(Urgence de ressusciter le ministère de la communication)
L’ex-Office de radiodiffusion et télévision du Bénin (Ortb) devenu depuis quelques mois, Société de radio et télévision du Bénin (Srtb) est mal en point. La maison passe des jours sombres depuis que les gouvernants ont décidé d’y opérer une série de réformes qui se révèlent être inopérantes et totalement en déphasage avec les standards de l’audiovisuel public.
Les médias de service public, la radio et la télévision nationales, sont dans un état de dégénérescence avancée et pour cause. L’aube de la révolution annoncée à la faveur de la transition de l’ex-Ortb vers la Société de radio et télévision du Bénin (Srtb) semble avoir du plomb dans l’aile. L’annonce de cette mutation avait pourtant déchainé moult espoirs dans le cœur des travailleurs de l’Office qui attendaient légitimement à voir des changements significatifs. Les réformes annoncées, ne devraient pas, selon leur conception, se limiter à un simple changement de nom, mais inaugurer une nouvelle ère aussi bien dans la gestion des contenus diffusés à l’échelle nationale et internationale mais aussi impacter positivement les conditions de travail des agents de l’office. Seulement quelques mois après cette annonce, le constat est plutôt désolant. En lieu et place de l’eldorado annoncé, c’est une véritable apocalypse que vivent les médias de service public. Entre des réformes déconnectées des réalités du secteur au moyen d’une gouvernance à contre-courant de performances, la Srtb révèle déjà les prémisses d’une mort certaine qui sonnera le requiem de la radio et de la télévision nationale si rien n’est fait pour parer au plus pressé. Défaut de matériels de travail, refus de signer des ordres de mission, retard dans l’élaboration de budgets, édiction de règles fantaisistes et arbitraires sont entre autres, les griefs portés contre la tutelle par le personnel de l’Office réuni au sein du Syndicat des travailleurs de l’audiovisuel public du Bénin (Syntrap-Bénin). Avec ladite tutelle qui n’est autre que le ministère du Numérique et de la digitalisation, la collaboration est exécrable. « Nous ne sommes pas contre les réformes mais au niveau du ministère, il faut reconnaître que ça ne marche pas comme cela se doit. Nous avons aujourd’hui une relation difficile avec la tutelle et nous avons un Conseil d’administration qui ne nous écoute pas et qui ne cherche pas à comprendre comment les choses se passent. » a confié, un brin horripilé, Armel Dossou-Kago, secrétaire général du Syntrap-Bénin, lors de l’Assemblée générale tenue le 29 octobre 2024. Pour lui, l’attitude de la tutelle et du Conseil d’administration qui ont fermé toute porte au dialogue, est inadmissible. Pendant ce temps, la Srtb qui se retrouve à un moment charnière de son aventure dans le paysage audiovisuel béninois, se meurt à petit feu.
Nécessité de restaurer le ministère de la Communication
Le drame que vivent les médias de service public en l’occurrence la radio et la télévision nationales, depuis qu’ils sont placés sous la tutelle du ministère du Numérique et de la digitalisation, remet sur le tapis la question de la pertinence de la suppression du ministère de la Communication. On se rappelle, qu’à la faveur du remaniement intervenu au lendemain de sa réélection en 2021, Patrice Talon, avait opté pour la suppression du ministère de la Communication pour « raison d’efficacité » à en croire ses explications. « Celui qui s’occupe du bon fonctionnement des médias ne peut pas être en plus membre du gouvernement, avait soutenu par ailleurs Patrice Talon pour qui la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) est suffisamment qualifiée pour la gestion des médias qu’ils soient publics ou privés», avait laissé entendre le chef de l’Etat. Cependant, dans la réalité, la gestion de la Srtb créée en novembre 2023, incombe plus au ministère du Numérique qu’à l’institution régulatrice des médias. A titre illustratif, la ministre du Numérique et de la digitalisation, Aurélie Adam Soulé Zoumarou, est à ce jour, la personnalité la plus influente du Conseil d’administration de la Srtb, un organe mis en place par décret n°2024-12 du 17 janvier 2024. La gestion calamiteuse dont fait l’objet la Srtb sous la houlette du ministère du Numérique, remet en cause la pertinence de la suppression du ministère de la Communication qui a assuré depuis lors, une tutelle plus ou moins responsable des médias publics. Il y a dès lors nécessité de changer de paradigme et de revenir à la case départ. Cela éviterait la navigation à vue dans laquelle s’illustrent les actuels dirigeants de la Srtb et subséquemment la mort programmée des médias de service public au Bénin.
Abdourhamane Touré