Le soja, l’une des filières de diversification a enregistré des performances notables durant ces dix (10) dernières années aussi bien sur le plan de la production que de l’exportation. Au Bénin, la production, la transformation et la commercialisation du soja intéressent de plus en plus les producteurs en raison de la forte rentabilité de la filière et de sa capacité de fertilisation du sol. Les femmes, par leurs actions quotidiennes, apportent une plus-value à la filière.
L’agriculture est le premier secteur pourvoyeur d’emplois dans les pays en voie de développement. Elle l’est davantage en milieu rural grâce à l’apport de la gent féminine. Les divers rapports ont révélé que les femmes constituent le maillon ouvrier en Afrique et particulièrement au Bénin. La production de soja est passée de 2000 à 2018, de 5000 tonnes à 22000 tonnes. En 2023, à la Gdiz 14500 tonnes de soja bio sont transformées en raison de 200 tonnes de façon journalière pour l’obtention d’huile. Aussi, 13000 tonnes du soja conventionnel soit 500 tonnes par jours et dont la finalité sont les tourteaux. La dernière campagne a fait croître la production à 400000 tonnes et pourra aller à 600 000 à l’horizon 2030. Alors, qu’il s’agisse de la production ou de la commercialisation ou la transformation du soja, les femmes représentent une pierre angulaire. Et elles le sont encore plus dans le maillon de la transformation. Elles jouent un rôle clé dans la transformation du soja en produits finis tels que le tofu, le lait de soja, l’huile de soja, le fromage localement appelé « Amon soja » et les substituts de viande à base de soja. Elles maîtrisent les techniques de transformation et transmettent leur savoir-faire de génération en génération. Leur expertise contribue à la diversification de l’offre alimentaire et à la promotion d’une alimentation saine et nutritive.
Des contraintes
Le soja est une légumineuse qui se cultive au Bénin principalement dans le Pôle de développement agricole 4 (Pda 4) et en cours d’intensification dans le Pda 2 selon la nouvelle stratégie de promotion des filières agricoles. La culture du soja fournit actuellement plus de 40% de la production totale de légumineuses et représente la 4ème source de devises du secteur agricole derrière le coton, l’anacarde et le karité (Agence Ecofin, Bénin : le gouvernement revalorise le prix d’achat du soja à 190 FCFA/kg en 2021/2022, 18 Novembre 2021). Il est cultivé tant pour son importance socio-économique et environnementale. Sur le plan socio-économique, la production du soja induit de l’augmentation de la demande d’intrants (semence, fertilisants, produits phytosanitaires), de superficies, d’équipements et de main d’œuvre, à l’augmentation du rendement et de la production nationale. De cette manière, la production de soja influence chaque individu qui y est directement et indirectement lié. Les revenus du marché générés par la production de soja influencent le revenu du producteur et, par conséquent, la qualité de vie et le bien-être de son ménage. Le soja améliore le revenu des femmes et des jeunes qui constituent les couches importantes d’acteurs intervenant dans la production. Par ailleurs, il est pourvoyeur d’emplois pour les jeunes à travers l’entreprenariat agricole. L’importance économique de la production de soja ne se limite pas aux producteurs. L’exportation de soja grain et sa transformation en des dérivés tels que, le son, l’huile, le fromage etc. offrent de nombreuses opportunités à la population béninoise. Sur le plan environnemental, le soja est l’une des principales cultures qui affecte différents aspects de l’écosystème. Grâce à sa capacité à fixer la grande partie de son besoin en azote atmosphérique à travers le processus de la fixation symbiotique, le soja améliore le bilan de l’azote du sol dans les systèmes de cultures. Les graines de soja sont très riches en protéines et en lipides. Ses tiges et feuilles servent d’engrais verts et fourrages très appétant pour le bétail. Le soja se cultive sur les sols où peuvent se cultiver les autres céréales telles que le maïs, le sorgho et autres. Le terrain plat ou en pente douce est plus approprié à la culture du soja. Tout ceci justifie l’évolution de sa production ces dernières années. Par exemple, de 2011 à 2021, la production nationale a été quadruplée en passant de 59 458 tonnes à 253 954 tonnes (Dsa, 2021). Cette augmentation de la production nationale s’explique aussi par l’amélioration du rendement et de la superficie emblavée. En effet, au cours de la même période, les superficies emblavées ont augmenté de 168 114 ha à 203 572 ha ainsi que le rendement de 873 kg/ha à 1247,5 kg/ha (Dsa, 2021). En ce qui concerne l’exportation, les données disponibles montrent que pour la campagne 2021-2022, le Bénin a exporté 310 978,669 tonnes de soja vers les pays de l’Asie, de l’Europe et de l’Amérique. Des efforts sont également consentis par le gouvernement notamment au niveau de la commercialisation de soja. Depuis plus de 03 campagnes agricoles, de concert avec les différents acteurs de la filière, le prix planché est fixé par le gouvernement.
Transformation de soja
La transformation du soja offre des opportunités économiques aux femmes. En s’engageant dans cette activité, elles peuvent générer des revenus, améliorer leur niveau de vie et contribuer à la réduction de la pauvreté dans leurs communautés. La vente des produits transformés leur permet de devenir des entrepreneures et de s’impliquer activement dans l’économie locale.
Par ailleurs, l’économie du soja est majoritairement animée par les femmes, qui représentent 67% de la population en milieu rural. Il faut retenir que sur 851580 habitants, 444550 sont de sexe féminin. Quand on prend le volet transformation du soja en fromage ou encore en viande, les femmes rentabilisent beaucoup plus. Les petites transformatrices de soja en fromage bénéficient de 2544, 48 FCFA pour 9kg de soja transformés et commercialisés. Les moyennes transformatrices font un chiffre d’affaires qui varie entre 3392,64 à 6785,28 FCFA pour 12kg et 28kg de soja. Les grandes transformatrices emmagasinent 508 896fcfa pour 18kg et 10177,92 FCfa pour 36kg transformés. Au vu de ces résultats obtenus grâce aux études menées par l’IJPSAT (International Journal of Progressive Sciences and Technologies) sur les Impacts Économiques de la Transformation du Soja (Glycine Max) en Fromage et Dégradation de l’Environnement Physique dans la Commune de Tanguiéta au Nord-ouest de l’Atacora, les femmes en particulier rurales constituent le noyau de l’agriculture et de l’économie béninoise.
Enfin, la participation des femmes dans la transformation du soja favorise leur autonomisation. En développant leurs compétences techniques, en accédant à des formations et à des opportunités d’affaires, elles renforcent leur confiance en elles-mêmes et leur capacité à prendre des décisions économiques. Cela contribue à réduire les inégalités de genre et à promouvoir l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Interdiction d’exportation du soja au Bénin
A compter du 1er avril 2024, les exportateurs de noix brutes du soja grain doivent être agréés par l’autorité compétente. « En conséquence, toute opération d’exportation des noix de soja grain sera subordonnée à la délivrance d’une autorisation du Ministère chargé du Commerce qui s’assure au préalable de la satisfaction effective des besoins des transformateurs locaux », a rappelé dans son communiqué, la direction générale des douanes. La décision d’interdiction d’exportation de soja et cajou n’est pas nouvelle. Elle a été prise par décret n°2022-568 du 12 octobre 2022. Le but, selon le gouvernement, est d’encourager la transformation locale des matières premières. Cette mesure concerne aussi les noix concassées et les amandes de cajou non dépelliculées ; les grains de soja concassés ou tous autres dérivés de ces produits « jugés facilement transformés par les services de l’industrie ou des douanes ». A cet effet, la directrice générale des douanes, Adidjatou Hassan Zanouvi dit compter sur la « responsabilité » et le « professionnalisme » des acteurs concernés (exportateurs, commissionnaires en douane agréés, transporteurs, opérateurs économiques, autres usagers) en vue du respect des prescriptions. Selon le gouvernement, la production de soja au Bénin est passée de 156.900 tonnes en 2017 à 253.953 tonnes en 2021. Une croissance considérable qui devrait booster la nouvelle dynamique gouvernementale en matière d’industrialisation du pays. A partir de la Zone industrielle de Glo-Djigbé, le Bénin ambitionne de transformer 600.000 tonnes de soja par an, d’ici fin 2024. La Gdiz est actuellement capable de transformer 260.000 tonnes de soja bio et conventionnel. Elle a une capacité de transformation annuelle de cajou de 40.000 tonnes.
Sergino Lokossou