La justice, lorsqu’elle est rendue avec un cœur de pierre, peut perdre son âme et son sens. Conscient de cette réalité, et persuadé que derrière chaque décision de justice se cachent des histoires humaines faites d’erreurs et de pardon, le président Patrice Talon a opéré des réformes audacieuses au niveau du secteur judiciaire. Ce qui permet de dissiper tout doute sur les convictions et les pratiques judiciaires, où la frontière entre l’humanité et l’animalité est devenue de plus en plus claire et la justice est plus que jamais implacable dans ses décisions.
Pour peu que nous fassions attention, on peut constater que depuis l’arrivée de président Patrice Talon au pouvoir, le secteur de la justice fait partie des secteurs ayant connus de grandes mutations sous son magistère. Chaque pas posé a été celui de redorer le blason de la justice. C’est dire qu’il a compris que la justice pour être respectée, doit être rendue avec sagesse et humanité. Nous n’en voudrions pour preuve que dans plusieurs dossiers impliquant des acteurs politiques, de hautes personnalités du pays et bien d’autres, la justice s’est montrée impartiale et juste, même dans ses punitions. Pour parvenir au renforcement de cette pratique, il faut selon le garde des Sceaux, ministre de la justice et de la législation, un ambitieux programme de modernisation de la justice. « Ce projet est conçu pour fournir au système judiciaire, la formation et la professionnalisation dont il a tant besoin. Il permettra également d’améliorer l’administration générale des tribunaux, leur fonctionnement et la digitalisation de la gestion des affaires », a-t-il martelé. « L’urgent, est de faire en sorte que nous ayons au niveau de la justice à la fois de la célérité, de la qualité mais également de l’historique ; de permettre de conserver des documents et enfin d’avoir la sécurité dans les actes produits », a laissé entendre le garde des sceaux Yvon Détchénou lors d’une de ses interventions médiatiques.
Priorités
Les réformes au niveau du secteur judicaire sont menées dans un contexte où l’accès à la justice reste un défi au Bénin, notamment pour les populations les plus pauvres et les plus éloignées des zones urbaines. Les efforts de modernisation visent à garantir une justice plus équitable, plus efficace et plus accessible pour tous. Il s’agit entre autres d’améliorer l’efficacité et la rapidité des procédures judiciaires, de rendre la justice plus accessible aux citoyens, notamment aux plus vulnérables, de moderniser les infrastructures et les équipements des juridictions, de former et professionnaliser les professionnels de la justice, de renforcer la lutte contre la corruption et l’inefficacité au sein du système judiciaire et d’adapter la justice aux réalités locales et aux besoins des citoyens.
Réduire les tracasseries et renforcer l’efficacité
Dans son intervention le jeudi 13 février 2025 sur la télévision nationale lors de cet exercice de reddition de comptes, Yvon Détchénou ministre de la Justice et de la Législation a indiqué que depuis 2016, les réformes mises en place ont permis d’améliorer l’accessibilité des services judiciaires et de la couverture judiciaire du territoire. En huit ans, le gouvernement de la rupture a créé et mis en service sept (7) juridictions, dont trois spécialisées. L’exécutif a aussi construit 13 bureaux d’orientation des usagers et trois (03) centres de sauvegarde de l’enfance et de l’Adolescence respectivement à Agblangandan, Aplahoué et Parakou. Avant 2016, apprend le garde des sceaux, il existait quatorze (14) tribunaux et trois (03) cours d’appel. Plus grave, aucune de ces juridictions ne disposait d’un service d’orientation des usagers.
Les lieux d’implantation de ces juridictions rendaient leur accès difficile pour les Béninois vivants dans des villages éloignés ou des villes mal desservies par le réseau routier. En dépit de cela, les populations devraient se déplacer pour assister aux audiences et soumettre des documents tels que les casiers judiciaires, les légalisations, les certificats de nationalité et les jugements supplétifs. En cas d’absence, le traitement de leurs dossiers et demandes est retardé, rappelle Yvon Détchénou. Aujourd’hui, la donne a changé. L’amélioration de la couverture judiciaire du territoire a permis de rapprocher les infrastructures judiciaires des populations et d’améliorer la disponibilité du service public de la justice, d’après le garde des sceaux.
Plusieurs juridictions spécialisées, la Criet
Pour plus d’efficacité et moins de tracasseries pour les populations, le gouvernement a aussi opté pour des juridictions spécialisées. Ces juridictions traitent exclusivement des procédures spécifiques, telles que les affaires commerciales, criminelles, foncières qui requièrent un meilleur rendement de la justice compte tenu des impératifs de développement de notre pays, a expliqué le ministre Détchénou. Parmi les instances judiciaires spécialisées figurent la Cour spéciale des affaires foncières et la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet). La seconde, rappelle Yvon Détchénou, s’occupe de la criminalité économique, du terrorisme et des infractions sexuelles. De 2018 à mars 2022, elle a enregistré 4540 dossiers. Ces chiffres prouvent que le besoin était là, soutient le ministre.
Renforcement de la ressource humaine
Les ressources humaines sont essentielles pour réussir une mission. C’est conscient de cela que le gouvernement a renforcé l’effectif des agents des instances judiciaires. Le gouvernement a alors procédé au recrutement de nouveaux magistrats, greffiers et personnels des services judiciaires. La transparence est de mise lors des concours de recrutement, permettant ainsi aux meilleurs candidats de réussir, assure le garde des sceaux. Avant 2016, le Bénin comptait 212 magistrats et 174 greffiers. Aujourd’hui, révèle Yvon Détchénou, le nombre de magistrats et de greffiers est de 636, soit environ le double de l’effectif avant 2016.
En détail, le Bénin compte aujourd’hui, grâce au recrutement actif, 336 magistrats et 220 greffiers. 80 magistrats sont en formation à l’École de formation des professions judiciaires, et 100 greffiers sont en cours de recrutement. L’amélioration de la couverture judiciaire sur le territoire national, la création de juridictions spécialisées et l’augmentation de l’effectif des magistrats et greffiers ont permis de noter une amélioration de la productivité judiciaire.
Productivité améliorée
D’après le ministre de la Justice et de la législation, les différentes actions entreprises par l’exécutif ont impacté positivement le nombre de dossiers vidés et le délai de traitement des procédures. En 2015, le taux de dossiers vidés était de 43,67%. Six ans plus tard, ce taux est passé à 48,08% et a atteint 71,16% en 2022, a exposé le ministre Détchénou. En 2016, poursuit-il, six sessions criminelles étaient organisées dans les trois Cours d’Appel, avec une durée moyenne de détention provisoire de 30 mois et des procédures d’instruction de 57,63 mois. Depuis la réforme de 2018, renchérit le garde des sceaux, au moins 36 sessions criminelles et six sessions pour enfants sont tenues chaque année. La durée de détention provisoire a chuté à 19,15 mois en 2019. Pour Yvon Détchénou, c’est une avancée significative. Il reconnait tout de même qu’il reste des efforts à fournir pour atteindre les standards requis.
Huissier de justice, un métier en mutation
Cette année 2025, la Journée mondiale des huissiers de justice est placée sous le thème : « L’intelligence artificielle au service de l’huissier de justice, tiers de confiance. » Une thématique qui reflète les préoccupations croissantes autour de l’évolution du droit à l’ère du numérique. Me Maxime René Assogba a souligné les défis posés par la mondialisation, la numérisation de la justice, l’évolution des droits humains et les attentes de transparence et d’efficacité exprimées par les citoyens. « Tout cela nous interpelle et nous oblige à nous réinventer sans trahir l’essence de notre mission », a-t-il déclaré, insistant sur la nécessité d’adapter la profession aux réalités d’un monde en perpétuelle transformation. Car derrière la technicité du métier, c’est bien la protection des droits, l’accès équitable à la justice et le respect de la légalité qui sont en jeu.
Souvent méconnu du grand public, le rôle de l’huissier de justice n’en demeure pas moins essentiel au bon fonctionnement de l’État de droit. Exécuteur des décisions judiciaires, garant des constats légaux et acteur de proximité entre le justiciable et la justice, l’huissier joue un rôle d’interface et d’équilibre. « Nous sommes les artisans du droit concret, celui qui prend corps dans la vie quotidienne des citoyens. Sans notre intervention, la justice resterait souvent lettre morte », a rappelé le président de la Chambre nationale. Ce rôle a d’ailleurs été revalorisé selon ses dires, lors du 25ème congrès de l’Uihj tenu en mai dernier à Rio de Janeiro, où le président de l’Union, Marc Schmitz, affirmait : « La mission sociale de l’huissier de justice consiste à garantir l’État de droit, à faciliter l’accès à la justice, à protéger les droits de toutes les parties impliquées, tout en gérant les situations avec professionnalisme et empathie. » Dans ce contexte, la formation continue s’impose comme une exigence incontournable. Le thème choisi pour cette session, axé sur l’utilisation des technologies dans les constats, est en cohérence avec celui de la journée mondiale. Pour Me Assogba, cette orientation technique est aussi une manière de renforcer la crédibilité et la légitimité de la profession : « Ce n’est pas un simple rendez-vous technique, c’est une preuve de notre volonté de servir avec compétence et intégrité. Formons-nous, informons-nous, adaptons-nous, mais surtout, continuons à faire respecter le droit avec humanité, fermeté et éthique ».
Digitalisation
Une plateforme numérique vient d’être mise en place pour faciliter l’accès des services judiciaires aux populations. Il s’agit ‘’Justice.bj’’ disponible sur les plateformes iOS et Android. A travers la plateforme ‘’Justice.bj’’, le citoyen béninois peut désormais s’offrir les services de justice en ligne. En procédant à son lancement, les autorités entendent simplifier les démarches administratives et juridiques, tout en renforçant l’information du public sur le droit en vigueur au Bénin. Cette nouvelle plateforme est dédiée à un large public, incluant les citoyens, les juristes, les étudiants en droit et les professionnels du secteur judiciaire. Elle intègre plusieurs fonctionnalités dont une base de données qui regroupe des lois, des codes, des décrets et procédures, un annuaire des juridictions, ainsi que des informations pratiques sur les démarches judiciaires. ‘’Justice.bj’’ permet également de vérifier l’authenticité de documents administratifs grâce à un système de code QR. C’est un outil qui propose un contenu pédagogique sous forme d’articles explicatifs, destinés à rendre le langage juridique plus accessible.
Sergino Lokossou

