L’ex-chef de l’Etat veut porter entorse au déroulement normal du calendrier électoral et embrouiller le processus électoral en cours depuis quelques semaines au Bénin. Dans un message intitulé « Mon appel au peuple pour le dialogue et le consensus dans la gestion des affaires de notre cité commune » posté hier, mardi 9 février 2021, sur sa page Facebook, Yayi Boni a lancé un appel au dialogue pour un consensus assorti des élections inclusives à deux mois du scrutin. Une initiative non innocente qui est de nature à reproduire le scénario des Législatives du 28 avril 2019.
(Les autorités doivent prendre leurs responsabilités pour éviter le scénario de 2019)
L’ancien président de la République veut rééditer son funeste projet de bloquer le processus électoral comme ce fut le cas lors des élections législatives du 28 avril 2019. Alors que les regards sont en ce moment tournés vers la Commission électorale nationale autonome (Céna) pour la publication de la liste provisoire des candidats à l’élection présidentielle prochaine, c’est un message sur Facebook que l’ex-président de la République a offert aux Béninois. Dans son post, Yayi Boni s’est adressé aux Béninois et à la classe politique. Il les invite à deux mois de la Présidentielle, au dialogue et au consensus « dans la gestion des affaires de notre Cité commune ». Ce message expose clairement les ambitions de l’ex-président de la République. Il s’agit d’enrhumer le processus électoral pour semer le bordel de 2019 à l’issue des élections législatives où le Bénin, pour la première fois de son histoire, a organisé une consultation électorale assortie de pertes en vies humaines. Objectivement parlant, quel dialogue peut-on tenir avec autant d’acteurs à deux mois de la Présidentielle ? Le consensus dont parle le prédécesseur de Patrice Talon à La Marina ne pourra avoir droit de cité. Et pour cause ! Le parti « Les démocrates » dont il est le président d’honneur est dans sa logique de voir le Bénin se conformer à l’un des arrêts de la Cour africaine des droits de l’homme qui demande à l’Etat béninois qui demande de mettre de côté la Constitution modifiée de 2019 ainsi que les lois qui sont issues de cette réforme. Une logique que beaucoup voient comme une stratégie de fuite en avant dont l’ultime but est de pousser le pays dans un vide juridique. De toutes les façons, en matière de dialogue et de consensus, Yayi Boni n’est pas un modèle à suivre. En 2011 pour mémoire, lorsque certains ne voulaient pas de la Liste électorale permanente informatisée (Lépi), le dialogue avait été exigé à travers des initiatives telle « Mercredi rouge ». Malgré les protestations dans les rues du pays, le régime d’alors n’avait pas entendu raison. Si c’est ce dernier qui vient parler de dialogue, il faut vraiment vivre longtemps pour voir des choses dans la vie. L’ancien chef de l’Etat est donc mal placé pour exiger aujourd’hui le dialogue. Encore que, l’occasion a été offerte à plusieurs reprises par le président Patrice Talon pour que ledit débat se tienne et que les divergences soient aplanies. Yayi et ses thuriféraires ont préféré pratiquer la politique de la chaise vide. La première occasion offerte sur un plateau d’or est le dialogue politique tenu en octobre 2019. Neuf formations politiques, y compris des membres de la Force cauris pour Bénin émergent (Fcbe) (opposition), étaient présents aux travaux de ces assise convoquées par le président Talon pour sortir de la crise politique que traversait le pays depuis les Législatives d’avril 2019. Au lieu d’y participer, une frange de l’opposition tenait a choisi d’organiser les « assises de la résistance » à l’autre bout de Cotonou. La deuxième occasion est celle de la main tendue du chef de l’Etat à son prédécesseur lors de la tournée présidentielle. En effet, à Parakou, Patrice Talon a investi les sages pour que les deux frères puissent fumer le calumet de la paix. En lieu et place, ce sont des collaborateurs de l’ancien président de la République notamment Alassani Tigri qui a fixé les conditions à remplir d’abord. C’est après cet épisode que Yayi Boni même sort de son mutisme pour affirmer qu’il n’a pas de problème avec son frère Patrice Talon et que ce dernier doit se réconcilier avec son peuple. Jusqu’aujourd’hui, toutes les initiatives émanant du pouvoir en place ont été plombées du fait de la mauvaise foi de Yayi Boni et des siens. Demander donc aujourd’hui un dialogue prouve combien de fois Yayi et ses collaborateurs manquent de sérieux.
Attention danger !
Le débat sur le réajustement du mandat présidentiel qui a été rangé, est ramené exprès sur tapis avec une exigence comme quoi le « prochain président démocratiquement élu devra prêter serment le 6 avril 2021 à Porto-Novo devant le peuple qui l’aura librement choisi ». Sans être député encore moins président de la Cour constitutionnelle, l’ex-chef de l’Etat se permet de rappeler que « le mandat du président Talon prend bel et bien fin le 5 avril 2021 à 00 h 00 mn 00 conformément à son serment le 6 avril 2016… ». Mais ce qu’il a oublié de dire, c’est que c’est la Constitution de 1990 qui prescris la date d’entrée en fonction du nouveau président de la République a été modifiée. C’est donc la Constitution révisée qui par souci d’organisation d’élections générales a réajusté le mandat présidentiel en y ajoutant 45 jours. Il ne s’agit pas d’une volonté de président Talon. Dans le rang des anciens collaborateurs de Yayi Boni, des voix doivent enfin s’élever pour le stopper dans ses élans et le ramener à sa place. Le statut d’ancien chef de l’Etat ne doit pas amener le successeur de Mathieu Kérékou à La Marina à agir de la sorte et à dire des énormités. Il est temps que la sagesse l’anime comme l’a si bien compris Nicéphore Soglo qui, depuis quelques jours, évite de s’offrir en spectacle. Au pire des cas, les autorités seront obligées de prendre les responsabilités pour éviter de plonger le pays dans une crise inutile.