En prélude aux échéances électorales qui s’annoncent, le Médiateur de la République, l’institution qui prône la paix et le dialogue social, se déploie sur le terrain pour semer les germes de la paix et de coexistence pacifique au sein des communautés jadis en proie aux violences électorales en 2019, 2020, et 2021. Depuis Savè, les chefs traditionnels et les autorités religieuses acquis à la cause ont lancé, le 09 novembre 2022, un vibrant appel aux autres communautés du Bénin sur la nécessité de préserver la paix, gage de tout développement.
«Les élections donnent inévitablement lieu à des passions» , déclarait Pascal Essou, le Médiateur de la République à l’occasion de l’appel de Savè pour dire que la période électorale, quel qu’en soit l’enjeu, est toujours sensible. Amadou Diongue, le Représentant résident de la Cédéao au Bénin, abonde dans le même sens et se veut plus explicite. «Les femmes et les hommes d’une société vivront toujours dans des conflits». Autrement, le conflit est inhérent à l’existence humaine. Mais le mérite d’une société, c’est de trouver dans son ressort la capacité à régler de manière pacifique les conflits, parce que nous vivons avec des différences. C’est dans ce sens que s’inscrit la démarche pacifiste du médiateur dont le but est de transformer ces passions afin qu’elles deviennent des défis en matière de sécurité et de développement. Le représentant résident de la Cédéao estime que c’est pour conjurer les démons de la violence, de la destruction et de la discorde que le médiateur a initié la rencontre de Savè qui a mobilisé les chefs traditionnels, les autorités religieuses et les Ongs. «C’est un symbole fort que nous saluons », a laissé entendre Amadou Diongue. Loin d’être une activité de plus, la rencontre de Savè vient renforcer les efforts consentis jusque-là par les institutions de la République, les organisations nationales et internationales et leurs partenaires pour restaurer durablement la paix. «Je suis convaincu qu’elle apportera un plus dans le processus de décrispation de l’atmosphère», se réjouit le représentant résident de la Cédéao au Bénin. Des initiatives, il y en a eues. Qu’il vous souvienne qu’en 2019, 2020 et 2021, les élections ont été émaillées des scènes de violences, de vandalisme et de tuerie dans certaines localités au point de créer une atmosphère délétère, défavorable au dialogue entre les frères d’une même famille, d’une même communauté et d’une même obédience politique. Ce qui a occasionné des interpellations dans le rang des présumés auteurs de ces troubles. Consciente de l’importance de la paix dans le processus du développement, le Gouvernement a mené des actions fortes pour rétablir les mesures de confiance et la stabilité nationale. Dans cette même dynamique, Saliou Odoubou, le préfet des Collines, a initié des rencontres d’échanges avec la classe politique et la société civile des Communes de Bantê, de Savè et de Ouèssè, où les troubles ont été les plus remarquées. Les multiples campagnes de sensibilisation ont permis de faire prendre conscience aux populations des effets néfastes des violences électorales. Ainsi, elles ont pris l’engagement d’enterrer définitivement la hache de guerre. Nonobstant ces actions, il se pourrait qu’il subsiste encore de façon isolée quelques foyers de tensions qu’il faut nécessairement éteindre. Raison pour laquelle le médiateur insiste sur la culture de la paix.
Que retenir de cette paix et quelle est son utilité ?
Le maire de Savè, Denis Oba Chabi, a entretenu l’assistance sur la notion de la paix parce qu’elle n’a pas de prix. Selon lui, la paix est un état de calme où de tranquillité comme une absence de perturbations, d’agitations ou de conflit. Elle correspond aussi à un idéal social et politique. Sociologiquement, la paix désigne l’entente amicale de tous les individus qui composent une société. Quant à la paix intérieure, elle peut se définir comme un état et une dynamique visant des relations harmonieuses pour bien vivre ensemble. La paix interdépendante est plus qu’un état. C’est une double dynamique qui vise la résolution constructive des conflits et le tissage de relations harmonieuses dans la durée par les parties concernées. Au regard de tout ceci, on peut conclure allègrement que la paix n’est pas seulement et simplement l’absence de conflits. Mais elle est un processus positif, dynamique, participatif, qui favorise le dialogue et le règlement des conflits dans un esprit de compréhension mutuelle et de coopération. Ainsi, la paix dans les circonstances si après, n’est admise dans notre société. La paix à n’importe quel prix n’est plus la paix. Si tu veux la paix, fait le mort. Qui vit en paix avec lui-même, vit en paix avec l’univers. Il faut à tout prix préserver la paix chèrement acquise, parce que les conséquences des conflits sont vastes et dévastatrices. Aider les gens à se confronter, à s’attaquer à la cause première et aux facteurs de conflits même à leurs lourdes conséquences, exigent un travail de concertation à moyen voire long termes. Pour sauver ce précieux outil qu’est le ciment de la communauté, il faut inévitablement éduquer à la prévention des conflits, élaborer une culture de la tolérance et de la négociation pour gérer des conflits. Établir des concertations multilatérales pour préserver la paix, favoriser le rapprochement entre toutes les sensibilités. La paix, la sécurité, un avenir, tels sont les besoins fondamentaux que les gens en proie aux conflits violents désignent et recherchent à tout prix. Or, s’efforcer de rétablir la confiance, les moyens de subsistance, les institutions et les relations est un travail complexe. Voilà en quoi consiste la mission même de la consolidation de la paix, nous ne pouvons pas l’amener. Je vous convie à être les meilleurs ambassadeurs de paix du Médiateur de la République auprès de nos communautés, et ce, dans toutes les contrées de nos localités respectives. Pour ma part, je voudrais au nom de mes collègues maires des Communes, prendre l’engagement formel, indéfectible et sans condition de poursuivre cette œuvre de pacification dans nos Communes et au-delà de limites de nos territoires de compétences pour faciliter l’accomplissement des nombreux chantiers de développement ouverts par le président de la République et pour le bonheur du Bénin. A sa suite, le médiateur de la République, Pascal Essou, a exhorté toutes les couches de la société à se mobiliser non seulement pour des élections pacifiques, mais aussi pour faire face aux défis sécuritaires émergents dans notre pays. « L’objectif zéro violence avant, pendant et après les élections nous interpelle tous », martèle-t-il. Pour Amadou Diongue, les élections doivent être des moments de réjouissances populaires. « L’élection, quel qu’en soit l’enjeu, est de mon avis une fête de la démocratie représentative que nous avons choisie comme mode de gouvernement », souligne-t-il.
L’appel de Savè et ses recommandations
Les travaux en atelier et en plénière ont permis aux participants de faire le point de la situation de paix par Commune et de proposer des stratégies visant à la renforcer. Tour à tour, les têtes couronnées, représentant de chaque Commune des Collines, ont reconnu les inconvénients de la violence, et les avancées obtenues. Pour que cette paix soit véritablement acquise, ils souhaitent que le reste des personnes gardées dans le cadre des violences électorales soient libérées. De même que les corps des victimes des élections. Ils ont également suggéré que cette séance soit organisée en faveur des partis politiques qui manipulent souvent les jeunes sur le terrain. Faire des prières et libations pour implorer Dieu et les mânes des ancêtres puis, mettre à contribution les imams, les pasteurs et les prêtres afin qu’ils puissent sensibiliser leurs fidèles sur la nécessité de préserver la paix. Dans une déclaration lue par sa Majesté Adé Fouloutou Laourou, chef traditionnel de Bantê, les autorités traditionnelles et religieuses conviées à la séance ont déploré dont les élections de 2019, 2020 et de 2021 étaient émaillé. Ainsi, ils ont pris la résolution ferme d’œuvrer pour que la paix, l’unité et la concorde règnent dans leurs localités respectives. «Nous, têtes couronnées, chefs traditionnels, autorités religieuses, notables du département des Collines, réunis sur la terre historique de Savè, autour du Médiateur de la République, avec l’accompagnement de la Cédéao, déclarons que plus jamais, notre département ne sera associé à des violences électorales », ont-ils promis. Ils ont aussi rappelé aux acteurs politiques que leur activité consiste à s’engager positivement, malgré la diversité d’opinion, au service de la République, une et indivisible. Quant aux jeunes, ils les ont invités à plus de responsabilité, de sagesse et de patriotisme. «C’est notre façon à nous d’affirmer notre détermination à jouer, comme l’exige de nous le préambule de notre constitution, notre rôle de pionniers de la démocratie et de la défense des droits de l’homme », ont-ils conclu. Amadou Diongue, ne doute pas de la capacité de ces chefs traditionnels à contribuer à l’enracinement de la paix. « En œuvrant quotidiennement à la consolidation et à la préservation de cette paix, à la résolution des conflits par des voies de dialogue, des voies autorisées en lesquelles on a confiance, celles de nos rois, de nos chefs traditionnels et religieux, nous sommes alors certains que nous allons traverser ces moments de turbulences électorales. Alors, agissons tous pour la paix », clame le représentant résident de la Cédéao.
Zéphirin Toasségnitché (Br Zou-Collines)