Le sieur Steeve Amoussou alias « Frère Hounvi » vit des moments les plus sombres de sa vie depuis son arrestation, lundi 12 août 2024 à Lomé. Selon beaucoup d’analystes, l’homme à la plume très amère contre le régime du Nouveau départ, risque gros dans cette affaire quand bien même des appels se multiplient au sein de l’opposition en vue de sa libération.
L’interpellation de « Frère Hounvi » est inéluctablement un coup dur pour l’opposition. Beaucoup prenaient pour une vilaine blague, l’alerte de l’arrestation de celui qui, depuis quelques années, semble donner de l’insomnie au pouvoir de Cotonou à travers ses chroniques hebdomadaires très épicées contre la gouvernance Talon. De toute évidence, l’on était à mille lieues de penser que le célèbre chroniqueur adoubé par l’opposition au pouvoir de la rupture, s’était établi au Togo depuis qu’il a pris la poudre d’escampette en raison de menaces sur sa sécurité. Au regard du caractère outrancier de ses sermons contre le régime, il était quasiment inimaginable que c’est depuis le Togo voisin, qu’il tirait à boulets rouges sur Cotonou. Ses chroniques à charge contre le chef de l’Etat et certains pions du régime, ne laissent aucune once de doute sur son opposition frontale à la gouvernance Talon. Son passage au sein de la cellule de communication de l’ancien magnat de la volaille, candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2016, Sébastien Ajavon, et les déboires de ce dernier avec Patrice Talon, auraient, selon des indiscrétions, conforté son choix d’affronter le régime et de sonner le tocsin selon son appréhension des choses. L’homme était devenu un véritable symbole d’opposition au pouvoir et les adversaires du régime, se délectaient de ses chroniques au contenu très osé, sentencieux et moralisateur. Face à l’incurie d’une opposition en panne de méthode et d’approche alternative pour ébranler le régime, le sieur Steeve Amoussou, alias « Frère Hounvi » était devenu, la principale arme des anti-Talon pour provoquer et déstabiliser le pouvoir de Cotonou. Il a réussi, à l’aune de ses diatribes et de ses tournures grammaticales et lexicales, à s’attirer l’estime d’une frange de la population. C’est donc à juste titre que son interpellation suscite moult agitations au sein de l’opposition parce que « Frère Hounvi » constitue l’un des pions sûrs, l’une des armes de combat que détenait encore jusque-là l’opposition béninoise pour donner l’insomnie au régime Talon jusqu’aux prochains challenges électoraux. Avec son arrestation, le pouvoir vient de reprendre la main. Si l’interpellation de Steeve Amoussou est perçue comme une prouesse dans le rang des affidés du pouvoir, elle sonne comme un coup dur pour l’opposition qui est en passe de perdre l’une de ses ultimes balles.
L’opposition à nouveau face à ses responsabilités
Même si elle fait flèche de tout bois pour obtenir la libération du célèbre chroniqueur, beaucoup doutent de la capacité de l’opposition béninoise à parvenir à ses fins. Déjà, son appel à la mobilisation, lundi 19 août 2024, à la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), n’a pas été suivi par les populations qui redoutent les scénarii de 2019, 2020 et 2021 qui ont coûté quelques années de prison à des jeunes sous le chef d’inculpation de violences électorales. Le souvenir de cette mésaventure est encore vivace dans les esprits et les populations craignent d’être des chairs à canon pour une opposition qui peine à prendre ses responsabilités. L’autre facteur qui aiguise les scepticismes et justifient les réticences des populations, est qu’elles ne croient plus en cette opposition qui est incapable depuis plusieurs années, d’infléchir la position du pouvoir, sur le retour au pays des exilés et la mise en liberté des prisonniers dits politiques.
Abdourhamane Touré