Le mal l’emporte si les hommes de bien se taisent. Conscients du fait, plusieurs acteurs de la société civile ont fait part de leurs inquiétudes en ce qui concerne la protection des lanceurs d’alerte dans la lutte contre la corruption au Bénin. La lutte contre la corruption étant une bataille de tous les instants, elle ne peut se faire sans les lanceurs d’alerte. Plusieurs acteurs de la société civile plaident pour leur protection.
Il s’observe un vide en matière de protection des lanceurs d’alerte au Bénin. En effet, ce sont les articles 31, 32, 33, 34, 35 et 36 de la loi 2011-20 du 12 octobre 2011 portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin qui avaient prévu la protection des lanceurs d’alerte et un décret avait été pris en 2013 pour confirmer la protection des dénonciateurs, des témoins et autres lanceurs d’alerte. Mais en 2020, cette loi a été abrogée. « Le décret d’application, à mon humble avis, n’est plus valable, puisque le décret d’application d’une loi ne peut plus continuer à exister quand la loi est abrogée. De ce point de vue, nous avons un vide », a informé récemment l’ex-président de l’Autorité nationale de lutte contre la corruption (Anlc) Jean-Baptiste Elias. Il urge de combler ce vide, en prenant des dispositions législatives pour protéger les lanceurs d’alerte. Et pour cela, il faut rétablir, selon Jean-Baptiste Elias, la loi 2011-20 du 12 octobre 2011 portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin qui a tout prévu en son temps. Outre cela, il faut, selon Jean-Baptiste Elias, donner les moyens nécessaires à la structure nationale de lutte contre la corruption pour qu’elle puisse bien travailler et que la société civile soit associée, puisque dans les trois textes que le Bénin a signés et ratifiés, il est prévu la collaboration entre les structures étatiques, les structures de la société civile et le secteur privé pour lutter efficacement contre la corruption. Il s’agit de la convention des Nations-Unies contre la corruption, la convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption et le Protocole de la Cédeao sur la prévention et la lutte contre la corruption. Pour sa part, Social Watch estime que le gouvernement doit s’efforcer de mettre en place une législation efficace sur la protection des lanceurs d’alerte. Son président Rigobert Orou Ganni regrette que « l’abrogation de la loi de 2011-20 portant lutte contre la corruption, partiellement remplacée par des dispositions introduites dans le Code pénal et par la loi sur le Haut-commissariat à la prévention de la corruption, laisse subsister des lacunes par rapport aux bonnes pratiques et aux engagements internationaux souscrits par le Bénin : absence de protections suffisantes pour les lanceurs d’alerte, pas de régime juridique des conflits d’intérêt, un cadre très insuffisant pour les déclarations de patrimoine ». Il invite le gouvernement à mettre en place une législation efficace sur la protection des lanceurs d’alerte ; développer des systèmes de dénonciation anonyme efficaces et indépendants pour lutter contre la corruption ; soutenir les lanceurs d’alerte pour promouvoir la lutte contre la corruption.
Sergino Lokossou