C’est un fait de violation de droits de la défense et de droits de l’homme commis sur un avocat qui a été porté à la connaissance du public le week-end écoulé. Au moyen d’une note d’information qu’il a rendue publique samedi 06 novembre 2021, le Conseil de l’ordre des avocats du Bénin, a dénoncé l’interpellation d’un des leurs le 29 septembre 2021, lequel aurait été violenté et placé arbitrairement en garde à vue pendant sept heures d’horloge. Faux, rétorque un responsable de la police qui dénonce un dilatoire.
Les faits datent du 29 septembre dernier. Selon le communiqué de l’Union des jeunes avocats du Bénin (Ujab), Me Enosch Chadaré, membre de ladite organisation, se serait rendu à Ekpè pour assister un client impliqué dans le sulfureux dossier de saisie de 2,5 tonnes de cocaïne. Mais les choses semblent avoir mal tourné pour le jeune avocat qui, d’après le rapport des faits, aurait été « interpellé avec violence par les agents de la Police et conduit manu militari au Commissariat de Police où il a été gardé à vue de 16 heures à 23 heures, en violation de toutes les règles légales en la matière. ». Pour l’Ujab, il s’agit d’un énième cas grave d’atteinte à la respectabilité et à la dignité de la profession d’avocat qu’il faudra décourager. Appréciant la situation au cours de l’Assemblée générale extraordinaire qu’il a tenue à Cotonou le samedi 06 novembre 2021, le Conseil de l’ordre des avocats du Bénin a, de son côté, marqué son indignation face au silence des autorités qu’il a dûment saisies du dossier. La note d’information rapporte qu’à ce jour, les fondements ni factuels, ni juridiques de ces agissements n’ont pu être établis par les organes de poursuite. C’est justement là le hic puisque le barreau soutient que ses nombreuses démarches à l’effet d’être situé sur les raisons qui motivent ces « abus » dont a été victime un de ses membres se sont heurtées à un mur de silence de la part des autorités politico-judiciaires. Cette indifférence qui s’apparente à l’interdiction faite à un enfant de pleurer après l’avoir tapé, est mal perçue par les avocats. Elle semble être la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.
« Un canular », selon un responsable de la Police
Contacté par le groupe de presse « Le Matinal » pour recueillir sa version relativement aux faits dénoncés, la hiérarchie policière a balayé du revers de la main, les accusations portées à son encontre. Selon un haut gradé de la Police républicaine, il s’agit là d’un canular, d’un dilatoire pour discréditer la Police. Il soutient, au regard de l’ « Epée de Damoclès » qui plane constamment sur les forces de défense et de sécurité, qu’il est impensable qu’un policier prenne l’initiative d’agir sans respecter les textes en vigueur. Mieux, le responsable de la Police républicaine affirme que les forces de sécurité s’emploient à jouer leur rôle avec abnégation et professionnalisme. Il soutient par ailleurs que l’avocat s’est présenté après un gel des lieux. Un paramètre qui rend matériellement impossible la mission d’assistance de l’avocat. Il suggère au conseil de l’Ordre du barreau des avocats du Bénin de s’en remettre aux autorités compétentes s’il détient les preuves suffisantes à l’appui des dénonciations évoquées.
Des poursuites annoncées contre les auteurs de bavures
Pour protester contre ce qu’elle qualifie de violation des droits de l’homme et de mépris de l’avocat dans l’exercice de sa profession, les hommes en robe noire, ont décidé d’observer un mouvement de grève de 72 heures pour défendre la dignité collective du Barreau et son indépendance. Le mouvement de grève annoncé se traduira par un boycott de toutes les audiences devant les juridictions sur l’ensemble du territoire national pour compter de ce lundi 08 novembre au mercredi 10 novembre inclus. En sus de ce débrayage, le conseil de l’Ordre se réserve le droit de poursuivre par voie de justice, les auteurs des violences physiques et morales, de traitements inhumains et dégradants à l’encontre de leur collègue. Dans un entretien qu’il a accordé au groupe de presse « Le Matinal », le président de l’Union des jeunes avocats du Bénin, a en effet confirmé la volonté des avocats d’aller loin dans la procédure. « Il est prévu qu’il y ait des actions en justice contre tous les agents ou auteurs de cette situation que nous dénonçons. C’est d’ailleurs parce que nous avons envisagé dès le départ de mener des actions que nous avons pris ce temps. Vous n’êtes pas sans le savoir, un avocat, c’est des procédures et les procédures, c’est les preuves. Nous avons pris le temps de documenter la situation pour que les personnes concernées n’effacent pas éventuellement les traces », a laissé entendre Brice Houssou.
Gabin Goubiyi