Conformément au planning de déroulement des activités entrant en marge de la rentrée scolaire et universitaire 2024-2025, les écoles et collèges ont rouvert leurs portes le lundi 16 septembre 2024 sur toute l’étendue du territoire national. Au Centre de promotion sociale des aveugles de Sègbèya sis dans le département du Littoral, selon un constat fait par la rédaction, les cours ont effectivement démarré dès le premier jour, même si les inscriptions des nouveaux apprenants sont toujours en cours.
Il est 9 heures du matin. Une équipe de la rédaction est descendue dans la cour bien aménagée du Centre de promotion sociale des aveugles de Sègbèya sis dans le département du Littoral pour constater le bon démarrage des cours 24 heures après la reprise des classes au Bénin. Elle a été accueillie par la responsable des lieux, Jocelyne Sévi. Après les salutations d’usage, place à une visite guidée des lieux. De la maternelle au Cours moyen deuxième année, toutes les classes ont été visitées avec les explications du chef centre sur les réalités à chaque niveau. Créé en 1978, le Centre de promotion sociale des aveugles de Sègbèya a été effectivement mis en service et rétrocédé au gouvernement le 3 octobre 1983. Pour le compte de cette rentrée, il compte déjà un effectif de 130 apprenants au primaire et 75 au secondaire selon les chiffres communiqués. Toutefois, au dire de la responsable, les inscriptions se poursuivent. « Pour être admis dans le centre, il faut absolument un certificat médical d’un médecin ophtalmologique qui confirme que l’apprenant est confronté à une déficience irréversible, et que sa situation ne peut plus s’améliorer avec des aides techniques et autres. Il faut aussi l’acte d’état civil, le certificat de scolarité pour les apprenants qui étaient déjà dans des cours ordinaires avant d’être rattrapés par la cécité et une contribution instaurée dans le but d’inciter les parents à regarder le travail qui se fait avec leurs enfants », a expliqué Jocelyne Sévi.
Reprise effective des cours
Les élèves de la maternelle, tous joyeux, viennent de finir une leçon pratique sur l’hygiène. Sous la direction de leur enseignante, ces bouts de chou composés de voyants et des déficients visuels ont appris les attitudes à avoir au retour des toilettes. « La maternelle est inclusive, un mélange d’handicapés visuels et d’enfants voyants. Les voyants sont la majorité, mais c’est plus stimulateur pour les enfants déficients visuels d’être dans cet environnement. Ça leur permet, très jeunes, de se décomplexer et d’avoir une vie tout à fait normale et une inclusion plus parfaite », a-t-elle clarifié. Pendant qu’au Cours moyen première année (Cm1), les apprenants ont bouclé une dictée corrigée, ceux du Cours moyen deuxième année s’affairent avec une leçon de mathématiques. Selon la responsable des lieux, l’éducation d’une personne déficiente visuelle est un long processus qui comporte plusieurs étapes. A titre illustratif, lorsque c’est un jeune déficient visuel, il s’agit d’évaluer l’enfant et de voir sa possibilité à rentrer en Cours d’initiation (Ci) selon les potentialités des enfants et l’âge non restrictif. Lorsque ces enfants arrivent après l’évaluation, on peut décider en fonction de leurs capacités de les mettre dans une classe spéciale qui s’appelle la réadaptation. Le défi pour toute personne déficiente visuelle est de pouvoir se mouvoir dans son espace, d’avoir une bonne maîtrise de cet espace, dira Jocelyne Sévi. « Pour les apprenants capables de faire le système scolaire, on les met en cours d’initiation. Même là, il y a le travail de sensibilité des doigts qui se fait, toucher à différents objets, différentes formes pour avoir la capacité de maîtriser plus tard le braille », a-t-elle ajouté. Après cette étape, l’enfant suit normalement son cours avec l’apprentissage à l’écriture du braille.
Un cursus complet
Au Cpsa, après l’examen du Certificat d’études primaires, les apprenants intègrent le Collège d’enseignement général de Ségbèya. Là, tout un dispositif est mis en place, une équipe du centre assure la transcription des épreuves et les évaluations en braille au profit des apprenants. A la fin des compositions, la même équipe procède à la transcription du braille au noir afin que les enseignants puissent corriger et rendre les notes des apprenants. Après le collège, ils choisissent les filières à l’université. Pour l’heure aucun dispositif ne leur est adapté dans les universités, mais dans la mesure des possibilités, l’équipe de suivi du secondaire accompagne encore les étudiants dans leurs évaluations et autres. L’information adaptée occupe une place capitale dans le système d’apprentissage du Cpsa. Des ordinateurs avec des logiciels spécifiques de synthèse vocale sont mis à la disposition des apprenants à partir de la classe de 6è. Ils permettent aux déficients visuels de travailler comme toute autre personne et de maîtriser l’outil informatique. Pour faciliter l’insertion scolaire des apprenants, le centre dispose d’une cantine. Le petit-déjeuner, le déjeuner, même le dîner sont offerts aux apprenants conformément aux mesures incitatives qui s’insèrent dans les décrets pris en juin 2023 pour faciliter l’accessibilité aux personnes à besoin spécifique. Selon les besoins et en cas d’échec au cursus scolaire ou de barrières à l’enseignement au cours général, l’assistance sociale évalue les capacités de l’enfant. Des suggestions lui sont faites afin qu’il puisse avoir un projet de vie qui lui permette d’être plus tard autonome. « Il y en a que nous référons vers le centre d’Akassato ou d’autres pris en charge par les partenaires pour une formation professionnelle », a indiqué la responsable.
Le Masm, un partenaire de taille
Placé sous l’autorité du ministère des Affaires sociales, le Centre de promotion sociale des aveugles bénéficie d’un accompagnement de l’État. Cela permet la subvention du matériel didactique qui s’élève à 13.000 francs Cfa au lieu de 120.000 francs Cfa par apprenant. Par ailleurs, un internat est mis en place pour accueillir les apprenants qui ont quitté des zones éloignées. Selon Boubacar Bani Yéro, Directeur de l’inclusion sociale et de la solidarité, des mesures spécifiques ont été prises pour améliorer de façon substantielle les conditions de vie des personnes handicapées et renforcer davantage les facteurs d’inclusion des personnes handicapées non seulement en matière d’employabilité, mais aussi d’éducation. « Mais le constat a été que dans ce domaine, il y a beaucoup d’établissements qui sont privés et qui accompagnent l’État. C’est ce qui a fait d’ailleurs que récemment le chef de l’État a décidé d’accompagner ces établissements en leur offrant une subvention annuelle pouvant aller jusqu’à dix millions de francs pour ces établissements d’éducation inclusive et ceci dès cette rentrée scolaire qui vient de démarrer », a annoncé le Directeur. Au-delà de cela, des aménagements sont faits pour s’assurer que les épreuves puissent être adaptées pour les personnes handicapées lors des différents concours et examens, car il relève d’une importance que l’enfant ayant un handicap qu’il soit intellectuel ou visuel puisse être à même de disposer d’un minimum. Mieux, il y aura désormais une majoration de temps pour les épreuves pour les personnes handicapées en tenant compte de leur capacité et les inscriptions dans les établissements pour les bourses et les universités. Toutes ces mesures permettront de donner plus de chance aux personnes handicapées, de les encourager à pouvoir vraiment s’intégrer et de les motiver à davantage occuper les espaces éducatifs.
Les apprenants épanouis…
Gracia Dossyia a 13 ans et est apprenante au Centre de promotion sociale des aveugles. Elle se sent dans un environnement très favorable à son autonomie. « Je suis très contente de ce qui se fait dans ce centre. Nous travaillons très bien et nous nous améliorons au quotidien », s’est-elle réjouie. Quant à Gaston, élève en classe de 4ème, il dit avoir intégré le centre depuis neuf années. Il occupe la première place du Collège d’enseignement général de Sègbèya avec une moyenne de 18,47. « La première fois que mes parents m’ont proposé de commencer la classe du Cours d’initiation (Ci), je n’étais pas content, mais actuellement je me sens vraiment épanoui. Je me suis fait des amis qui m’aident ou que j’aide aussi s’ils ont besoin de moi », a-t-il confié. Au Centre de promotion sociale des aveugles, la rentrée scolaire a effectivement démarré et suit son cours normal.
Mohamed Yasser Amoussa (Coll)