Les deux faux frères se talonnent dans le giron familial. La maison opposition est toujours en proie à cette guéguerre fratricide interminable. A peine nés, les petits partis tel le Mouvement populaire de libération (Mpl), la Grande solidarité républiciane (Gsr), la Nouvelle force nationale (Nfn) et compagnies sont déjà perdus et ne savent plus qui suivre dans cette bataille des rois de la forêt. Le passé tient encore si fortement la Fcbe et « Les démocrates » qui n’arrivent toujours pas à incarner une unité tout au moins superficielle pour faire douter leurs adversaires d’en face.
Il faut déjà dire d’entrée qu’ils ne sont pas obligés de s’entendre. La politique n’est pas un jeu d’enfant de chœur. Le salut est individuel et la course pour l’Hémicycle l’est encore plus. Le parti « Les démocrates » refuse de s’assimiler à la Force cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) car leur grande proximité risque sans doute de compromettre leur discours politique sur le terrain. Cela s’entend surtout quand on se réfère à ce passé si récent fait de contradictions internes qui a conduit au départ de certains ténors du parti. L’épisode est encore présent dans les esprits et cette plaie a certainement du mal à cicatriser. Demander à ces alliés d’hier et adversaires d’aujourd’hui de fumer si vite le calumet de la paix serait un exercice complexe. Il est vrai qu’on n’est jamais ferme en politique, mais plus qu’un rapprochement d’acteurs politiques en froid, nous sommes en présence d’un calcul politique froid. Les démocrates veulent bien être seuls que d’être mal accompagnés. En raison de ce désamour prononcé qu’ils ont déjà démontré envers les leaders Fcbe sur le terrain, ils auront certainement du mal à dire à leur électorat qu’ils ont renoué avec leur ennemi d’hier. L’entretien de la scissure avec la Fcbe est une stratégie à retombée électorale indéniable. Tout cela paraît normal.
La démarche est donc intelligente surtout quand on sait que ce qui gêne le plus au niveau de la Force cauris pour un Bénin émergent (Fcbe), c’est beaucoup moins la configuration politique actuelle que le personnage qui dirige le parti. Paul Hounkpè est un problème pour « Les démocrates » et sa présence gêne fondamentalement la dynamique de rapprochement. Ceci n’est plus à cacher désormais, mais il se pose à ce niveau un autre problème. En effet, il se fait que le secrétaire exécutif national de la Fcbe que sa tête plaise ou non aux démocrates est actuellement le chef de file de l’opposition. Quand on fait l’exercice simple de parcourir le document qui consacre le Statut de l’opposition, on réalise que ce personnage est investi d’une mission assez large qui dépasse les regards réducteurs de ses détracteurs. Quand on sait que jusqu’à preuve du contraire, les démocrates se réclament de l’opposition et que d’une manière ou d’une autre ils sont appelés à composer avec leur chef dont ils dénient si ouvertement l’autorité, on réalise finalement que c’est l’hôpital qui se moque de la charité.
Il est vrai que sur le terrain purement politique, les démocrates peuvent bien se passer de Hounkpè puisqu’en réalité ils n’ont pas vraiment besoin de lui pour faire le combat politique. Ceci est indéniable, mais tout ne se résume pas au combat politique. La réforme du système partisan impose de nouvelles exigences qui convoquent une dynamique de grands ensembles. Les grandes luttes se gagnent toujours ensemble. L’évidence sous nos yeux, ce sont les deux grandes forces de la mouvance et les partis satellites. Ces ensembles seront toujours en tête d’affiche en dépit des difficultés qu’ils connaissent et qui sont inhérentes à toute organisation humaine. L’opposition doit donc tirer leçon des nombreux échecs qu’elle a connus du fait de cet attachement si soigné au passé et du défaut évident d’organisation. Le temps joue contre les acteurs de l’opposition qui doivent enfin comprendre que la donne a changé et que la pratique politique doit évoluer.
Abdourhamane Touré