Depuis septembre 2021, les pêcheurs de Xwlacodji, dans le 5ème arrondissement de la ville de Cotonou, ont déféré aux sommations du gouvernement de libérer la berge de Cotonou. Cinq mois après leur déguerpissement, quelques-uns parmi les 368 ménages enregistrés ne sont toujours pas rentrés en possession de leurs chèques. Une situation plutôt anormale à première vue, mais qui n’est nullement imputable à l’Agence nationale de développement du foncier (Andf), qui aux dires de son directeur général adjoint, Moussa-Fils Djibril, a pleinement joué sa partition. Lisez ses explications.
Le Matinal : A ce jour, qu’est-ce qui a été concrètement fait au profit des pêcheurs déguerpis de Xwlacodji ?
Moussa-Fils Djibril : Le gouvernement du président Patrice Talon a jugé bon, pour mieux valoriser ce site de Xwlacodji qui est situé dans un angle entre la lagune et la côte. On peut mettre de grandes infrastructures, des sièges de banque, d’assurances, de multinationales, pour que notre capitale Cotonou soit assez attractive. Le relogement ou le traitement des populations qui étaient là, a été un traitement spécial. Généralement, lorsqu’on doit déplacer des gens, ils ne sont pas toujours contents des indemnisations. Cette fois-ci, vous l’aurez certainement constaté, les populations de Xwlacodji ont été très contentes de la manière dont elles ont été traitées. En effet, le gouvernement a décidé de leur octroyer une prime de relogement fixée à 5 millions de francs Cfa par parcelle. Quand je fais 5 millions multipliés par 368 personnes recensées, cela fait 1 milliards 840 millions de francs Cfa. Le gouvernement a mis l’intégralité de cette ressource à disposition. Donc, leur paiement ne doit pas poser problème. En plus de ces 1 milliard 840 millions, il se fait que le gouvernement a décidé d’octroyer à chacun, une parcelle viabilisée. Donc, le site a été identifié à Djeffa et a été offert gracieusement après aménagement, pose des bornes, ouverture des voies. Donc, en dehors des 1 milliard 840 millions, il faut ajouter l’octroi de parcelles gratuites et tout ce qui concerne la viabilisation du site à savoir l’ouverture des voies, l’aménagement des toilettes, l’éclairage du site, le raccordement à l’eau. Par ailleurs, des instructions ont été données aux ministres de la Santé et de l’Education pour que les centres de santé, écoles et collèges qui sont dans la zone soient renforcés en capacité d’accueil.
Aujourd’hui, il se fait que des 368 ménages recensés, certains attendent toujours de rentrer en possession de leurs chèques, 6 mois pratiquement après leur déguerpissement. Qu’est-ce qui explique cette situation ?
C’est le 15 septembre 2021 que le Conseil des ministres a adopté la mesure sociale de relogement des ménages de Xwlacodji et des instructions ont été données pour qu’ils soient installés avant la rentrée. Donc, on devrait faire tout ceci avant fin octobre 2021. Toutes les structures, les ministères concernés, se sont mobilisés pour pouvoir réaliser le site. Le point que je peux vous faire, c’est qu’on a attribué les 368 parcelles. Donc, tous les 368 ménages recensés, disposent aujourd’hui d’une parcelle. Le problème se pose au niveau des 5 millions que chacun doit avoir. Ce sont des fonds publics. Pour les avoir, il faut fournir un minimum de pièces. On a simplifié les choses en leur demandant une carte d’identité et un procès-verbal de Conseil de famille qui doit être visé soit par le chef quartier ou le chef d’arrondissement. On n’a pas voulu leur compliquer la tâche. C’est juste ces deux pièces qu’il faut fournir pour pouvoir bénéficier du dédommagement. Sur les 368, c’est 361 seulement qui ont pu fournir ces pièces à la date d’aujourd’hui. Donc, il y a sept (07) qui n’ont toujours pas fourni les pièces à ce jour. Donc, s’ils n’ont pas fourni les pièces, ils ne peuvent pas dire qu’ils n’ont pas été dédommagés parce qu’ils doivent savoir que la balle est dans leur camp. Pour les 361 qui ont pu déposer leurs dossiers, nous avons, après examen, trouvé qu’il y a deux qui ne sont pas valides. Autrement dit, il y a 359 dossiers qui sont valides. Sur ces 359 dossiers, nous avons déjà payé 242 chèques. Il reste 117 qui n’ont pas encore retiré leurs chèques et ces 117, je dois diviser ça en deux lots. Il y a 93 pour lesquels, les chèques sont établis et qui ne sont pas venus retirer et il y a 24 dont les dossiers sont en cours de validation au niveau du comité qui autorise le décaissement des fonds. Pour moi, sur les 368 ménages, c’est seulement 24 qui peuvent, à raison, dire qu’ils n’ont pas encore reçu leurs chèques.
Vous avez parlé tantôt d’un certain nombre de chèques qui sont établis au niveau de l’Andf et que les titulaires ne sont pas venus chercher. Qu’est-ce qui selon vous, peut justifier cela ? N’est-ce pas un défaut d’information ?
Dès que les chèques sont prêts, on les appelle pour leur dire de venir les chercher. Maintenant, s’ils prennent leur temps pour venir, je ne saurais dire pourquoi ils trainent. Mais les chèques sont prêts. Je crois que dès qu’ils vont prendre connaissance de cet entretien, cela pourrait les réactiver à venir les retirer.
En clair, on retient qu’il y a 24 personnes qui ne sont pas encore satisfaites jusque-là ?
Oui. En fait, sur les 361 dossiers que nous avons collectés, il n’y a que 24 chèques qui ne sont pas encore établis.
Qu’est-ce qui est prévu pour ces 24 personnes. N’y a-t-il pas une procédure particulière pour leur permettre d’accélérer le processus ?
Il faut dire qu’en réalité, nous étions dans la logique de satisfaire tout le monde en même temps, mais il faut reconnaître que c’est à leur niveau qu’il y a de retard dans la fourniture des dossiers. C’est par vagues et en fonction des dossiers que nous recevons, que nous traitons et donc, nous établissons les chèques.
La procédure dure combien de temps ?
Les chèques établis et retirés, cela n’a pas été fait le même jour pour distribuer aux 242 ménages. Donc, c’est vagues par vagues. Quand les dossiers viennent, on les étudie, on les valide et puis on établit les chèques. Souvent, ils ont des difficultés pour déposer les dossiers parce qu’ils n’ont pas de cartes d’identité ou parce qu’ils n’ont pas pu s’entendre pour faire le procès-verbal du conseil de famille, ou bien ils ont pu le faire et au niveau des autorités locales, ils n’ont pas pu recevoir les signatures. D’ailleurs même, leur dossier, quand c’est prêt, est déposé au niveau du Chef d’arrondissement et c’est ce dernier qui nous le transmet pour traitement. Donc, peut-être à ce niveau aussi, le Chef d’arrondissement attend que cela fasse un nombre de temps avant de transmettre cela. Donc, tout cela peut contribuer au retard global qu’on constate dans ce processus.
Contrairement aux assurances du gouvernement, ces populations estiment que le site de Djeffa plage où elles ont été relogées, n’est pas totalement viabilisée. Ils évoquent des problèmes d’électricité, d’accès à l’eau potable etc. Qu’en dites-vous ?
Vous pouvez constater sur le site que d’abord, l’ensemble du site a été désherbé, les bornes ont été posées. Les voies ont été ouvertes et ont été rechargées avec du sable. Ça, c’est pour l’emplacement des voies. Il est prévu des toilettes publiques, mais nous avons constaté que certains déjà dans leur construction, ont prévu des toilettes, mais cela n’empêche pas de réaliser ce qui était prévu. Maintenant, ces toilettes ne sont pas encore réalisées, parce que les procédures de passation de marchés n’ont pas été encore bouclées, mais tout ça, c’est déjà mis en branle. L’espace est réservé, le marché est passé, donc les toilettes vont être réalisées sous peu. Pour ce qui est de l’éclairage public, sur le site, vous auriez constaté que les lampadaires ont été posés et ça fonctionne. C’est 50 lampadaires qui ont été installés et qui sont fonctionnels sur le site. Pour ce qui est de l’eau, il est prévu en réalité de ramener l’eau au bord du périmètre pour que les populations aillent chacune, en ce qui la concerne, souscrire à un abonnement. La Soneb a déjà fait les travaux pour apporter de l’eau au bord du périmètre. Donc, pour que chacun ait de l’eau sur sa parcelle, il faut qu’il aille au niveau de la Soneb demander un branchement pour qu’on puisse venir lui faire les installations.
Votre mot de la fin
Je dirai simplement que cette forme d’indemnisation ou de traitement de l’expropriation des populations que nous avons expérimentée avec la population de Xwlacodji a été appréciée par les bénéficiaires et par d’autres qui n’ont pas bénéficié de cela. Je crois que dans la mesure des disponibilités foncières et financières, le gouvernement s’efforcera pour le bien-être de la satisfaction des populations. On m’a même rapporté que les voies rechargées ont été un peu endommagées, du fait des camions qui viennent livrer les matériaux pour ceux qui ont déjà construit. Quand on me dit que les voies n’ont pas été rechargées, c’est un peu contraire à la réalité.
Propos recueillis par Gabin Goubiyi