« Le parrainage n’a d’effets juridiques et politiques que lorsqu’il a été accordé en faveur d’un candidat qui partage la vision et les valeurs du parti politique auquel appartient le parrain » ainsi a tranché la Cour constitutionnelle dans sa décision Dcc 24-040 du 24 mars 2024 rendue suite aux recours dont elle est saisie relativement au contrôle de constitutionnalité du nouveau Code électoral. Une décision qui, loin de violer la liberté de parrainage de l’élu, s’arrime à bien d’égards, à l’esprit du législateur traduit dans le nouveau Code électoral.
Pour certains analystes et observateurs, cette décision sonne comme un revirement jurisprudentiel puisque saisie d’un recours sur la question du parrainage en 2021, la Cour constitutionnelle présidée par Joseph Djogbénou, a rendu une décision qui semble consacrer le parrainage comme un droit individuel à la discrétion du député ou du maire le détenant. Quoiqu’objet de controverses, la décision de la Cour constitutionnelle présidée par Dorothé Sossa ne manque pas de pertinence puisqu’elle intégre pleinement la philosophie des modifications introduites dans le nouveau Code, lesquelles font des partis politiques, les véritables acteurs du jeu politique. La Cour a notamment fondé son argumentaire sur le fait que le mandat du député ou du maire, est impératif. Le mandat impératif étant défini comme un mode de représentation par lequel les élus ont l’obligation, sous peine de révocation, de respecter les directives de leurs électeurs sur la base desquelles ils ont été désignés. Or, l’article 5 nouveau alinéa 1er de la Constitution prescrit : » Les partis politiques concourent à l’expression du suffrage. Il se forment et exercent librement leurs activités dans les conditions déterminées par la Charte des partis politiques. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale, de la démocratie, de l’intégrité territoriale et de la laïcité de l’Etat ». Par ailleurs, la Cour soutient qu’un parti politique est doté d’une ligne constituée par l’ensemble des règles à l’effet de conquérir et d’exercer le pouvoir et de mettre en œuvre un projet politique. Pour la haute juridiction, étant donné que le parrainage est un acte politique grave destiné à avaliser un candidat à la candidature, la ligne du parti doit l’emporter sur les ambitions individuelles. En clair, la haute juridiction a considéré que le détenteur du pouvoir de parrainer, est d’abord le militant d’un parti politique. Il conserve certes sa liberté mais ne peut en jouir dans le cadre du parrainage, qu’en conformité avec la vision et les valeurs de sa formation politique. Une lecture qui est en parfaite adéquation avec l’article 132 nouveau du Code qui ne met pas fin à la liberté de parrainage mais qui fixe le cadre dans lequel elle s’exerce conformément à l’esprit du nouveau Code électoral qui a entrepris d’instaurer une cohérence entre les engagements et les actes politiques.
Abdourhamane Touré