Instituée pour contribuer à la consolidation de la démocratie, de l’Etat de droit et de la bonne gouvernance, la Haute cour de justice (Hcj) n’arrive toujours pas à assumer sa mission juridictionnelle. En raison sûrement de paramètres inhibiteurs, qu’il faille corriger, afin que la Hcj joue effectivement son rôle de gendarme des dirigeants au plus haut niveau conformément à ses attributions.
Aux termes de l’article 136 de la Constitution du 11 décembre 1990 et 2 de la loi n° 93-013 du 10 août 1999 portant loi organique sur la Haute cour de justice, la « Haute cour de justice est compétente pour juger le président de la République et les membres du gouvernement à raison de faits qualifiés de haute trahison, et d’infractions commises dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions, ainsi que pour juger leurs complices en cas de complot contre la sûreté de l’État. Les juridictions de droit commun restent compétentes pour les infractions perpétrées en dehors de l’exercice de leurs fonctions et dont ils sont pénalement responsables ». Mais depuis février 2001, la Haute cour de justice peine à retrouver ses marques, dans le fonctionnement des institutions de l’Etat. Selon les spécialistes, beaucoup d’obstacles persistent et empêchent la juridiction d’être vraiment opérationnelle. Il s’agit entre autres, des conditions de saisine, de la décision de poursuite et de mise en accusation (votée à la majorité des 2/3 des députés de l’Assemblée nationale) ; la composition des membres de la Haute cour de justice (composée de politiques) ; le risque de concurrence entre la Haute cour de justice et la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet). Présentant une communication lors d’un atelier il y a quelques jours à Cotonou, le Professeur Ibrahim Salami, propose une réforme courageuse de la Haute cour de justice. Une réforme qui devrait tenir compte des conditions de saisine un peu plus ouvertes. Il a donné l’exemple de la France où ce sont deux juridictions différentes qui connaissent des infractions commises par le chef de l’Etat et celles commises par les membres du gouvernement.
Le Programme d’actions du gouvernement 2021-2026 a déjà prévu des réformes, afin de pallier les difficultés rencontrées par la Haute cour de justice à assurer sa mission. Pour le ministre de la Justice, il s’agit aujourd’hui de cristalliser des réflexions autour des réformes urgentes à engager pour alléger et accélérer la mise en état des procédures pendantes en vue d’une « justice de qualité qui est tout à la fois gage de paix sociale et de progrès ». Il appelle à des propositions de réformes législatives urgentes, afin que s’engagent sous l’égide du Parlement, les réformes nécessaires plus opérationnelles en vue de redonner à la Cour ses lettres de noblesse ». Pour lui, l’engagement du président Patrice Talon et de son gouvernement à œuvrer dans le sens de ces réformes sont intacts. Pour sa part, Cécile Marie José de Dravo Zinzindohoué, présidente de la Hcj, insiste sur la complexité de sa mission, complexité qui se nourrit, par ailleurs, du terreau d’un cadre institutionnel plus marqué de germes politiques, que juridiques. « Aujourd’hui plus que jamais, une réflexion générale s’impose donc sur la nature, le fonctionnement et l’avenir de la Haute cour de justice (Hcj). Notre détermination à surmonter les obstacles ne souffre d’aucune frilosité », ajoute-t-elle.
Wilfrid Noubadan