Candide Azannaï, président de la Coordination nationale de la Résistance nationale s’est invité dans le débat relatif à la rencontre intervenue la semaine écoulée entre le président Patrice Talon et son prédécesseur Boni Yayi à la présidence de la République. Comme à son habitude depuis qu’il a perdu toute crédibilité aussi bien au sein de l’opinion publique que dans son entourage, il est allé contre l’avis général, prenant un angle totalement en déphasage avec son propre parcours politique pourtant connu de tout le monde.
« La forme renseignant nécessairement sur le fond, il apparaît en conséquence que cette rencontre n’a revêtu qu’un caractère interpersonnel entre ces deux personnalités dans le but d’une inversion inacceptable de sa juste lecture par les populations et par l’opinion publique. Cette tentative d’inversion de lecture de la situation politique délétère au Bénin viserait à amnésier à la fois l’imposture politique et les dérives criminelles du pouvoir dit de la rupture ». Ces phrases, à la limite, nauséabondes sont de Candide Azannaï, président de la Résistance nationale au sujet de la rencontre entre Yayi et Talon, mercredi dernier à la Présidence de la République. Plutôt que l’avis d’un politicien averti, on lit à travers cette déclaration, les agissements d’un acteur politique sentant venir la fin de son parcours. Très fade, cette appréciation du président de Restaurer l’espoir n’est pas loin de celle de quelqu’un déçu alors qu’il espérait voir perdurer cette crise pour, peut-être, en tirer profit. Mais lequel dans un pays où le jeu politique a changé de forme depuis quelques années, abandonnant les anciennes méthodes faites de chantages et autres ?
Voici des propos de Azannaï qui confirment que contrairement au combat qu’il dit mener, son intention est ailleurs : « La Coordination nationale de la Résistance nationale rappelle une fois encore que le conflit Boni Yayi/ Patrice Talon est totalement différent du conflit ouvert contre le Peuple béninois par le président Patrice Talon. Il s’agit dans les faits d’une démarche personnelle du Président Boni Yayi sous le prétexte, a-t-il rendu public, de transmettre au président Patrice Talon une série de doléances dans la perspective d’une « décrispation politique ». Comment peut-il vouloir amener Talon à accéder à certaines exigences de l’opposition et se refuser un rapprochement vers lui pour discuter de leurs pertinences ? Yayi Boni reçu par Patrice Talon ne veut pas forcément signifier que le combat de l’opposition est terminé et que les deux désormais, seront contraints de parler le même langage politique. Mais, cette rencontre concourt à la décrispation de la crise politique nationale et à l’apaisement de ceux qui pensent que le combat politique est celui de la mort ou de la vie.
Mais qui parle ?
Tout le monde sauf Azannaï ! On peut tolérer que certaines personnes dont le parcours politique est sans tache et rectiligne critiquent la démarche du président Boni Yayi à l’endroit du président Patrice Talon. On peut aussi comprendre les réactions de ceux qui ne maîtrisent pas les réalités des milieux politiques suite à cette rencontre du mercredi 22 Septembre 2021 au Palais de La Marina. On peut encore fermer les yeux sur les appréciations superficielles de petits apprentis politiques qui n’ont pas encore tous les rudiments nécessaires pour opiner raisonnablement sur cette historique audience à la Présidence de la République. Mais, pas de pardon pour Candide Azannaï, président d’un parti politique ; plusieurs fois député à l’Assemblée nationale et deux fois ministre de la République au sein de deux différents régimes politiques. C’est vrai qu’on peut avoir ce long et riche parcours politique sans pouvoir bien apprécier une situation politique si l’on se refuse d’actualiser ses connaissances en la matière et s’adapter aux réalités du moment. Est-ce le cas de Candide Azannaï ? On n’en sait rien.
Sinon, comment comprendre qu’une personnalité de son rang s’en prenne à cette démarche d’humilité de Boni Yayi sans reconnaître, ne serait-ce qu’en un seul mot, sa pertinence avant de relever d’éventuels dysfonctionnements ? Les œuvres humaines étant perfectibles.
Même dans les raisonnements intellectuels, l’élégance voudrait qu’on salue d’abord un travail fait, un acte posé avant de donner son point de vue. Mais à lire Candide Azannaï vêtu du manteau de président de la Résistance nationale-une organisation réduite pratiquement à sa seule personne (on ne lit que lui seul depuis des mois), tous les pans de cette rencontre inédite sont mauvais. Même s’il n’est pas content de sentir un éventuel rapprochement entre Yayi et Talon, tous deux ses anciens patrons dont la division semble lui profiter, il aurait quand même pu saluer le courage de Boni Yayi d’aller exprimer de vive voix à Talon ses inquiétudes sur l’atmosphère politique nationale et sa gouvernance politique du pays.
Le plus transhumant des politiciens
Comme on a coutume de le dire, « quand la cour du mouton est sale, ce n’est pas au porc de le dire». Voici en résumé, le parcours politique de celui qui banalise et fustige la rencontre entre deux acteurs politiques à visions opposées.
Candide Azannaï a été membre de la Renaissance du Bénin et proche de la famille Soglo. On a vu la même personne se retourner contre son propre parti quelques années plus tard pour se retrouver aux côtés de Boni Yayi. Point n’est besoin de rappeler qu’il a même été membre de son gouvernement au moment où les Soglo étaient dans l’opposition et combattaient le régime Yayi. Avant même la fin du régime Yayi, Candide Azannaï s’était retourné contre lui et l’avait traité de tous les noms d’oiseaux à travers l’usage de propos discourtois. C’est d’ailleurs ce retournement qui lui avait valu sa réélection, effet d’une forte popularité à Cotonou en 2015. Il fait partie des acteurs politiques ayant contribué à l’avènement de Patrice Talon au pouvoir. Il a fait partie de son premier gouvernement avant de se retourner contre lui moins de deux ans après pour se voir dans le même camp politique que la famille Soglo qu’il avait autrefois combattue.
Félicien Fagnon