs d’État ont réussi à modifier la loi fondamentale pour s’accrocher au pouvoir, la Constitution béninoise semble verrouiller cette possibilité. L’histoire politique récente du Bénin illustre la volonté d’empêcher la perpétuation au pouvoir. Mathieu Kérékou, après son retour en 1996, a cédé sa place en 2006, respectant la limitation des mandats. De même, Boni Yayi, après deux mandats de 2006 à 2016, n’a pas pu briguer un troisième mandat malgré certaines pressions et rumeurs. Ces précédents montrent que la tradition d’alternance démocratique est solidement ancrée au Bénin. Dans d’autres pays, la tentation du troisième mandat a souvent entraîné des crises politiques et sociales. Des manifestations, des contestations de l’opposition et parfois des coups d’État militaires sont survenus en réaction à ces tentatives de maintien au pouvoir. Le Bénin, en tant que démocratie stable, a jusqu’ici évité ces dérives.
Les mécanismes possibles pour un probable troisième mandat
Malgré ces verrous, plusieurs stratégies existent théoriquement pour contourner la limitation des mandats. Selon certains analystes, cela pourrait s’opérationnaliser par voie parlementaire. La révision constitutionnelle via l’Assemblée nationale requiert un vote des députés et une large adhésion politique, ce qui semble difficile étant donné l’encadrement strict des articles intangibles. Le second cas de figure est le référendum. En effet, certains dirigeants en Afrique ont justifié leur maintien par une consultation du peuple. Toutefois, cette voie semble peu probable au Bénin, compte tenu de la position affichée de Patrice Talon et des institutions veillant à la protection de la démocratie. Dans tous les cas, si le débat sur le troisième mandat présidentiel anime l’actualité politique dans plusieurs pays africains, il semble peu probable au Bénin en raison des verrous constitutionnels et de la volonté affichée de Patrice Talon de respecter son engagement. La tradition d’alternance démocratique instaurée depuis Mathieu Kérékou et Boni Yayi renforce cette tendance. En 2026, le pays devra donc se choisir un nouveau leader dans le respect de ses principes démocratiques.
Gabin Goubiyi