Le tourisme fait partie des secteurs privilégiés par le président Patrice Talon. Un tourisme à la fois balnéaire, culturel, mémoriel et de safari. Le gouvernement du Bénin entend en faire un gisement de croissance et a consenti des investissements importants depuis l’accession du Chef de l’Etat au pouvoir.
« Le Bénin n’a pas pétrole, n’a pas d’or, n’a pas de diamants, mais il a un patrimoine historique, artistique et culturel énorme, auquel on n’a jamais donné sa chance… ». Ces propos sont de José Pliya, chargé de mission du président de la République aux arts et à la culture. Le premier axe selon lui consiste à renforcer l’offre patrimoniale et culturelle. La tâche n’est alors pas mince surtout dans l’environnement très concurrentiel de l’Afrique où de nouvelles destinations attirent de plus en plus. Le tourisme peut, sous certaines conditions, en raison d’un patrimoine riche et varié, constituer un espoir dans la recherche de solutions durables aux problèmes de développement du pays. À ce propos, le gouvernement béninois depuis 2016 veut démontrer que le tourisme peut être un moyen de lutte efficace contre la pauvreté et parle de créer plusieurs emplois en tenant compte d’une prévision de croissance du secteur.
Hub touristique africain
Le Bénin détient l’un des plus riches patrimoines du tourisme mémoriel de l’Afrique de l’ouest liés à l’esclavage. La ville de Ouidah située sur le littoral à 40 km de Cotonou a été un grand port négrier au XIXe siècle. Mais mal conservés, ses sites touristiques – dont le plus connu, la route des esclaves- souffrent de délabrement.« Le Bénin ne tire que 0,7 % de son PIB du secteur du tourisme. Le gouvernement envisage de redessiner de nouveaux circuits touristiques et de moderniser les installations existantes » et de faire du Bénin un « puissant hub touristique africain ». Après le premier mandat du président Talon, les actions en matière de promotion de la destination Bénin sont bien perceptibles. La ville de Ouidah abrite désormais une grande cité balnéaire. Même si les travaux sont toujours en cours. Patrice Talon mise également sur l’économie numérique, un secteur de plus en plus dynamique à Cotonou, avec l’installation d’incubateurs de start-up numériques comme Jokkolabs. Pour accompagner ce secteur, le gouvernement prévoit d’améliorer le taux de couverture internet dans le pays à 80 % grâce au déploiement massif de la fibre optique. Dans le secteur de l’énergie, il a été annoncé la mise en place d’une capacité électrique de 95 MW de photovoltaïque d’ici les trois prochaines années, la modernisation et l’extension du réseau de distribution de l’énergie électrique de façon à permettre à chaque Béninois de bénéficier de l’énergie électrique. Le tourisme au Bénin, qui bénéficie d’un important potentiel naturel et culturel, constitue la deuxième source nationale de rentrées de devises et le troisième employeur du pays, après l’agriculture et le commerce.
Sites et attraits touristiques
Resté pendant des décennies dans l’isolement, le tourisme a tenu une place de choix dès 1990 dans les réformes économiques des entreprises de sorte qu’il s’ouvre de plus en plus au marché mondial. La création récente du visa touristique commun aux cinq pays (Bénin, Burkina, Côte d’ivoire, Niger et Togo) du Conseil de l’entente ouvre des perspectives nouvelles au développement des sous-régions en général et au Bénin en particulier qui recèle de nombreux atouts touristiques riches et variés sur toute l’étendue de son territoire. Cet immense patrimoine présente des spécificités d’un département à l’autre.
Pour permettre aux touristes de mieux découvrir et jouir des énormes potentialités touristiques du Bénin, un certain nombre de circuits ont été élaborés et sont actuellement exploités par des agences de voyage, mais le touriste peut également bâtir à volonté son circuit ou combiner ce qui existe. Le tourisme béninois connaît de nos jours deux nouveaux phénomènes : l’ethno tourisme et l’éco-tourisme. Il s’agit du tourisme de découverte des curiosités naturelles du pays mais également de la compréhension du comportement des populations visitées dans le respect et la protection de leur culture et de leur environnement.
Bâtir la destination Bénin
Pour l’année 2025, plusieurs annonces ont été faites. Un musée international de la mémoire et de l’esclavage (Mime), un musée d’art contemporain ainsi que le Murad (Musée des rois et des amazones du Danxomè), sur le site des palais royaux d’Abomey, dont l’ouverture est annoncée pour 2025. « Nous allons pouvoir capitaliser sur ces quatre pôles touristiques d’avenir pour le Bénin en termes d’activités, d’événements et de communication », a exposé Claude Blanc. Le pays aspire également à développer le tourisme gastronomique autour des traditions culinaires béninoises, en développant des festivals ou des itinéraires spéciaux.
Au-delà de l’offre, c’est l’image de la destination qu’il faut construire, tout en affirmant un positionnement. Car si des poids lourds de l’hébergement font leur arrivée, cela ne signifie pas pour autant que la destination compte développer un tourisme de masse, prévient Claude Blanc, pour qui « cette destination est réservée à des voyageurs avisés ». Des voyageurs prêts à faire le vaccin contre la fièvre jaune, obligatoire pour entrer dans le pays, mais aussi à débourser entre 700 et 1000 euros par personne, selon la saison, pour le billet d’avion. « Le Bénin n’est pas une destination familiale aujourd’hui, c’est plutôt une destination pour le tourisme individuel ou de petits groupes d’amis qui cherchent un peu l’aventure, le dépaysement, l’Afrique authentique. Pour moi, ce pays, c’est vraiment une Afrique miniature. ».
Bénin Tourisme a défini dix marchés cibles, dont la France. Un bureau de représentation de la destination doit d’ailleurs ouvrir dans l’Hexagone. « Nous allons être davantage présents sur les salons et certains événements, nous prévoyons aussi de mener des actions pour former les agents de voyages par le biais d’éductours », a détaille Claude Blanc. Le président du Bénin a validé une marque de destination, une campagne de communication internationale est en préparation. Mais pas encore sur la rampe de lancement. « Il est encore trop tôt pour communiquer massivement en BtoC. Pour le moment, nous construisons ce nouveau positionnement en travaillant avec les professionnels du secteur. »
Cap sur 2026
Le Bénin n’est pas le seul pays d’Afrique à parier sur le tourisme. Certains ont une longueur d’avance. « Le Togo, la Côte d’Ivoire et le Sénégal sont de vrais concurrents, reconnaît Claude Blanc. Mais je trouve cela plutôt sain. Et puis je crois beaucoup au développement des combinés Afrique de l’Ouest dans l’avenir. Quand un voyageur se rend en Afrique, il a souvent envie de conjuguer des expériences variées. Cette région du monde s’y prête parfaitement. On peut s’attendre à ce que cela crée une certaine émulation, une appétence pour l’Afrique de l’Ouest », pense-t-il.
D’autres pays tels que le Rwanda, le Ghana, le Nigéria se développent, communiquent, se structurent, relève Claude Blanc. « Même si, à l’instar du Nigéria, ils peuvent être confrontés à d’autres défis en termes d’image ou de sécurité, ils bénéficient d’un fort rayonnement grâce à des mouvements culturels comme l’Afrobeat, par exemple, ou à une véritable effervescence autour de l’art contemporain, du cinéma… Tout cela créé un buzz plutôt positif à l’égard des pays africains », estime-t-il. Pour le Bénin, l’objectif est de se lancer véritablement à l’assaut du marché international à l’horizon 2026. Le temps que les principales infrastructures touristiques soient construites. « Je pense que d’ici là, il va se passer des choses très positives à l’échelle du continent. Il y a toute une ribambelle de jeunes qui créent des start-up. Ils ont fait leurs études dans les meilleures universités internationales et reviennent au pays avec des projets, trouvent des investisseurs, les soutiens politiques et lancent leur business. Je suis plutôt confiant à l’égard de cette nouvelle génération. Il y a un énorme potentiel et cette jeunesse est prête à le porter. ».

Sergino Lokossou