(« Depuis 2016, le président Boni Yayi s’emploie à faire échec à toutes les réformes que j’entreprends « )
Le président de la République du Bénin, Patrice Talon, était l’invité d’une émission spéciale sur la télévision nationale ce mardi 4 novembre 2025. Face au journaliste Serge Ayaka de la radio nationale, le chef de l’État s’est longuement exprimé sur la situation politique du pays, la réforme du système partisan et les tensions préélectorales.
Interrogé sur le climat politique actuel, Patrice Talon a reconnu que la dynamique électorale « ne l’enchantait pas du tout », estimant qu’elle portait « préjudice à l’image du pays ». Cependant, il a rejeté catégoriquement que la responsabilité des déboires subis par certains partis politiques ne soient jetée sur la réforme du système partisan ou sur le Code électoral. « Les difficultés rencontrées par certains partis politiques ne sont pas dues aux textes en vigueur, mais à des choix politiques internes », a-t-il déclaré, en référence au parti Les démocrates, dirigé par l’ancien président Boni Yayi. Pour la première fois, le président Talon est revenu en détail sur les événements ayant conduit aux élections législatives controversées de 2019. Selon lui, Boni Yayi aurait personnellement bloqué un consensus trouvé entre les forces politiques pour adapter les textes électoraux. « Tous les acteurs politiques représentés au Parlement avaient signé un accord le 18 mars 2019, mais le président Boni Yayi a refusé de l’approuver, empêchant ainsi la mise en œuvre du consensus », a expliqué Talon. Il affirme que cette décision a conduit à la tenue des Législatives sans l’opposition, à l’origine du Parlement qualifié de « monocolore » et des violences électorales qui ont suivi.
Les démocrates : un parti créé sur fond de vengeance
Patrice Talon a également retracé la genèse du parti Les démocrates, issu selon lui d’une « scission au sein des Forces cauris pour un Bénin émergent(Fcbe).Il rappelle que la participation des Fcbe au dialogue politique d’octobre 2019 a été mal vue par Boni Yayi, qui aurait tenté d’exclure les cadres favorables à l’ouverture. « C’est cette exclusion qui a conduit à la création des Démocrates », a-t-il précisé. Évoquant la réforme du code électoral, le président a défendu les seuils et les dispositions actuelles, qui, selon lui, « encouragent les partis à rester unis et à collaborer ». « Abaisser les seuils aurait favorisé l’éclatement des partis en une multitude de petites formations, comme par le passé », a-t-il justifié. Talon a rappelé que Les démocrates ont pu participer aux Législatives de 2023 et décroché 28 sièges avec les mêmes textes, preuve selon lui que « la loi n’exclut personne ». Le chef de l’État a reproché à l’ancien président Boni Yayi, d’avoir interdit à ses députés de voter le budget 2025, malgré l’intégration de la quasi-totalité de m leurs propositions. « Les démocrates avaient fait des observations pertinentes, presque toutes retenues par le gouvernement. Mais au moment du vote, ils ont fait le contraire de ce qu’ils avaient demandé, sur instruction de leur chef », a-t-il déploré. Concernant la présidentielle de 2026, Patrice Talon s’est dit « malheureux » que le parti Les Démocrates n’ait pas pu présenter de candidat. Selon lui, la situation aurait pu être évitée si le parti avait accepté de signer un accord de gouvernance avec la Fcbe, comme le permet la loi électorale. « Les Démocrates pouvaient obtenir les parrainages nécessaires grâce à un partenariat avec la Fcbe, qui dispose de six ou sept parrainages. Ils ont choisi de marcher sur le fil du rasoir, et en tombant, ils cherchent encore un bouc émissaire », a-t-il regretté.
Patrice Talon a profité de l’occasion pour lancer un appel à l’unité et à la maturité politique : « Le Bénin ne peut pas continuer à se construire dans la confrontation permanente. Nos besoins sont communs : eau, santé, éducation, emploi. Il faut apprendre à travailler ensemble, même après les élections. » Il a réaffirmé sa volonté de voir émerger une classe politique capable de dialogue et de collaboration, au-delà des clivages partisans.
Léonce Adjévi



















