Après plusieurs mois d’incertitudes et de batailles judiciaires, les procès de Joël Aïvo et Reckya Madougou ont finalement livré leurs verdicts la semaine dernière. Les lourdes peines d’emprisonnement (10 ans et 20 ans) qui, ont écopé les prévenus ont éteint les flammes d’espoir dans le rang de ceux qui espéraient leur libération. Mais la possibilité d’appel tout comme l’amnistie et la grâce présidentielle sonnent aujourd’hui comme des couloirs de salut pour épargner les deux candidats recalés à la Présidentielle d’avril 2021, d’un long séjour carcéral.
Le procès « atteinte à la sûreté de l’Etat et blanchiment de capitaux » et celui « financement de terrorisme » dans lesquels sont respectivement poursuivis Frédéric Joël Aïvo et Reckya Madougou, sont désormais derrière nous. Les audiences qui ont statué sur ces deux dossiers lors de la session criminelle de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) ont été pour le peuple, l’occasion de prendre véritablement connaissance des affaires et de savoir ce qui est reproché à ces deux compatriotes. Quand bien même chacun se fait son idée sur le verdict rendu par la juridiction spéciale, il convient de reconnaître que des éléments substantiels relevés contre les mis en cause et leurs complices pourraient justifier la lourdeur des peines infligées auxconcernés. Le procès étant désormais derrière nous, du moins pour ce qui concerne la juridiction de premier degré, seule la compétence de la juridiction d’appel pourrait être sollicitée si les inculpés et leurs conseils en décidaient ainsi. Même si la plupart des avocats sont restés prudents et même évasifs sur le sujet, l’appel reste aujourd’hui l’une des portes de sortie pour les mis en cause. S’apitoyer sur son sort et penser que les carottes sont cuites s’assimilerait à une résignation ou un renoncement à cette prérogative qui, à maints égards, s’offre aujourd’hui comme une once d’espoir pour une éventuelle réintégration des vaillants compatriotes condamnés dans leurs droits. En effet, que l’on soit pour au contre les verdicts, que l’on ait ou non des griefs contre les mis en cause, il convient de reconnaître qu’ils restent des valeurs dont la Nation a besoin. Cependant, l’on se doit de reconnaître qu’aucune Nation prospère n’a pu aboutir à un niveau de développement conséquent, en dressant le lit à l’impunité, au laisser-aller et à l’anarchie.
La grâce présidentielle et l’amnistie : des bouées de sauvetage
Désormais fixés sur leurs sorts, Frédéric Joël Aïvo et Reckya Madougou sont face à leurs destins. En effet, c’est à eux que revient la décision d’autoriser leurs défenses respectives à interjeter appel des jugements prononcés à leur encontre. Cette procédure aura le mérite d’éviter de concéder un caractère définitif aux peines qu’ils sont appelés à purger. Y renoncer est synonyme d’une acceptation tacite et les condamnations seront inscrites sur leurs casiers judiciaires respectifs, ce qui ne serait pas sans conséquence sur leur avenir politique voire professionnel. Quand bien même la carte de l’appel ne prospérait pas, Frédéric Joël Aïvo et Reckya Madougou disposent d’une ultime porte de sortie. Il s’agit cette fois-ci d’une solution extrajudiciaire, c’est-à-dire d’une option politique dont le chef de l’Etat reste le seul détenteur constitutionnellement habilité à en prendre l’initiative. Il s’agit d’une solution à deux clés, lesquelles sont d’ailleurs abondamment agitées depuis que le glaive de la justice s’est abattu sur les deux opposants béninois : l’amnistie et la grâce présidentielle. La première a la faculté d’éteindre l’infraction et donc la peine prononcée. Autrement dit, le condamné est réintégré dans ses droits. L’infraction incriminée est supposée n’avoir jamais été commise et le procès est annulé. Du coup, le casier judiciaire du condamné retrouve sa virginité et reste inviolé. La grâce, quant à elle, a des effets moins importants. Ses uniques points de similitude avec l’amnistie est que le jugement doit avoir été rendu définitif et que le condamné doit retrouver sa liberté. Elle est accordée par le chef de l’Etat moyennant certaines conditions, à des personnes ayant été déjà condamnées par une décision ayant acquis l’autorité de la chose jugée. Ces deux options « politiques » restent aujourd’hui, les deux issues possibles pour sortir Joël Aïvo et Reckya Madougou du pétrin.
Gabin Goubiyi