Avec une proportion infantile d’environ 54% selon le quatrième recensement général de la population de l’habitat (Rgph4), le Bénin accorde un intérêt particulier à la protection de l’enfant. Cet intérêt pour la couche infantile réside dans le fait que l’enfant d’aujourd’hui est l’adulte de demain. En tant qu’être porteur de l’espoir du développement, la protection de l’enfant est consacrée dans le Pag et les politiques publiques.
Au Bénin, plusieurs enfants sont exposés à la violence et l’exploitation parce que leurs parents doivent les abandonner par nécessité. Il est d’usage que les familles très pauvres confient leurs enfants à des proches ou à des familles d’accueil pour qu’ils puissent y suivre l’école. En contrepartie, les enfants, appelés «vidomègon», aident au ménage ou aux champs. Une pratique qui s’est transformée en modèle commercial au nez et à la barbe des autorités : des recruteurs parcourent les villages à la recherche de main-d’œuvre bon marché. Ils promettent aux parents un meilleur avenir pour leurs enfants en ville ou dans un pays voisin. Selon plusieurs études et littérature sur le phénomène, ces enfants sont forcés à travailler, maltraités, battus et parfois exploités sexuellement. Ils n’ont pas le droit de garder le contact avec leur famille et n’osent pas parler de ce qu’ils vivent. Il n’existe pas de chiffres représentatifs actuels, car de nombreux cas ne sont pas signalés. L’Unicef indique un chiffre de 40.000 enfants et adolescent(es) victimes de la traite des enfants dans le pays rien que pour l’année 2007. Le problème semble s’être aggravé depuis. Selon le tableau de bord social 2021, un nombre important d’enfants victimes de traite, des enfants en situation de travail et ceux en mobilité ont été reçus et pris en charge par les structures de protection de l’enfant. Au total 799 enfants dont 430 filles ont été victimes de traite au cours de l’année 2021. De cet effectif, 732 ont été réintégrés, soit 91,61%. Comparé à l’année 2020, on note que ce phénomène s’est accru, passant de 659 à 799, soit une hausse de 140 cas qui pourrait se justifier par une systématisation du renseignement de la base et le renforcement de la synergie d’actions entre les acteurs de collecte. Par ailleurs, 354 enfants ont été victimes de traite nationale contre 342 enregistrés en 2020, soit une augmentation de 12 enfants. Il en est de même pour les enfants victimes de traite transfrontalière qui sont passés de 215 cas en 2020 à 238 cas en 2021, soit une hausse de 23 cas. Le phénomène de traite des enfants est accentué dans les départements de l’Atacora, du Zou, du Borgou, de l’Alibori et de la Donga qui à eux seuls totalisent près des trois quart (73,84%) de l’effectif total. L’ampleur du phénomène dans ces départements pourrait s’expliquer par la forte demande de main-d’œuvre infantile pour les travaux champêtres sur les sites d’exploitation d’or et les carrières. En 2021, le nombre total d’enfants en situation de travail recensés par les Cps, l’inspection du travail, les structures d’accueil, les Ong et les structures partenaires, s’élève à 827 contre 882 en 2020 ; soit une diminution de 55 cas (baisse de 6,23%). Par contre, le nombre d’enfants exposés aux pires formes de travail identifiés a augmenté, passant de 506 en 2020 à 578 en 2021. On note une baisse significative du nombre d’enfants retirés (279 contre 431 en 2020).
Interdire l’exploitation des enfants
Les domaines de la protection de l’enfance en général et de la lutte contre les pires formes de travail des enfants en particulier ont été fortement impactés par la série des reformes initiées par le gouvernement dans tous les secteurs depuis 2016, avec comme conséquence, une amélioration substantielle de la situation des droits et du bien-être des enfants.
Selon les résultats de l’enquête Mics réalisée par l’Instad, le taux de prévalence nationale en matière de travail des enfants est passé de 52,5% en 2014 à 19,9% en 2022 ce qui correspond à un gain franc de plus de 32 points. Malgré cette avancée notable, l’ambition du gouvernement d’atteindre les cibles du point 7 de l’Objectif de développement durable (Odd) 8 sur le travail décent, est loin d’être réalisée. Il urge de « prendre des mesures immédiates pour supprimer le travail forcé, mettre fin à l’esclavage moderne et à la traite des êtres humains, interdire et éliminer les pires formes de travail des enfants, y compris le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats et, d’ici à 2025, mettre fin au travail des enfants sous toutes ses formes ». Malgré la législation en vigueur au Bénin interdisant toute forme d’exploitation ou de maltraitance des enfants, des enfants se retrouvent dans les marchés, les rues, les centres d’apprentissage, les carrières de mines et les chantiers ou même dans des maisons où ils sont soumis à la mendicité, à des travaux épuisants ou dangereux. C’est donc face à ces tristes constats que la campagne « Tolérance zéro au travail des enfants dans les secteurs à forte prévalence au Bénin » a été initiée conjointement par le ministère du travail et de la fonction publique et le ministère des Affaires sociales et de la microfinance, dans le cadre d’un plan d’urgence. Les objectifs poursuivis sont de mobiliser les acteurs de protection de l’enfant, les usagers des marchés, les artisans, les communautés et les enfants eux-mêmes dans la lutte contre le travail des enfants ; de mener des visites conjointes d’inspection et de contrôle dans les marchés, les carrefours et autres points de vente ; d’identifier et retirer les enfants victimes d’exploitation économiques et de maltraitance, y compris ceux impliqués dans la mendicité ; poursuivre la prise en charge et la réinsertion des enfants en situation de travail et de mendicité ; engager des actions à l’encontre des auteurs et complices d’exploitation économiques des enfants ; enfin, capitaliser les bonnes pratiques en matière de lutte contre l’exploitation économique des enfants. « Nous devons agir et le plus rapidement possible pour contrer les actes constituants des violations des droits des enfants et qui ternissent l’image de notre pays. Le travail des enfants met à mal et ne favorise pas la perception des diverses réformes entreprises par le gouvernement pour la protection et la promotion des droits des enfants »,a indiqué le ministre Véronique Tognifodé au lancement de la campagne tolérance zéro contre la traite des enfants.
Le projet Luxembourg pour impacter 75 mille enfants et adolescents
Le projet Luxembourg « soutien au gouvernement du Bénin pour la réalisation des droits des enfants à risque ou affectés par la traite, le travail des enfants et ses pires formes » dans les départements du Zou et du Couffo est un projet lancé le 14 novembre 2024 à Djakotomey par le ministre du travail et de la fonction publique Adidjatou Mathys qui avait à ses côtés, le Chargé d’affaires en pied de l’Ambassade du Luxembourg et le Représentant résident de l’Unicef au Bénin. Le projet Luxembourg se veut une réponse appropriée aux pires formes de travail des enfants dans les départements du Zou et du Couffo où les taux de prévalence, selon la source Mics 2022, sont respectivement de 17,2 % dans le Zou et 41,2 % dans le Couffo. Ce projet de plus d’un milliard de francs Cfa dure trois ans et vise à soutenir l’accélération de la mise en œuvre des recommandations internationales en vue de l’éradication effective de la traite des enfants, du travail des enfants et de ses pires formes. Il s’agira de façon spécifique, de lutter contre la traite d’enfants à des fins de travail forcé ; de mettre en œuvre les dispositions du code du travail relatives à la traite, au travail des enfants et à ses pires formes ; de renforcer les mécanismes communautaires de prévention et de lutte contre l’exploitation économique des enfants et d’enquêter sur ces pratiques préjudiciables et poursuivre les responsables.
À terme, le projet Luxembourg va directement impacter 75 mille enfants et adolescents âgés de 15 à 19 ans dont 60% de filles. À l’occasion, le projet a été présenté aux acteurs de protection et aux têtes couronnées. Ensuite, il y a eu la mise sur pied d’un comité de pilotage pour le suivi et la coordination de la mise en œuvre des interventions. Les partenaires saluent les efforts du gouvernement dans la lutte contre le travail des enfants et réitèrent leur détermination à mener le combat aux côtés du Bénin. Le gouvernement du Bénin jouera sa partition dans le nouveau projet tant au niveau central qu’au niveau déconcentré afin que les fruits tiennent la promesse des fleurs.
Agenda 2040 pour les enfants d’Afrique
L’aspiration 7 de cet agenda stipule que chaque enfant est protégé contre la violence, l’exploitation, la maltraitance et les abus. La violence envers les enfants peut prendre plusieurs formes. Elle peut se produire dans la sphère privée, à l’école, au sein des communautés ou au domicile. Elle peut prendre la forme de châtiments corporels se produisant dans différents milieux, tant publics que privés; travail forcé et pratiques de travail nuisibles; la traite à des fins de travail forcé ; pratiques traditionnelles de mutilation génitale féminine; mariage d’enfants; tests de virginité; le repassage des seins; les tueries d’enfants dits sorciers ; violence sexuelle; exploitation sexuelle, pornographie et trafic sexuel. Il existe des preuves significatives que la violence, l’exploitation et l’abus peuvent affecter la santé physique et mentale de l’enfant à court et à long terme, nuisant à leur capacité d’apprentissage et de socialisation, et impactant leur transition vers l’âge adulte avec des conséquences négatives plus tard dans la vie. La Charte africaine sur les droits de l’enfant est le premier instrument international à fixer à 18 ans l’âge minimum de mariage (Article 21(2)). Un certain nombre d’actions ont été menées pour donner effet à cette disposition. L’Union Africaine a lancé sa campagne pour mettre fin au mariage des enfants en Afrique en recherchant la coopération avec les Etats parties et développer un dialogue constructif avec les gouvernements, les Osc, et les autres acteurs.
Aucune forme de violence envers les enfants n’est justifiable
Les enfants ont le droit d’être protégés contre la violence. Ainsi, l’article 1(3) de la Charte sur les droits de l’enfant dispose : «toute coutume, tradition, pratique culturelle ou religieuse incompatible avec les droits, devoirs et obligations énoncés dans la présente charte doit être découragée dans la mesure de cette incompatibilité». Les Etats ont donc la responsabilité de s’assurer que leurs lois et les pratiques de leurs populations sont conformes à la charte. La Charte sur les droits de l’enfant appelle les Etats à l’éliminer les coutumes et les pratiques préjudiciables à la santé ou à la vie de l’enfant ou qui constituent des discriminations sur la base du sexe (article 21(1) ; et appelle les Etats à protéger les enfants contre les abus de stupéfiants, les abus sexuels et la maltraitance (articles 16, 27 et 29). Ces dispositions sont conformes à l’Agenda de l’Onu 2030 sur les objectifs de développement durables «qui a pour objectifs d’investir dans ses enfants et dans lequel chaque enfant naît libre de toute violence ou exploitation».
L’un des sujets de préoccupation sont les sacrifices rituels de personnes albinos et d’autres handicaps – particulièrement les enfants.
Sergino Lokossou




















