Les présidents des groupes parlementaires UP le Renouveau et Bloc Républicain ont conjointement déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi portant modification de la Constitution du 11 décembre 1990. Le texte, motivé par le souci de renforcer la stabilité institutionnelle et la gouvernance politique, suggère notamment la création d’un Sénat, présenté comme un organe de régulation et d’arbitrage des divergences politiques, afin de consolider la démocratie et d’assurer un développement durable pour le Bénin.
Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,
Les députés soussignés, auteurs de la présente proposition de loi, ont l’honneur de vous exposer :
Exposé des motifs
La Conférence nationale des forces vives de la Nation tenue à Cotonou du 19 au 28 février 1990 a consacré la détermination du Peuple béninois à restaurer la démocratie libérale fondée sur la liberté, le pluralisme et la protection des droits fondamentaux.
La Constitution adoptée après référendum, par la loi n°90-32 du 11 décembre 1990, porte en promesse et en actions politiques, cette détermination dont la finalité est le renforcement d’un État fondé sur le droit, le développement économique et la justice sociale.
Des dysfonctionnements institutionnels et systémiques observés après une trentaine d’années de mise en œuvre ont conduit à une première série de modifications contenue dans la loi n°2019-40 du 7 novembre 2019. Celles-ci ont porté sur le renforcement des droits fondamentaux à caractère individuel (l’abolition de la peine de mort) et catégoriels (l’admission de la discrimination positive à l’égard de la femme) ; le renforcement des institutions (la création de la Cour des comptes) ; l’alignement des élections nationales et communales (l’institution de l’année électorale) ; la reconnaissance de la chefferie traditionnelle etc.
Toutefois, quoiqu’appréciables et saluées de tous, ces premières modifications ne suffisent pas à rendre irréversible l’élan du développement complet et durable pris par le peuple béninois.
En effet, il est constant que l’accélération voire l’accentuation de la transformation structurelle du Bénin ainsi que le règlement durable des problèmes socio-économiques sont annihilés avec l’animation de la vie politique dans une perspective politicienne qui oppose systématiquement les courants politiques adverses et empêche tout éventuel compromis susceptible de permettre la mise en œuvre de solutions consensuelles aux problèmes de développement de la Nation. Pour y remédier, il convient d’envisager la création d’un nouvel organe dans l’environnement institutionnel, capable de rapprocher voire arbitrer les options politiques divergentes, au profit de l’action publique efficace et consensuelle. Il est souhaitable que cet organe nouveau compte, entre autres, sur l’expérience des anciens présidents de la République, des anciens présidents de l’Assemblée nationale ainsi que les anciens présidents de la Cour constitutionnelle pour leur confier, à titre principal, cette mission : c’est la raison qui motive la proposition de création du Sénat.
Ainsi, le Sénat aura pour rôle de :
• concourir à garantir la sauvegarde et le renforcement des acquis du développement de la Nation, de défense du territoire et de sécurité publique. A ce titre il veille à la stabilité politique, la continuité de l’État, au débat politique contradictoire constructif.
• assurer la promotion des mœurs politiques conformes à la sauvegarde des intérêts supérieurs de la Nation, de l’Unité et de la Cohésion nationale, du développement durable et de la paix sociale.
• veiller à renforcer les libertés publiques, la qualité de la gestion des biens publics, l’unité et la concorde nationales en vue du développement humain équilibré et durable. De même, en matière législative, le Sénat délibère, a priori, sur tout projet ou proposition de loi à caractère politique, notamment en ce qui concerne la dévolution ou l’organisation du pouvoir d’État. Par ailleurs, le Sénat peut solliciter une seconde lecture de toute loi votée à l’Assemblée nationale exceptées les lois de finances et assimilées.
A cet effet, lorsque, à sa demande de seconde lecture de toute loi conférée par la constitution, l’Assemblée nationale écarte les observations du Président de la République, le Sénat est saisi en lecture définitive.
Par ailleurs, il est indiqué que pour tenir compte des exigences d’une telle chambre politique d’une part, et des expériences requises dans la gestion des dossiers d’Etat d’autre part, le Sénat soit composé des anciens présidents de la République ; des anciens présidents de l’Assemblée nationale ; des anciens présidents de la Cour constitutionnelle ; des chefs d’État-major des forces en charge de la défense et de la sécurité nationales (tous membres de droit). Il est également souhaité qu’en dehors des membres es-qualités mentionnés, le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale désignent chacun, des membres dont le nombre constitue un quota qui n’excéderait pas au total, 1/5 de ces membres de droit.
Toutes ces propositions sont élaborées et consignées dans le texte de loi que nous annexons. C’est pour ces motifs que nous, les auteurs de la présente proposition de loi vous demandent d’en saisir la représentation nationale en vue de son étude et de son adoption.
Veuillez agréer, Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, l’expression de notre haute considération.
Proposition de loi
portant modification de la loi n°90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin
Article premier : sont créés ou modifiés :
Article 5-1 (création) : A l’élection du Président de la République, les activités politiques des partis politiques et des corps de la Nation doivent converger au renforcement de l’action politique du Gouvernement jusqu’à l’année précédant la prochaine année électorale.
Au cours de cette période de trêve des activités de compétition politique, l’activité des partis politiques ne doit pas compromettre l’action politique du président de la République et du Pouvoir exécutif. L’animation du débat politique à finalité compétitive est suspendue. L’activité politique doit être contributive et concourir au succès de l’action politique mise en œuvre par la majorité en charge de la direction de l’État.
Le Sénat veille au respect des dispositions du présent article.
Article 22 (modification) : Toute personne a droit à la propriété. Nul ne peut être privé de la propriété des biens immeubles, lorsque cette propriété est fondée en titre judiciaire ou administratif, que pour cause d’utilité publique et contre juste et préalable dédommagement.
Article 53, alinéa dernier (modification) : Le serment est reçu par la Cour constitutionnelle et le Sénat, devant l’Assemblée nationale, la Cour suprême et la Cour des comptes.
Titre v nouveau : du senat
Article 113-1 (création) : Le Sénat concourt à garantir la sauvegarde et le renforcement des acquis du développement de la Nation, de la défense du territoire et de la sécurité publique. A ce titre il veille à la stabilité politique, la continuité de l’État et la paix de la Nation.
Le Sénat assure la promotion des mœurs politiques conformes à la sauvegarde des intérêts supérieurs de l’État et de la Nation, de l’Unité et de la Cohésion nationale, du développement durable et de la paix sociale. Le Sénat veille à renforcer les libertés publiques, la qualité de la gestion des biens publics, l’unité et la concorde nationales en vue du développement humain et complet durable.
En matière législative, il délibère, a priori, tout projet ou proposition de loi à caractère politique, notamment lorsque les projets ou propositions de loi intéressent la dévolution ou l’organisation du pouvoir d’État, les finances publiques, la sécurité intérieure et la défense du territoire. Il peut, alors même que le président de la République n’a pas user de ce pouvoir, solliciter une seconde lecture de toute loi votée à l’Assemblée nationale. Lorsque, à sa demande de seconde lecture d’une loi, l’Assemblée nationale écarte les observations du Président de la République, le Sénat est saisi en lecture définitive.
Le Sénat siège à Cotonou.
Il dispose d’une administration et organise son fonctionnement conformément à un règlement intérieur.
Article 113-2 (création) : Le Sénat se prononce sur les comportements des dirigeants politiques, à l’exception du Président de la République et du Président de l’Assemblée nationale, des membres de l’Assemblée nationale, du Gouvernement ou des partis politiques qui contreviennent aux dispositions des articles 5-1et 113-1 de la présente Constitution et prend les sanctions et les mesures prévues à son règlement intérieur.
Article 113-3 (création) : Le Sénat veille au changement de régime et à la transmission du pouvoir d’État dans les conditions pacifiques et républicaines sans que les acquis du développement soient compromis.
Article 113-4 (création) : Le Sénat est composé des anciens présidents de la République ; des anciens présidents de l’Assemblée nationale ; des anciens présidents de la Cour constitutionnelle ; des chefs d’État-major des forces en charge de la défense et de la sécurité nationales. Le président de la République et le président de l’Assemblée nationale, désigne chacun, des membres dont le nombre n’excède pas le 1/5ème des membres de droit.
Nul ne peut exercer les fonctions de membre du Sénat s’il est âgé de plus de 90 ans.
Article 2 : A l’installation du Sénat, les membres de droit ayant atteint la limite d’âge de 90 ans, peuvent y siéger à titre dérogatoire jusqu’à l’âge de 95 ans.
La présente loi constitutionnelle entre en vigueur dès sa promulgation et sera exécutée comme loi de l’Etat.


















