L’acte de transfert de propriété des 26 œuvres appartenant aux trésors royaux d’Abomey pillées en 1892, a été signé mardi 9 novembre 2021 au palais de l’Élysée en présence des présidents Emmanuel Macron et Patrice Talon. C’est l’aboutissement d’un processus initié, il y a quatre ans! En effet, tout est parti de la demande formulée par le ministre des Affaires étrangères béninois, Aurelien Agbénonci, en direction de la France en août 2016. La lettre avait été rejetée par le gouvernement français au nom du principe d’inaliénabilité des collections publiques. Par la suite, en novembre 2017, les processus de restitution d’objets d’art pillés pendant la période coloniale se sont multipliés avec le discours prononcé par Emmanuel Macron à Ouagadougou, au Burkina Faso, en novembre 2017. On se souvient que le chef de l’Etat français s’était engagé, lors d’un discours à l’université de Ouagadougou, à rendre possible dans un délai de cinq ans les restitutions temporaires ou définitives d’œuvres du patrimoine africain en France. En mars 2018, le président Patrice Talon et son homologue français se sont entretenu sur le sujet et ont mandaté les universitaires sénégalais et française Felwine Sarr et Bénédicte Savoy pour tracer le cadre intellectuel d’une doctrine en matière de restitution. Sur la base de leur rapport remis le 23 novembre 2018, l’engagement personnel du président Macron et la proposition du ministre de la culture et du musée du Quai Branly Jacques Chirac, il avait été décidé de rendre 26 œuvres réclamées par les autorités du Bénin. Leur rapport avait dressé un calendrier de restitution et un inventaire des dizaines de milliers d’objets que les colons ont ramené d’Afrique. Finalement, une loi avait été votée puis promulguée le 24 décembre 2020, permettant des dérogations au principe d' »inaliénabilité » des œuvres dans les collections publiques, parce qu’elles avaient fait l’objet de pillages caractérisés, rendant possible ces restitutions. Après cette étape, s’en est suivi le travail considérable au Bénin et en France pour accompagner la restitution d’une coopération exemplaire en matière culturelle, scientifique, patrimoniale par des programmes en termes de formation, d’accompagnement des projets culturels et patrimoniaux béninois. Selon des experts, 85 à 90 % du patrimoine africain serait hors du continent. Depuis 2019, outre le Bénin, six pays – Sénégal, Côte d’Ivoire, Ethiopie, Tchad, Mali, Madagascar – ont soumis des demandes de restitution. Au moins 90 000 objets d’art d’Afrique sub-saharienne sont dans les collections publiques françaises dont 70 000 d’entre elles au Quai Branly, 46 000 arrivées durant la période coloniale.
Wilfrid Noubadan