La drépanocytose désigne un groupe de maladies sanguines héréditaires dont les symptômes sont l’anémie et l’obstruction des vaisseaux sanguins. Environ 80 % des cas de drépanocytose dans le monde surviennent en Afrique subsaharienne. Le manque d’accès à des soins de santé complets dans la région aggrave le fardeau de la maladie. Au Bénin, le gouvernement ne tarit pas d’ingéniosité pour alléger la souffrance des personnes et des familles au sein desquelles le mal sévit.
Considérée à tort comme une malédiction, la drépanocytose est une maladie génétique particulièrement fréquente au sein des populations d’origine antillaise, africaine et méditerranéenne. Selon Docteur Constant Vodouhè, la drépanocytose est une maladie génétique due à la présence d’une hémoglobine anormale dont le principal rôle est le transport de l’oxygène dans nos tissus. Il va ajouter plus loin que les personnes atteintes ont des parents qui portent le gène de la maladie. Ces derniers transmettent à l’enfant une mauvaise partie de leur gène. On dit que les parents sont porteurs sains et l’enfant qui est atteint est SS. L’hémoglobine anormale S peut dans des conditions de stress ou de fatigue par exemple, se polymériser, déformer les globules rouges en forme de faucilles. Ils vont alors obstruer les micro-vaisseaux et déclencher de vives douleurs chez le malade. On dit que la personne est en crise vaso-occlusive.
Un dépistage précoce sauve des vies
Le diagnostic de la drépanocytose se fait par un examen appelé électrophorèse. Il permet de savoir si l’individu est sain AA, porteur AS ou malade SS. Il existe aussi les formes C (les globules rouges deviennent rigides et collants et prennent la forme d’un outil agricole en forme de C appelé faucille) et bêta thalassémie, dues à un déficit plus ou moins complet de synthèse de la chaîne β de l’hémoglobine (Hb). L’arrivée d’un nouveau-né au monde est souvent synonyme de joie intense pour les parents, après des mois d’attente. Mais le diagnostic d’une maladie à la naissance, telle que la drépanocytose, peut modifier la dynamique familiale au moment les nouveaux parents s’y attendent le moins. L’Organisation Mondiale de la Santé (Oms) reconnaît la drépanocytose comme une priorité de santé publique. L’Afrique compte plus de 200 000 bébés qui naissent chaque année avec la drépanocytose. Environ 80 % des drépanocytaires dans le monde sont nés en Afrique subsaharienne. Sans traitement, plus de la moitié des enfants meurent avant l‘âge de 5 ans. Le dépistage des nouveau-nés et le diagnostic annuel avec des soins complets améliorent le taux de survie et le Bénin veut s’inscrire au rang des pays qui disposent de centres de traitement de la drépanocytose y compris des installations de dépistage des nouveau-nés.
Défi
Bien qu’elle affecte des millions de personne de par le monde, la drépanocytose reste un défi majeur pour tous. Selon les experts, c’est un défi majeur pour la communauté médicale et scientifique. Des progrès remarquables sont faits. La tenue d’un congrès international à Cotonou est une opportunité unique de partager les dernières avancées et d’échanger sur les dernières trouvailles. Le drépanocytaire doit boire suffisamment d’eau pour garder une bonne hydratation. C’est son premier « médicament ». Il existe des traitements quotidiens dont l’antibiothérapie à dose prophylactique, un médicament pour stimuler la production de globules rouges. Lorsque le malade est en crise, on utilise des antidouleurs pour le soulager. En général, on traite tous les symptômes liés à la maladie. Des molécules sont utilisées et peuvent espacer les crises mais les coûts sont élevés pour nos populations. Il existe également des traitements curatifs notamment la greffe de moelle osseuse ou du sang du cordon. Les résultats concernant la greffe sont très intéressants. Récemment, des techniques de thérapie génique ont été également développées. La thérapie génique consiste à introduire du matériel génétique dans des cellules pour soigner une maladie. « En tant que ministre en charge de la famille, il est de mon devoir de souligner l’importance de prendre en compte la dimension sociale dans notre approche de lutte contre cette maladie. La drépanocytose bien que connue pour ses effets physiques dévastateurs entraine également des conséquences sociales profondes. Elle augmente la vulnérabilité des personnes touchées qui deviennent parfois marginalisées exacerbant ainsi les inégalités socio-économiques ». Les défis des familles touchées sont multiples selon Véronique Tognifodé ministre des affaires sociales et de la microfiance. Les absences répétées à l’école, les enfants malades, la difficulté pour les parents de concilier soins et emploi sans parler des coûts financiers liés aux traitements et à la prise en charge médicale. Il est donc impératif de comprendre qu’au-delà des enjeux de santé publique, la drépanocytose est aussi un problème de justice sociale. Les familles économiquement fragiles subissent une double peine. Les frais médicaux représentent une charge écrasante aggravée par la nécessité de réduire ou d’abandonner transitoirement ou temporairement des activités professionnelles pour s’occuper des malades. C’est pour cette raison que la réponse contre cette maladie doit être globale et non limitée à des médicales. A cet effet, les frais de prise en charge de la drépanocytose en projet intègre à souhait une maison d’accueil des parents qui ont une vocation d’écoute et de soutien psychologique et social. Les familles vivent dans une incertitude permanente par rapport à cette maladie chronique et le soutien psychologique est donc crucial pour alléger leurs charges mentales et continuer à vivre avec dignité. Sur le plan économique, les conséquences de la drépanocytose vont au-delà des familles directement touchées. En effet, la productivité nationale est impactée en des arrêts de travail fréquent et la baisse de de la capacité à participer pleinement à la vie active. Notre devoir est d’évaluer et de minimiser cet impact grâce à des programmes spécifiques de soutien à l’emploi pour les jeunes malades notamment. La lutte contre la drépanocytose nécessite également une approche solidaire aux échelles sous régionale et internationale. Cette maladie qui touche principalement nos régions déjà vulnérables sur le plan économique et nous devons donc unir nos forces pour répondre aux défis qu’elle pose. La coopération internationale est donc essentielle pour soutenir la recherche mais aussi pour mettre en place des politiques sociales économiques adaptées à nos réalités. Afin d’accompagner les actions du gouvernement dans le cadre de la lutte contre la drépanocytose, la Fondation Claudine Talon met bientôt en place, un centre national intégré de prise en charge des patients. Cette ambition de la Fondation que préside la Première dame du Bénin selon le ministre de la santé, permettra non seulement de renforcer les soins actuellement fournis aux enfants mais aussi d’intégrer dans une approche multidisciplinaire et holistique la prise en charge de tous les patients, du nouveau-né à l’adulte y compris la femme enceinte ainsi que le développement et la conduite de projets de recherche innovants. « Ce centre permettra de renforcer la coordination entre les différents acteurs de la santé pour assurer une synergie dans la prise en charge globale et continue des patients », a précisé le ministre de la santé Benjamin Hounkpatin.
Sergino Lokossou