Le pasteur Michel Alokpo est accusé par le président national des cultes endogènes, Dah Adoko Gbèdiga, avant d’avoir fomenté un coup contre les religions endogènes en vue de les empêcher de prendre la présidence du Cadre de concertation des confessions religieuses (Cccr) à l’Assemblée générale du 24 septembre 2022. Dans cette interview, le secrétaire général du Cadre fait la genèse du creuset, lève le voile sur l’organisation des travaux et explique pourquoi une fixation est faite sur sa personne. Selon Michel Alokpo, Dah Gbèdiga et les siens « font de la manipulation et de l’intoxication ».
Le Matinal : Que comprendre par Cadre de concertation des confessions religieuses (Cccr).
Pasteur Michel Alokpo: Le Cadre de concertation des confessions religieuses a été créé en 2010. Nous disposons de notre récépissé. Le Cadre regroupe les trois grandes confessions religieuses du Bénin à savoir le christianisme avec plusieurs entités, les religions endogènes avec leurs associations et la communauté musulmane. Au départ, nous avons les statuts et le règlement intérieur. Le premier président qui a été coopté, c’est le pasteur méthodiste Cossi Simon Dossou. Il a passé le pouvoir à l’imam Sanni de Natitingou, qui a fait juste un an et est décédé après avoir été coopté. A sa suite, c’est un autre méthodiste qui est arrivé qui a fait deux mandats. Il y a eu l’actuel président de l’Eglise méthodiste qui n’a pas fait long feu. C’est alors que nous avons convoqué une Assemblée générale à la salle de conférence du médiateur de la République le 30 janvier 2021 où, nous avons soumis à l’Assemblée générale, une liste de propositions des gens qui vont être élus ou cooptés au sein de ce Cadre. Malheureusement, il y a eu l’intervention des fauteurs de trouble. Mais, il faut vous dire qu’au cours de cette Assemblée générale du 30 janvier 2021, nous avons mis en place un comité transitoire présidé par l’Imam de Porto-Novo Mohamed Assifatou et nous avons dit que ce comité transitoire doit travailler à nettoyer les textes pour qu’on puisse respecter les lois de la République, parce qu’ils sont plusieurs structures faitières. Les nouveaux textes exigent que nous puissions aller aux élections. Or, dans les anciens textes, le mode d’élection n’était pas prévu. Il va falloir que nous puissions les corriger. C’est ce que nous avons fait avec un comité technique qui a travaillé sur les textes et nous avons soumis ces textes au Conseil d’administration qui est le poumon de notre association. Nous avons corrigé ensemble les propositions faites par le comité technique qui ont été validées. C’est des textes validés que nous avons amené à l’Assemblée générale du 24 septembre 2022. Le toilettage nous a pris plus de 2heures d’horloge. Les endogènes et les musulmans sont ceux qui sont intervenus pour apporter d’autres modifications aux textes qui ont été soumis au vote. C’est à l’unanimité que lesdits textes ont été votés.
Comment se sont déroulés les travaux de l’Assemblée générale du 24 septembre 2022 ?
Très bien. Les travaux ont été supervisés par un présidium présidé par le père Benoît Dansou. Le rapporteur, Barthélémy Babalao, est un dignitaire des religions endogènes. Il n’a pas suivi son groupe quand certains ont claqué la porte.
Après les différentes formalités, le présidium a commencé par enregistrer les candidatures. C’est ainsi qu’il a été demandé aux confessions religieuses qui prétendent au poste de président du Cadre de concertation des confessions religieuses d’annoncer leurs candidats conformément aux nouveaux textes. A ce titre, Dah Gbèdiga, a été proposé à l’unanimité. La communauté musulmane pour sa part, a proposé l’imam Mohamed Assifatou. Les chrétiens ont été mis de côté parce qu’ils ont déjà eu trois mandats successifs. Ils ont fait la concession. Nous sommes passés au vote. A l’issue du scrutin, Dah Gbèdiga a eu 4 voix contre 9 pour l’imam Mohamed Assifatou. Il faut souligner qu’il y a un noyau du groupe des cadres endogènes qui n’a pas voté pour Dah Gbèdiga. C’est le groupe dont est issu le rapporteur général. Ils ont voté pour l’imam. Je précise que les communautés endogènes sont plus de 6 structures au Bénin. Les textes ont prévu que pour être candidats, il faut que les structures donnent mandat à quelqu’un d’entre les différentes associations pour postuler au poste de président. Les trois structures ont donné leur accord pour que Dah Gbèdiga soit candidat. Mais, à la fin ce n’est que deux structures qui ont voté pour lui. Ils font de la manipulation et de l’intoxication.
Vous, pasteur Michel Alokpo, vous êtes pointé du doigt par Dah Adoko Gbèdiga, pour avoir été l’artificier de l’ombre de sa non-élection et de la non-observation du tour des religions endogènes. Pourquoi une fixation sur votre personne ?
Il m’a fait des propositions pour que je travaille mes collègues pour qu’on lui donne le poste de président. Il attendait être élu contre vents et marrées et cela n’a pas marché. Il trouve que c’est moi qui suis à l’origine de sa non-élection au poste de président. Même si on reprend les élections demain, qui va voter pour lui ? Nous avons continué les élections et nous avons élu les autres membres du Cadre de concertation des confessions religieuses sans eux parce que quand ils sont sortis de la salle, ils ont fait une conférence en disant qu’ils démissionnent du Cadre de concertation des confessions religieuses. S’ils démissionnent du Cadre de concertation pourquoi il s’en va encore m’attaquer ? Moi, je ne suis pas responsable de ses comportements. Je prends toute la population et le groupe des religions endogènes à témoin que moi je n’ai pas joué un rôle pour qu’il ne soit pas président. C’est son comportement qui l’a induit en erreur et c’est ce qui se passe aujourd’hui. Il m’attaque. Je peux intenter un procès contre lui pour dénonciations calomnieuses. Mais comme nous sommes une structure de paix, je ne vais pas aller dans ce sens. Il veut ce poste coûte que coûte. Je peux donner un témoin qui est venu avec lui chez moi pour me convaincre de travailler pour qu’il soit élu. Il s’agit de Monsieur Abou Yèkini qui est le président du Cadre de concertation de la société civile.
Au vu de la contestation de ce groupe des religions endogènes, est-ce que vous pensez que le Conseil d’administration mis en place a été mal élu ?
Pour la mise en place de ce Conseil d’administration, nous avons respecté les nouveaux textes qui ont été votés à l’unanimité par tous les délégués et nous avons respecté la ligne. Ce que prévoient les textes, c’est d’aller aux élections et de ne plus fait de cooptation d’un président. C’est ce qu’on a fait. Mais, nous avons corrigé cette insuffisance pour permettre aux musulmans et au groupe des religions endogènes de briguer le poste de président.
C’est à ce niveau que vous ne vous entendez pas parce que visiblement, vous ne vous étiez pas compris avant.
Non ! C’est un système d’accord invoqué par les textes avant qu’on aille aux élections. Puisqu’on a demandé au groupe des religions endogènes qui est leur candidat et ils ont dit à haute et intelligible voix que c’est Dah Gbèdiga, et aux musulmans la même chose, et qu’ils ont dit que c’est l’imam Assifatou Mohamed, il ne devrait plus avoir de débat. On a mis les deux candidats en compétition, l’un a gagné et l’autre a perdu. Aujourd’hui, ils clament que c’est leur tour. Je ne comprends pas. Il veut être nécessairement président du Cadre de concertation. Il faut qu’il revoie sa position. Son comportement n’est pas digne d’un religieux.
Le chef de l’Etat a été saisi pour démêler l’écheveau. Est-ce que vous envisagez des actions pour les faire ramener dans le Cadre de concertation?
Oui, la porte est toujours ouverte pour Dah Gbèdiga et son équipe. Mais, s’il revient, il devient un simple membre, parce que tous les postes ont été pourvus. Est-ce qu’il acceptera d’être un simple membre au sein du Cadre de concertation où il veut nécessairement être le président ? Cette dernière possibilité est exclue puisque nous avons mis en place le Conseil, les nouveaux statuts, le règlement intérieur et la liste des membres qui ont élus démocratiquement a été remise au ministre de l’Intérieur pour validation. Je ne pense pas que le président de la République peut se mêler à ce débat de personnes. Le chef de l’Etat est très avisé. Il est un homme de paix qui connait sa droite et sa gauche. Je pense que Dah Gbèdiga et son groupe vont se ridiculiser, parce qu’ils pensent qu’ils ont des entrées auprès du chef de l’Etat. Nous sommes une association apolitique. Je pense que nous sommes ouverts à moins qu’il change de fusil d’épaule, qu’il revienne confesser ses erreurs et que nous puissions le rétablir pas en tant que président ni vice-président mais en tant que membre, puise qu’ils ont déjà fait une déclaration pour dire qu’ils ont démissionné. Il faut qu’ils fassent une autre déclaration pour dire qu’ils n’ont pas démissionné. A la prochaine rencontre du Conseil d’administration, nous allons prendre acte de cette démission en attendant qu’ils envoient une lettre écrite pour confirmer la démission. Le peuple béninois a suivi. Beaucoup de médias étaient de la partie et ont relayé. Donc, ce que je dis, c’est devant toute la presse que tout cela s’est déroulé et la presse est restée jusqu’à la fin.
La loi sur la chefferie traditionnelle envisagée par le gouvernement serait-elle à la base de la discorde ou de cette mal compréhension observée entre ce groupuscule des religions endogènes et le Cadre de concertation ?
Je pense qu’on peut faire la différence entre la loi qui est en vue pour réglementer l’existence de la chefferie traditionnelle. La communauté endogène n’est pas assise au sein de la chefferie traditionnelle. C’est un groupe à part. Quand nous sommes allés à une rencontre de la société civile, on a regroupé les différentes catégories de la société civile, il y a les religions à part, il y a la chefferie traditionnelle à part. Au sein de la chefferie traditionnelle, ils ont plusieurs groupes aussi, c’est cela que le chef de l’Etat veut réglementer.
Donc la chefferie traditionnelle n’est pas membre du Cadre de concertation ?
Nous avons travaillé ensemble dans le passé, mais ils ne sont pas membres du Cadre de concertation. Maintenant, la loi sur la chefferie traditionnelle, n’a rien à avoir avec le Cadre de concertation. Notre objectif est précis, c’est de travailler pour la paix au Bénin. Si nous voulons travailler pour la paix au Bénin, on a dit que le président du cadre doit être un homme de paix.
Propos recueillis par Serge Adanlao.