L’édition d’octobre 2023 du rapport Africa’s Pulse démontre que malgré le recul de l’inflation, la montée de l’instabilité, la faible croissance des grandes économies de la région, les chocs climatiques et l’incertitude persistante de la croissance mondiale provoquent une forte décélération de la croissance qui est passée de moins de 3,6 % en 2022 à 2,5 % en 2023. Dans la Zone Uemoa, le Bénin bien que la croissance du Pib réel s’est ralentie par rapport à 2022, le rapport prédit une croissance de l’ordre de 5,8% en 2023.
Dans l’ensemble, le rapport note que la croissance dans la région n’a pas été suffisante pour réduire l’extrême pauvreté, stimuler la prospérité commune ou contribuer à la création d’emplois. Les schémas de croissance actuels ne génèrent que 3 millions d’emplois formels par an, laissant ainsi de nombreux jeunes occuper des emplois occasionnels, fragmentaires et instables qui ne leur permettent pas de mettre pleinement leurs compétences à profit. Dans ce paysage de vents contraires nationaux dans la région et d’incertitude de la croissance mondiale, il existe des « oches de résilience». En 2023, la Communauté d’Afrique de l’Est (Cae) devrait connaître une croissance de 4,9 %, tandis que l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) devrait enregistrer une croissance de 5,1 %. Si l’on compare la vitesse et la persistance de la croissance par habitant à moyen terme (2001-19) et les perspectives de croissance post-pandémique (2022-25), on constate que l’activité économique a bien résisté (plus de 2,5 % dans les deux périodes) dans des pays tels que le Bénin, la Côte d’Ivoire, l’Éthiopie, Maurice, le Rwanda et l’Ouganda. Cependant, la qualité de la croissance et sa soutenabilité restent un sujet de préoccupation, souligne le rapport.
Afrique de l’Ouest
En Afrique de l’Ouest, les données entrantes indiquent des résultats mitigés pour la croissance et l’inflation dans les différents pays. L’activité économique semble continuer à stagner ou à décélérer dans certains pays (Ghana et Nigeria), tandis qu’elle se développe dans d’autres (Côte d’Ivoire). L’inflation a reculé dans certains pays (par exemple, le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et d’autres pays de l’Uemoa), alors qu’elle reste élevée et sans signe clair de décélération dans d’autres pays (Ghana et Nigeria). Le Nigeria a enregistré une croissance de l’activité économique réelle de 2,5 % en glissement annuel au deuxième trimestre 2023 – légèrement supérieure aux 2,3 % du trimestre précédent, mais inférieure aux 3,5 % du même trimestre de 2022. D’avril à juin 2023, la pénurie de liquidités a commencé à s’atténuer, la banque centrale ayant reporté à la fin de l’année la date limite pour échanger les anciens billets en naira contre de nouveaux (figure 1.11).10 L’activité économique a été soutenue par une croissance de 3,6 % en glissement annuel dans l’économie non pétrolière (contre 2,8 % au premier trimestre), notamment grâce aux services (4,4 % en glissement annuel). Cependant, la mauvaise performance du secteur pétrolier a freiné la croissance : il s’est contracté de 13,4 % en glissement annuel (comparé à une contraction de 4,2 % au cours du trimestre précédent). La production moyenne de pétrole brut est tombée à 1,22 Mbpd au deuxième trimestre de cette année, contre 4,3 Mbpd au même trimestre de l’année précédente. La nouvelle administration du Président Tinubu a mis en œuvre une série de réformes comprenant la suppression des subventions aux carburants ainsi que la dévaluation et l’unification du système de taux de change. Les prix du pétrole ont plus que triplé depuis la suppression.
Quid des pays non riches en ressources ?
Selon le rapport Africa’s pulse, les retombées économiques de la polycrise continuent de peser sur la croissance des pays non riches en ressources, dont les factures d’importation sont devenues onéreuses suite à des termes de l’échange défavorables. Le PIB réel de pays non riches en ressources a baissé de 1,3 point de pourcentage, pour atteindre 3,0 % en 2023. Pour ce groupe de pays, l’inflation en 2023 a légèrement diminué pour atteindre 7,3 % (contre un pic de 8,3 % en 2022), le déficit de la balance courante s’est réduit à 4,6 % du PIB en 2023 et le déficit budgétaire a été ramené à 4,3 % du Pib. Le resserrement de la politique monétaire à la suite d’une inflation record en 2022 pourrait avoir pesé sur l’activité économique. Les prévisions de croissance pour les pays de l’Uemoa devraient être de 5,1 % en 2023, en baisse par rapport aux 5,8 % de 2022 et 0,4 point de pourcentage de moins que les prévisions d’Africa’s Pulse d’avril 2023. La croissance du Pib réel s’est ralentie par rapport à 2022 au Bénin (qui devrait croître de 5,8 % en 2023), au Togo (5,2 %), en Guinée-Bissau (2,8 %) et en Côte d’Ivoire (6,3 %), alors qu’elle a augmenté par rapport à l’année précédente au Burkina Faso (4,3 % en 2023), au Mali (4 %) et au Sénégal (4,1 %). Les déficits budgétaires et courants de l’Uemoa se sont réduits en 2023 (à 5,3 % et 8 % du Pib, respectivement) mais restent importants. En somme, et selon les conclusions des experts de la Banque mondiale, le Bénin enregistre l’une des meilleures performances de l’Afrique subsaharienne en dépit des chocs liés à la crise nigérienne et la flambée du prix de l’essence de contrebande. Pour pallier ces aléas, le rapport indique que la création des opportunités d’emploi pour les jeunes favorisera une croissance inclusive et transformera la transition démographique du continent en un dividende démographique.
Abdourhamane Touré