Le gouvernement du Bénin a entrepris des réformes importantes et déployé des moyens considérables dans l’enseignement supérieur pour rendre le système plus performant. Il est principalement question de rénovation du système de gouvernance, de pallier le déficit d’enseignants et bien d’autres.
L’Etat du Bénin veut repositionner l’école dans les valeurs et ambitions de la société béninoise. Le gouvernement annonce un plan spécial de recrutement de 1.600 enseignants d’ici 2026 pour le compte des universités publiques. En avril 2016, l’effectif du personnel enseignant du supérieur était estimé à 1403. En deux ans (2016 à 2018), 178 enseignants ont été recrutés et un recrutement de 100 enseignants par an sur 5 ans a été entériné pour relever l’effectif d’enseignants. Il sera incessamment effectif avec les prochains recrutements planifiés pour lesquels les candidatures sont déjà enregistrées sur la plateforme dédiée.
Un mode de recrutement plus crédible et plus efficace
Jusqu’en 2017, le processus de recrutement des enseignants des Universités publiques s’assimilait plutôt à une cooptation. Une telle méthode ne valorisait pas forcément les plus méritants et affectait d’ailleurs négativement la qualité de la formation des étudiants. Il a donc été décidé de la mise en place d’une plateforme pour l’inscription au fichier national des aspirants au métier d’enseignant du supérieur, car au-delà d’un simple devoir de délivrance des cours aux apprenants, il devient urgent de mettre en place un processus assez transparent, libre et performant qui passe au filtre les futurs enseignants du supérieur, aptes et très responsables vis-à-vis des apprenants. Dès lors, tout processus de recrutement d’assistants se nourrit de tels profils disponibles dans un fichier. Cela met hors des Universités, des personnes désirant tenter leur chance en attendant de trouver mieux ailleurs. La preuve, une première expérience a confirmé la règle avec plus de 4000 postulants inscrits et environ 1500 candidats jugés éligibles au prochain recrutement d’assistants au profit des Universités publiques au titre de 2024.
Professionnalisation des formations
Jusqu’en 2016 et au-delà, il est fait grief à notre enseignement supérieur de beaucoup plus former au chômage ou au sous-emploi. Depuis la rentrée 2016-2017, le gouvernement a donc créé les Instituts Universitaires d’Enseignement Professionnels dont l’objectif est de dispenser une formation supérieure courte et focalisée sur les besoins économiques du pays. C’est une innovation car il s’agit d’une formation universitaire de type nouveau, orientée vers des corps de métier, plus pratique que théorique et qui ne dure que 2 années académiques à l’issue desquelles est décerné un diplôme, le Diplôme Universitaire de Technologie (Dut-Métier). On a dès lors des ressources humaines qui proviennent de l’université et qui savent faire quelque chose de leurs mains et surtout dans les domaines prioritaires de l’économie nationale. Cette innovation au niveau du supérieur a déjà été mise en œuvre à Djougou et forme les jeunes aux métiers d’entrepreneur agricole. A l’horizon 2030, au moins 5 000 jeunes seront impactés dans des secteurs prioritaires ouvrant sur une perspective d’emploi avérée.
Cité internationale de l’innovation et du savoir
Dans la dynamique d’avoir des offres de formation focalisées sur les besoins économiques du pays mais aussi sur les défis du monde actuel et futur, le Gouvernement a créé un campus hub qui servira de catalyseur pour les formations innovantes. Cette vision est portée par la Cité internationale de l’innovation et du savoir : Sèmè City qui offre des formations de pointe dans de nombreuses disciplines à débouchés professionnels sûrs, sans avoir besoin d’aller en Europe ou en Amérique. Ce centre offre aux jeunes béninois en particulier et aux africains en général une opportunité unique de se former, d’entreprendre, d’expérimenter et d’innover au sein d’un cadre dynamique et stimulant où toutes les ressources sont réunies afin qu’ils repensent collectivement l’Afrique de demain. Aujourd’hui, de par son rayonnement mondial, Sèmè City est une fierté nationale et sa réputation ne fera que grandir. Avec les nombreux partenariats mis en œuvre, nous entendons créer grâce aux formations dispensées par Sèmè City, plus de 100 000 emplois, dont au moins 1/3 d’auto-emplois avec 40 % de femmes.
Institutionnalisation et organisation des examens de Licence et de Master
L’état des lieux en 2016 était que l’on doutait de la qualité des diplômes délivrés par certains établissements d’enseignement supérieur du Bénin. L’environnement était tel que les textes en vigueur dans le secteur depuis 2008 n’étaient pas vraiment respectés et la perception qu’avait l’opinion publique des établissements privés d’enseignement supérieur (Epes) n’était pas bonne. Les parents investissaient beaucoup, mais n’étaient même pas sûrs que leurs enfants reçoivent des formations de qualité et obtiendraient des diplômes reconnus par l’Etat. Depuis 2016, des réformes ont été effectuées pour mettre les Epes aux normes. Dans le même temps, des examens nationaux sont organisés pour sanctionner les formations données par ces Eps, délivrer des diplômes d’Etat. De 2017 à 2023, le nombre de candidats inscrits aux examens nationaux de licence est de 41 668 et le nombre d’admis est de 26.980, soit un taux de réussite de 64,75%. Pour ce qui concerne le Master, sur 6.715 candidats inscrits, 4.667 sont admis, soit un taux de 69,5%. Les diplômes délivrés à l’issue de ces examens sont exemptés d’équivalence ou de cosignature et permettent aux apprenants des établissements privés d’enseignement supérieur de postuler à des emplois ou à des opportunités au même titre que ceux des Universités publiques du Bénin. Au regard de la satisfaction générale qui s’est dégagée de l’expérience menée au cours des 7 années écoulées, il a été décidé d’institutionnaliser lesdits examens. A terme, il s’agit de veiller à l’amélioration continue de la qualité de la formation au niveau des établissements privés, notamment à travers l’organe de contrôle de qualité et la dématérialisation des examens nationaux pour certaines filières.
Gouvernance du secteur de la recherche
Le sous-secteur de la recherche scientifique et de l’innovation a souvent été perçu comme le parent pauvre du secteur. Avant 2016, le diagnostic de ce sous-secteur aura révélé : un cadre institutionnel, législatif, réglementaire et de pilotage inopérant, des ressources humaines et financières insuffisantes et mal attribuées ; un accompagnement insuffisant du secteur pour la réalisation des objectifs de développement du pays ; des infrastructures et les équipements obsolètes ou insuffisants. Afin de permettre à ce sous-secteur de contribuer efficacement au développement du Bénin, le gouvernement a déjà conçu un document de politique disponible depuis 2022. Il sera bientôt mis en place une agence assez autonome pour impulser une nouvelle dynamique en matière d’organisation, de financement et de promotion de la recherche au Bénin.
Sergino Lokossou