(Les 3 autres co-accusés acquittés)
Hier, jeudi 30 janvier 2025, sixième jour d’audience à la Criet dans l’affaire « Complot contre l’autorité de l’Etat », le verdict est finalement tombé. L’homme d’affaires Olivier Boko, l’ancien ministre des Sports Oswald Homéky et leurs co-accusés Hugues Crépin Adjigbékoun, Corneille Gbaguidi et Ganiou Sanoussi, ont été fixés sur leurs sorts dans ce sulfureux procès qui tient en haleine tout le peuple.
L’issue de ce procès déterminera en effet non seulement le sort des accusés mais aussi l’avenir de la scène politique béninoise. La justice parviendra-t-elle à trancher avec clarté et impartialité ? Répondra-t-elle aux attentes du peuple en quête de vérité ? Telles sont quelques interrogations qui agitent les esprits et auxquelles la présidente de la composition du collège de juges, Christelle Adonon, est appelée à donner suite. A l’audience d’hier jeudi 30 janvier 2025, le ministère public était attendu pour faire ses réquisitions après avoir sollicité une suspension des débats, le mercredi 29 janvier 2025. Requête à laquelle la présidente de la composition du collège de juges, Christelle Adonon, a accédé. Entre inquiétude, crainte et appréhension, la Cour a mis fin à l’épreuve de nerf, au bout de six jours de procès. Pour rappel, à l’audience du mercredi 29 janvier 2025, la Cour a procédé à la lecture des procès-verbaux d’audition des sieurs Olivier Boko et Oswald Homéky lors de l’instruction, ceci, suite à leur refus de faire leurs dépositions à l’audience du mardi 28 janvier 2025. Ils ont formellement notifié à la Cour qu’ils ne sauraient déférer à cette formalité en l’absence de leurs avocats qui se sont à, l’unanimité, déconstitués du dossier, le mardi 21 janvier 2025, au motif que la composition du collège de juges n’étaient pas conformes aux prescriptions du Code de procédure pénale en matière d’audience criminelle. Ils ont été exprimé quelques appréhensions relativement à l’impartialité de la présidente du collège, Christelle Adonon, taxée d’être proche du chef de l’Etat.
10 ans requis contre Boko et Homéky et 20 ans pour Rock Niéri
Dans le cadre de l’affaire complot contre la sûreté de l’Etat, le ministère public, a fait ses réquisitions. L’exercice, magistralement assuré par Mario Mètonou, a duré plus d’une heure 30 minutes. « Mon Dieu, mon Dieu, faites que ce ne soit pas vrai ! ». C’est par ces mots que le magistrat, a débuté son réquisitoire confiant qu’il aurait voulu prononcer son réquisitoire en présence des avocats de la défense. « J’aurais préféré être en présence d’un canular, d’un mauvais rêve, d’un scénario de Sénevé mais hélas », a confié le représentant du ministère public. Il a indiqué que le procès en cours soulève des interrogations fondamentales sur la sûreté de l’État et la transparence politique. Ce qui aurait pu ressembler à un mauvais rêve ou à un scénario de fiction judiciaire est pourtant bel et bien une réalité. L’objectif du procès selon lui est de répondre aux doutes légitimes et d’établir la vérité sur une affaire aux ramifications complexes. Dans une démonstration cartésienne, l’homme a relaté les faits, en établissant les éléments constitutifs de l’infraction. Il a subséquemment établi la culpabilité des mis en cause après avoir insisté sur le rôle de chaque acteur. Sur la base des éléments juridiques qu’il a mis en exergue, le procureur spécial près la Criet, a demandé que Olivier Boko, Rock Niéri et Oswald Homéky, soient déclarés coupables des infractions de complot contre la sûreté de l’Etat et corruption d’agents publics. En plus des infractions de complot contre la sûreté de l’Etat et corruption d’agents publics, il a requis contre Oswald Homéky l’infraction de faux et usage de faux. Sur la base de ces infractions, il a demandé à la Cour de condamner Rock Niéri à 20 ans de réclusion criminelle, à 1 milliard 500 millions d’amende ; Olivier et Oswald Homéky à 10 de réclusion criminelle et à 1 milliard 500 millions de FCfa d’amende pour chacun d’eux. Il a demandé en outre que la Cour prononce la confiscation au profit de l’Etat de la somme de 1 milliard 500 millions de FCfa d’amende saisis chez Oswald Homéky ; de prononcer la confiscation du véhicule 4×4 au profit de l’Etat que la Cour est invitée à recevoir en sa constitution de partie civile. Le ministère public a enfin requis l’acquittement pour les trois co-assusés dans le dossier : Hugues Adjigbékoun, Corneille Gbaguidi et Ganiou Sanoussi.
«On veut me condamner par déduction», clame Olivier Boko
Invité à réagir au réquisitoire du Procureur spécial de la Criet, l’homme de main de Patrice Talon, a persisté dans sa ligne de déni de toute implication dans le projet de coup d’État en préparation contre son allié de veille date. «Le procureur spécial vous amène à faire un procès de la richesse et un procès de la pauvreté. N’allez pas dans ce sens», a-t-il souhaité. Pour lui, les faits démontrent à suffisance qu’il n’est mêlé ni de près ni de loin au complot dont il est accusé. «Je suis innocent. On veut me condamner par déduction», a-t-il clamé. Et d’ajouter : «J’étais à Casablanca quand le chef de l’Etat m’a appelé. J’ai dû chercher un avion express pour rentrer. Si je voulais faire un coup d’État, je n’allais pas rentrer», a fait savoir celui qui est considéré comme le numéro 2 du régime en place au Bénin depuis avril 2016. Pour Olivier Boko, ce procès constitue un tournant pour le pays et cache des non-dits. «Ce procès est historique. Je suis du système. Je sais comment ça fonctionne. Je sais, je sais, je sais…Nous en reparlerons», a laissé entendre l’acteur politique et très discret. «L’opposé de la beauté, ce n’est pas la laideur, c’est l’indifférence. L’opposé de la justice, c’est l’indifférence. Si tel est mon sort, je l’accepte», a-t-il conclu. Après ces propos, la cour a annoncé la mise en délibéré du dossier à 11 heures 38 minutes.
20 ans de réclusion criminelle et de lourdes amendes prononcés
A la reprise du procès à 17 heures 33 minutes soit après plus de 6 heures d’horloge, vient le moment tant attendu : celui du verdict. Au terme du délibéré, les principaux mis en cause à savoir Olivier Boko, Oswald Homéky et Rock Niéri ont été condamnés à 20 ans d’emprisonnement pour complot contre la sûreté de l’Etat et corruption d’agents publics. En plus de ces charges, Oswald Homéky est condamné pour faux certificat. Les trois accusés ont été condamnés à 20 ans de réclusion criminelle et doivent également payer chacun, la somme de 4,5 milliards de FCfa. Ils doivent solidairement payer à l’Etat 60 milliards de FCfa pour les préjudices subis. La Cour a en outre ordonné la restitution au profit de l’Etat de la somme de 1,5 milliard de FCfa saisie au domicile de Oswald Homéky. Elle a également ordonné de même, les 55 millions de FCfa dans les livres de la Nsia Assurances Côte d’Ivoire et la saisie du véhicule 4X4 dans lequel les sous ont été entreposés. Les accusés disposent de 15 jours pour faire appel de ce jugement.
Acquittement des trois co-accusés
En ce qui concerne les co-accusés Corneille Gbaguidi, gérant d’une société appartenant à Rock Nieri, dont le nom est cité dans l’affaire et Ganiou Sanoussi, chauffeur de Oswald Homeky, ils ont été purement et simplement acquittés. Quant au sieur Crépin Ilélikouwa N’gbekinho Hugues Adjigbékoun, il a été acquitté au bénéfice du doute.
Gabin Goubiyi