(Francis Ahouadi élu président pour trois ans)
Les parents et victimes d’accidents de la circulation ont désormais un creuset pour prévenir les drames routiers. Il s’agit de l’Association des parents et victimes d’accidents de la circulation. A l’issue de l’Assemblée générale élective tenue le 5 août 2023 à Cotonou, c’est Francis Damien Ahouadi qui a été élu président du creuset pour un mandat de trois (3) ans. Au détour d’une interview, ce dernier a présenté l’Association, les raisons qui sous-tendent sa création et les activités qu’elle entend mener pour prévenir au mieux les accidents au Bénin. Ci-dessous, des extraits de son interview.
Le Matinal : Monsieur Ahouadi, vous êtes depuis le 5 août 2023, le premier président de l’Association des parents et victimes d’accidents de la circulation (Apvac). Présentez-nous votre Association.
Francis Ahouadi : L’Association des parents et victimes d’accidents de la circulation a vu le jour le 5 août 2023 au cours d’une Assemblée générale organisée à Cotonou. Cette association est née à la suite du choc émotionnel que nous avons reçus après l’accident du 29 janvier 2023 où c’est finalement une trentaine de personnes qui sont décédées avec une vingtaine de blessés graves et finalement une quinzaine de survivants traumatisés à jamais avec des séquelles graves. Elle rassemble comme son nom l’indique, les parents et victimes des accidents au Bénin. Pour l’instant, ce sont les parents et victimes du drame de Dassa qui en sont les premiers membres. Mais elle est ouverte à d’autres membres ou associations qui le désirent. L’Association est dirigée par un Bureau exécutif de cinq membres et un Commissariat aux comptes qui est composé de deux membres. Nous avons des avocats qui sont nos conseillers juridiques et des personnalités membres de l’Association. Tout le monde peut adhérer à l’Association à condition d’en remplir les formalités qui sont très simples. Pour l’instant vous pouvez nous joindre au +229 67 54 03 30 où +229 60 56 39 39 ou encore par votre journal qui transmettra. Tous les membres de l’association sont bien connus.
Pourquoi avoir porté sur les fonts baptismaux, une telle Association ?
Nous avons créé l’Association des parents et victimes d’accidents de la circulation en vue d’aider les autorités à la sensibilisation et à la mise en place d’un véritable programme de prévention des accidents de la circulation et des accidents de toutes sortes. Dans les différents domaines de la circulation routière, il y a des normes à respecter. Dans le secteur routier en particulier, il y a également des normes qui doivent être opérationnelles. Il y a aussi des formations et sensibilisations à organiser à l’endroit de certaines institutions de la République chargées de la sécurité routière pour que le gouvernement mette en place un véritable programme de prévention des accidents de la circulation. Je parle de prévention, parce qu’on ne peut pas empêcher les accidents de la circulation. Mais nous pouvons faire en sorte de réduire les accidents. Pour y arriver, il y a différents facteurs à prendre en considération. C’est le cas des routes qui doivent être construites et dimensionnées suivant des normes et des panneaux de signalisation qui doivent être installés à différentes étapes de la circulation. Il y a le Code de la route qui doit être connu de tous ceux qui ont des permis de conduire. A ce propos, l’Etat doit faire en sorte qu’il y ait des évaluations périodiques du conducteur et des sanctions à appliquer lorsque ce dernier est en faute. Par exemple comme le prescrit le droit positif béninois, quand le conducteur est fautif, on peut lui retirer son permis de conduire. Il y a un phénomène qui mérite une attention particulière mais qui n’interpelle personne au Bénin et dans pratiquement tous les pays de la sous-région. Ce sont les auto-écoles qui présentent des candidats pour la conduite de véhicules de plus de quatre roues sans qu’ils ne disposent de camions ou de bus pour l’obtention du permis. Pis, il n’y a pas d’auto-écoles spécialisées dans l’apprentissage de bus ou de camions. Mais on ne sait par quelle alchimie, les candidats obtiennent les permis de conduite de bus et de camion. La conséquence, les accidents foisonnent sur les routes. Malgré l’accident du 29 janvier 2023 qui a ému la communauté nationale, les bus ont repris leurs mauvaises habitudes. Les camions roulent comme ils veulent sans être inquiétés. Des conducteurs de motos et de véhicules roulent sans les casques, les passagers des véhicules ne connaissent pas l’usage de la ceinture de sécurité. Etcétéra….Ce sont ces mauvaises pratiques que l’Association souhaite combattre modestement. Dans notre pays il y a beaucoup de progrès qui ont été réalisés dans différents domaines malheureusement tant qu’il y a faire, rien n’a été fait. Nous sommes prêts pour le combat même contre le gré des usagers.
Comment le combat va-t-il se mener sur le terrain ?
Nous ne sommes pas autorités, mais nous souhaitons vivement aider ces dernières car le citoyen a vocation à aider l’autorité à prendre des bonnes décisions pour l’avancement du pays. Nous nous sommes fait entourer des spécialistes pour atteindre nos objectifs.
Votre association sera-t-elle aux côtés du Cnsr sur les axes routiers pour la sensibilisation et autres actions ?
Pourquoi pas? Il n’y a pas que le Cnsr qui s’occupe de la sécurité routière au Bénin. Je me rends malheureusement compte que 90% des activités de ce Centre se résument au contrôle technique des véhicules. Et même par rapport à ce contrôle, il y a beaucoup à dire. Vous voyez des véhicules en circulation et vous vous posez la question de savoir si les contrôles techniques sont effectivement faits. Notre association est disposée à collaborer avec le Cnsr pour la mise en œuvre de ses programmes et le respect de ses règles conformément à la mission qui lui a été assignée par l’Etat.
L’Association est née quelques mois après le drame de Dassa dans lequel il y a eu beaucoup de morts. A quoi doivent s’attendre les proches des victimes de cet accident ?
Je fais partie des victimes collatérales du drame. J’ai perdu mon frère jumeau dans cet accident atroce. J’ai mené une enquête sur le terrain dès le lendemain du drame. Cette enquête n’est pas totalement bouclée. Je sais ce qui s’est passé. Le moment viendra où on parlera parce que nous voulons qu’il y ait procès. Il y a eu faute et nous allons démontrer la faute. Quand il y a eu faute, il doit avoir réparation et c’est pour cela que nous exigerons qu’il y ait procès. Nous allons faire tout ce qu’il faut pour qu’il y ait justice. Il ne s’agit pas pour nous de défendre uniquement des droits pour obtenir un dédommagement. Notre objectif, est qu’il y ait justice et que la justice fasse jurisprudence pour que désormais les conducteurs et propriétaires de véhicules ou de compagnies de transport soient en règle et sachent qu’il existe un gendarme qui veille au respect des règles. Ceci apaisera un temps soit peu les victimes survivantes et les parents des victimes décédées.
Pourquoi avoir attendu que le drame de Dassa se produise avant de mettre sur les fonts baptismaux l’Association ?
Malheureusement, on pense quand on est vivant que le malheur n’arrive qu’aux autres. Mais quand vous vous rendez compte que cela peut vous arriver et que les autres c’est aussi vous, cela crée un déclic. Vaut mieux tard que jamais. Mettons-nous ensemble pour lutter contre les mauvaises pratiques sur les routes. Si mensuellement ou trimestriellement, les membres de l’Association pouvaient être invités sur des plateaux de radios, de télévisions pour des émissions, dans les colonnes des journaux pour expliquer la nécessité de préserver les vies, on aura rendu un grand service à la Nation.
Un mot pour conclure?
Nous pouvons déjà tout faire pour que le Code de la route soit moins cher et disponible partout. Aujourd’hui, il coûte 10.000 FCfa. Il faut le chercher pour le trouver. On peut rendre le livre obligatoire à bord des véhicules pour que le conducteur révise les notions notamment les panneaux de circulation tous les jours. Modestement, mon bureau et moi, nous allons veiller à corriger tout ce qui a été dit plus haut pour moins endeuiller les familles. Pour l’instant, le retour que nous avons est encourageant. Nous allons persévérer.
Je renouvelle mes condoléances et ma compassion à tous les parents de victimes dont moi-même.
Propos recueillis par Serge Adanlao