Depuis hier, lundi 20 janvier 2025, Donald Trump, 78 ans, champion des Républicains, a signé, officiellement son «come-back», en tant que 47e président des Etats-Unis. Un retour qui, il faut le reconnaître aura, d’une manière ou d’une autre, un impact certain sur la configuration politico-économique, et surtout militaire, mondiale : guerres en Ukraine et dans la bande de Gaza, forte poussée hégémonique de la Chine. Si les Africains, pour qui, Barack Obama, leur frère de couleur, d’origine kényane, alors 44e président, n’a pas pu leur ouvrir grandement les portes des vastes et vertes prairies américaines, ce ne sera, certainement pas, le prédécesseur et successeur de Joe Biden qui le fera. Pour nombre d’observateurs, il est tant que les Africains s’affranchissent totalement de l’aide étrangère, et s’appuient sur leurs propres ressources pour occuper une position de choix dans le concert des nations. Les dirigeants africains, à ce titre, doivent offrir le mieux-être social à leurs populations pour leur éviter la tragédie de l’immigration clandestine. Tendre la sébile n’a jamais développé un pays. Les Africains doivent chercher à compter sur leurs propres forces. Et, si Donald Trump les a qualifiés de «pays de merde», cela ne doit plus soulever des réactions purement émotionnelles, parfois puériles, mais fouetter l’orgueil des pays africains, afin qu’ils répondent en actes propices au développement et dire aussi « Africa first ».
Serge Winner Abbecy, chercheur à Hartford University Connecticut : «Donald Trump est un homme qui a ses défauts »

« Ce qui s’est joué sous nos yeux, c’est du Alexandre Dumas, le comte de monte cristo. Nous avons tous vu le come-back, la revanche d’un homme, parce que nous venons de loin. Il faut se souvenir que son élection en 2016 avait été contestée, qu’il a eu deux tentatives d’impeachment de renversement au cours de son mandat. Qu’il était isolé le 6 janvier dernier, qu’il avait été combattu par tous, que les médias et l’establishment s’étaient ligués largement contre lui, qu’on l’avait enterré. Ensuite, il a connu une traversée de désert. Personne ne pariait sur son retour. Il a connu 02 procès au pénal, 19 inculpations, une tentative d’assassinat presque réussie le 13 juillet dernier, 2 autres dont on a peu parlé. Donald Trump a fait campagne avec énergie et détermination, 900 réunions électorales et il a réussi quelque chose d’historique. C’est historique en ce sens que c’est seulement la seconde fois en 230 ans et en 60 élections présidentielles qu’un président battu une première fois est revenu quatre ans après. Le précédent c’était Grover Cleveland 22ème et 24ème président élu en 1884 battu en 1888 et de retour à la Maison Blanche en 1892. Trump a réussi le grand chelem. Une victoire républicaine au Sénat et peut-être une victoire au Congrès mais surtout une victoire dans le vote populaire. Ce n’est pas arrivé depuis 1992 à l’exception de 2004, la réélection de Bush. Il n’est pas arrivé qu’un républicain gagne une présidentielle avec le vote populaire. Il faut se souvenir qu’il a perdu le vote populaire en 2016, qu’il a perdu à nouveau en 2024. En 2016, il a été élu grâce au vote des grands électeurs, donc la victoire par Etat. Il faut rappeler que pour être élu, il faut 270 grands électeurs sur les 538. C’est la victoire de la vérité sur l’idéologie, du concret. Quelqu’un disait que la réalité c’est quand on se cogne. L’Amérique est en proie à de grandes difficultés sous l’administration Biden. Grandes difficultés en ce sens que l’inflation a explosé. Tout le monde connait l’inflation à travers la planète. Le Covid, la guerre en Ukraine. Mais ici aux Etats-Unis, il y a des causes beaucoup plus endogènes. Les Démocrates, quand ils sont allés au pouvoir en 2020, ils ont limité l’exploitation du pétrole. Il faut savoir que les Etats-Unis ont les premières réserves de pétrole et de gaz dans le monde, davantage que l’Arabie Saoudite et la Russie. Il y avait un boom du secteur pétrolier. Mais au nom des accords de Paris, au nom de la lutte contre le réchauffement ou ce qu’ils appellent le dérèglement climatique, ils ont décidé de limiter l’exploitation du pétrole provoquant de fait une hausse des prix. Nous avons connu plus de cent pour cent d’augmentation des prix du pétrole dans ce pays, de l’essence ou du gasoil. Il faut savoir que c’est un pays très grand, que les villes s’étendent et les Etats s’étendent à perte de vue et qu’il n’y a pas de transport en commun. Tout le monde ici ou presque roule en voiture. Donc, quand vous avez un doublement des prix en une année, ça fait très mal au portefeuille. Les Américains ont voté cette fois-ci avec leurs portefeuilles et leurs caddies. Leurs caddies parce que l’inflation a été absolument insoutenable. Je parlais du prix du pétrole, ça a baissé un peu ces dernières semaines à la veille des élections. Les prix des produits de première nécessité ont explosé, il n’y a pas du tout une maîtrise. On ne demande pas au gouvernement de fixer les prix. On n’est pas en Corée du Nord ou en Union Soviétique ou à Cuba ou au Venezuela. Mais il y a quand même une politique commerciale qui devrait permettre de soutenir les salaires et de contenir les prix. L’immobilier est devenu inabordable, les prix ont explosé. Parce qu’il n’y a pas une politique qui favorise la construction de nouvelles maisons. Il n’y a pas beaucoup de nouvelles maisons sur le marché, donc les prix ont explosé. Les murs porteurs de la politique de l’administration démocrate ont été un accent mis sur le droit des minorités, en ce que le premier décret que le président Biden a signé en arrivant au pouvoir portait sur les toilettes non genrées. Je vous parle d’un pays où il y a de graves problèmes sociaux ou énormément de gens dorment dans la rue, y compris en hiver, où les gens ont du mal à boucler leur fin du mois. La première des préoccupations de l’administration démocrate a été de favoriser les droits des lgbt. Je n’ai rien contre les lgbt. Ça ne peut pas devenir le cœur d’une politique et l’autre chantier a été de promouvoir la trans-identité. Favoriser les questions de changement de sexe. Le droit à l’avortement est devenu l’étendard, l’axe de fixation de la politique démocrate. Et tout ce qui est politique (avortement, euthanasie) de mort a été promu au nom des droits individuels, la famille a été déconstruite en ce qu’elle a de conceptuelle. Et au bout de tout ça, puisqu’ils n’ont de programme à vendre, ils ont vendu aux Américains la figure d’un Donald Trump démonisé affublé de la figure du diable. Ils ont passé leur temps à semer la peur. Voilà on ne peut mentir à un peuple tout le temps. L’élection de Donald Trump, c’est la victoire d’un homme qui a ses défauts, qui n’est pas fin, qui n’est pas raffiné, mais qui a un bilan. Son bilan c’était une économie en parfait état de croissance forte. Son bilan, c’était une politique internationale fondée sur la paix et le règlement des conflits. Je rappelle les accords d’Abraham pour pacifier le proche et le moyen Orient. Il est allé jusqu’à tendre la main à un Etat toxique comme la Corée du Nord »
Landry Angelo Adélakoun, juriste, consultant en droits humains, analyste politique : « L’Afrique n’était pas sa priorité »

«Je ne pense pas que l’Afrique ou encore les Africains trouvent quelque chose à gagner de façon particulière dans le ‘’come-back’’ du président Donald Trump parce qu’il s’agit d’abord de l’élection du président des Etats-Unis. C’est vrai qu’il s’agit de la première puissance mondiale qui essaie quand même d’imprimer une dynamique à la politique étrangère. Ce qu’il faut retenir, c’est que Donald, avec son élection en 2016, avait affiché une politique claire vis-à-vis de l’Afrique. Il a essayé d’asseoir sa politique sur le néo-isolationnisme, ce qui a fait qu’il a mis l’Afrique complètement dans une autre dynamique. L’Afrique n’était pas sa priorité, la preuve il n’a jamais visité l’Afrique durant son mandat contrairement à ses prédécesseurs. Il n’a reçu à la Maison Blanche que deux présidents africains, notamment de la région Anglophone. Le président du Kenya et le président du Nigeria à l’époque le président Buhari et le président Uhuru Kenyatta. Il n’intervenait pas trop dans les questions africaines. Il a même tenu des propos qui ont été mal appréciés par les Africains. Pour lui, l’Afrique n’est pas sa priorité et je pense qu’il va continuer dans la même logique. Sa priorité d’abord, c’est le nationalisme, l’unilatéralisme et aussi le bilatéralisme avec certains Etats. Il n’y a pas grand-chose à gagner pour les Africains, si ce n’est que l’autonomie. Ça permet aux Africains de comprendre que leur destin est entre leurs mains et l’Afrique doit davantage comprendre qu’elle n’appartient qu’à elle-même. Je vois quelques éléments de perte sur la question de planification familiale et les questions de minorité, je veux parler de minorité genre et minorité sexuelle, les questions d’avortement sécurisé également. Sur ces leviers-là, les Etats-Unis étaient le plus grand pourvoyeur qui finance ces questions-là. L’Afrique peut avoir une enveloppe restreinte parce que la philosophie du président Donald Trump est aux antipodes de la promotion de la planification familiale, de la promotion des Lgbtq+ et de la promotion de l’avortement sécurisé. Donald Trump est contre tous ces éléments-là. Il est fort probable qu’il y ait un certain nombre de limitations. Ce que l’Afrique peut gagner, c’est par rapport aux foyers de conflit sur le continent, notamment les pays de l’Afrique de l’Ouest, le Sahel surtout, on peut voir une autre ouverture, une autre politique vis-à-vis de ces États-là de la part du président Donald Trump. »
Julien Roland Déguénon, communicant, promoteur du média en ligne Nokwe 24 : « La réélection de Trump doit être une chance pour les peuples africains »

« Je suis tenté de dire que l’Afrique est à la croisée des chemins. Vous n’êtes pas sans savoir que nous sommes actuellement dans une ère où un vent de souverainisme et d’autodétermination souffle sur le continent. En témoignent les sentiments anti-occident que nous notons notamment au niveau de la jeunesse africaine. Et donc, nous avons déjà vu quatre ans durant, Donald Trump pilotant les destinées des États-Unis. Son élection ne va rien apporter de nouveau en réalité. Je pense que c’est une chance pour les peuples africains de se dire voilà, c’est le moment de se prendre en charge. Parce que vous n’êtes pas sans savoir que nous notons une avancée des extrêmes, des partis extrémistes, que ce soit en France ou aux États-Unis. Si en France, ils n’ont pas pu accéder au pouvoir, nous notons qu’ils ont vraiment le vent en poupe. Avec l’élection de Trump, un pur nationaliste qui a surfé sur le « America First » pour se faire élire, je pense que ça doit être une inspiration pour les peuples africains afin qu’ils se disent que leur développement, leur épanouissement ne viendra pas d’ailleurs. Il s’agit pour les Africains de se dire que le développement est endogène. Les présidents américains, qu’ils soient démocrates ou républicains, travaillent d’abord pour les Américains. Nous devons savoir qu’en relations internationales, les pays n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts. Il est temps pour l’Afrique de se dire, quels sont mes intérêts dans mes relations avec les autres? Contrairement à ce qui se dit, la réélection de Trump doit être une chance pour les peuples africains afin que ces derniers se disent Africa First. »
Propos recueillis par Sergino Lokossou