La rencontre annoncée entre Patrice Talon et la délégation du parti « Les démocrates » conduite par Boni Yayi a eu lieu comme annoncée dans l’après-midi d’hier, lundi 27 novembre 2023 au salon d’honneur du palais de La Marina. Plusieurs sujets ont été au menu des échanges entre le chef de l’Etat et ses hôtes dans le sens de la décrispation de la situation politique et des solutions pour des élections inclusives et apaisées en 2026.
La délégation du parti « Les démocrates » était constituée de son président Boni Yayi, du premier vice-président Eric Houndété, du deuxième vice-président Léon Basile Ahossi et du président du Groupe parlementaire Les démocrates, Nourénou Atchadé. Selon des informations rapportées par Bip radio, les échanges ont commencé à 17 heures 13 minutes et ont duré quatre heures d’horloge. A l’entame, Patrice Talon, selon le même média, a émis le souhait de voir les échanges se dérouler sans langue de bois. Pour Boni Yayi, ancien chef d’Etat et président du parti « Les démocrates », cette rencontre est la bienvenue. « Nous avons répondu avec joie à cette rencontre», aurait-il déclaré. Allant dans le vif du sujet, Boni Yayi a exposé ses griefs contre le système électoral qui, selon lui, n’est pas inclusif or poursuit-il « La question d’inclusivité est une question préoccupante. Il faut qu’on vide cette question d’inclusivité. Ayons le courage d’y trouver une solution. Si ça marche, on dira que c’est vous (Patrice Talon Ndlr). Si ça tourne mal, on dira encore que c’est vous. ». Il est à rappeler que les questions liées à la liste électorale et sur l’ensemble du processus électoral dans le cadre des élections générales de 2026 étaient les principaux points au menu de cette rencontre. Le parti « Les démocrates » s’est notamment inquiété de sa non-représentativité dans les organes de gestion des élections. Les hôtes du chef de l’Etat ont notamment plaidé pour la possibilité de contourner les textes afin de leur permettre d’y envoyer des représentants. Pas question, a rétorqué le chef de l’Etat qui a rappelé n’avoir depuis son accession au pouvoir, modifié les lois relatives à la désignation des membres aussi bien de la Commission électorale nationale autonome (Céna) que de la Cour constitutionnelle. A toutes fins utiles, il a rappelé que les élections présidentielles organisées dans le pays en 1996, 2006, et 2016 ont consacré l’élection de chefs d’Etat qui n’avaient aucun représentant à la Céna ni à la Cour constitutionnelle. En somme, a conclu le chef de l’Etat, la non-représentativité d’un parti politique à la Cour constitutionnelle ou à la Céna ne suffit pas pour dire qu’il y a exclusion.
Accord sur l’audit de la liste électorale
Selon les informations parvenues à « Le Matinal », le chef de l’Etat aurait marqué son accord pour l’audit de la liste électorale, une doléance essentielle du parti « Les démocrates ». Une source porche de la présidence de la République rapporte que Patrice Talon aurait demandé aux responsables du parti « Les démocrates », de commettre leurs propres experts pour l’audit sollicité. Mieux, il a indiqué l’engagement de l’Etat à accompagner financièrement le parti pour cette mission si d’aventure, ces moyens faisaient défaut au niveau du parti. « Je suis d’accord pour que vous auditiez le registre national d’état civil, y compris le logiciel d’extraction de la liste électorale. Vous pouvez choisir les experts que vous voulez pour le faire mais veillez à ce que ce ne soit pas fantaisiste. Et si Ld n’a pas les ressources pour le faire, je vais demander au gouvernement de financer », a déclaré Patrice Talon. Une grande avancée qui certainement va dissiper les brouillards d’incertitudes et les soupçons qui pèsent sur la liste électorale et que les démocrates ne ratent aucune occasion d’exprimer. Cet accord auquel sont parvenus Patrice Talon et ses hôtes est déjà un pas important vers des élections crédibles et transparentes en 2026.
Le sort de Madougou en suspens
Réckya Madougou n’est visiblement pas au bout de ses peines. A en croire les sources de « Le Matinal », l’opposante béninoise ne devrait pas compter sur une éventuelle grâce présidentielle pour recouvrer sa liberté. Comme il fallait s’y attendre, le sujet est apparu à la surface des échanges d’hier. Sur la question, Patrice Talon est resté intraitable. « Monsieur le président Boni Yayi, je vous ai déjà dit que je ne compte pas gracier Reckya Madougou», a tranché Patrice Talon à la demande de pardon de l’ancien chef de l’Etat en faveur de l’opposante condamnée depuis le 11 décembre 2021, à 20 ans de prison par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme. Cette déclaration du chef de l’Etat n’éteint cependant pas tous les espoirs de libération de l’opposante béninoise quand on sait que la grâce présidentielle n’est que l’une des voies pour obtenir sa libération et celle des autres détenus dits politiques. La piste de la grâce présidentielle étant désormais définitivement écartée, les démocrates pourraient se rabattre sur la proposition de loi spéciale portant amnistie et/ou abandon des poursuites judiciaires au profit de personnalités politiques pour des faits criminels déposée au Parlement.
Sort des exilés « politiques » et proposition de loi d’amnistie
Sur le cas des exilés politiques, la position du chef de l’Etat n’a pas fondamentalement varié. Le chef de l’Etat a réitéré son opposition formelle à l’impunité pour les acteurs politiques simplement du fait de leur appartenance à la classe politique. Patrice Talon a soutenu n’avoir pris aucun acte pour contraindre qui que ce soit à l’exil. Il est donc loisible aux compatriotes qui sont partis hors de pays, d’y revenir à tout moment, afin de répondre des faits à eux reprochés devant la justice. Relativement à la proposition de loi d’amnistie, Patrice Talon a indiqué qu’il appartient aux députés d’y donner telle suite qu’il plaira. Personnellement, il a déclaré qu’il ne soutiendra pas la démarche.
Gabin Goubiyi