L’année 2021 a été marquée par la semaine du Bénin au Quai Branly, le retour des trésors royaux, l’adoption de la loi relative à la protection du patrimoine culturel et la suspension des événements à caractère culturel. Focus sur ces faits majeurs qui ont marqué l’actualité culturelle.
La grosse actualité sur le plan culturel au cours de l’année qui s’achève reste et demeure le retour sur la terre de leurs aïeux des trésors royaux. Vingt-six (26) au total, ces œuvres avaient été officiellement réclamées par le président béninois à la France le 27 juillet 2016. Patrice Talon avait fait la demande de restitution des œuvres d’art emportées lors de la conquête coloniale à la fin du XIXe. Cette demande, dans un premier temps, avait été rejetée par les autorités françaises au nom du principe d’inaliénabilité des collections nationales avant d’être acceptée. En effet, le président français Emmanuel Macron, à l’université de Ouagadougou, au Burkina Faso, le 28 novembre 2017, à la faveur de la présentation des axes de la relation qu’il souhaite entretenir avec l’Afrique, a affirmé devant 800 étudiants que « le patrimoine africain doit pouvoir être exposé en Afrique ». Précisant que cela suppose un gros travail et la mise en place de nombreux partenariats avec diverses structures (scientifique, muséographique). Il estime qu’en cinq ans, la restitution temporaire ou définitive du patrimoine africain en Afrique pourrait être effective. Pour ce faire, il commande un rapport à Bénédicte Savoy et Felwine Sarr qui inventorie le patrimoine africain conservé en France et propose d’amender la législation sur l’inaliénabilité du patrimoine muséal. Après la remise du rapport Savoy & Sarr en novembre 2018, le président Macron annonce la restitution de 26 œuvres saisies par l’Armée française en 1892 et réclamées par le Bénin. Après des premiers signes d’avancées en juillet 2020 et l’examen par le gouvernement du « premier projet de loi permettant le transfert d’œuvres culturelles vers leur pays d’origine », l’Assemblée nationale française, sur demande de la ministre de la Culture Roselyne Bachelot, vote la restitution des pièces le 17 décembre 2020. La loi no 2020-1673 du 24 décembre 2020 relative à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal est publiée au Journal officiel le 26 décembre 2020. Les présidents Emmanuel Macron et Patrice Talon ont entériné la restitution de 26 œuvres des trésors royaux d’Abomey, conservées au musée parisien du Quai Branly le mardi 9 novembre 2021.
Exposition spéciale des trésors royaux au Quai Branly
Avant leur retour dans leur pays d’origine, les 26 trésors royaux ont été présentés au musée du quai Branly-Jacques Chirac du 26 au 31 octobre 2021. A cet effet, les arts, la culture et les traditions du Bénin ont été mis à l’honneur. Le parti pris de l’exposition se veut didactique et développe différents aspects de l’histoire des œuvres : de leur création à leur avenir dans leur pays d’origine en passant par une description précise du conflit colonial, de leur muséographie parisienne pendant plus d’un siècle et des spécificités juridiques. Echanges, débats et colloque scientifique international sont les principaux axes de la Semaine culturelle à Paris. Autres temps forts de cette semaine événementielle, la programmation de visites guidées, de spectacles et d’un cycle de cinéma. Des discussions ont été également organisées sur les projets muséographiques au Bénin. Cette programmation événementielle, conçue en concertation avec le gouvernement du Bénin, s’inscrit dans le cadre d’une politique de partenariats du musée à l’échelle internationale.
Retour sur la terre de leurs aïeux des trésors royaux
Après la signature de l’accord de transfert de propriété des œuvres, le mardi 9 novembre 2021, à l’Elysée, en présence du président Emmanuel Macron et du président Patrice Talon, les 26 trésors royaux sont rentrés au Bénin le mercredi 10 novembre. Évènement inédit, les œuvres rentrent au pays après un séjour de près de 130 ans en France. Une cérémonie symbolique a été organisée à cet effet. Le ministre des Affaires étrangères et de la coopération n’a pu cacher son émotion sur le tarmac de l’aéroport de Cotonou à l’atterrissage du cargo transportant les œuvres. « Il y a des instants dans l’histoire d’une Nation qui changent le cours des choses. Cet instant-là que nous vivons, c’est un instant qui restera gravé, c’est un instant important », a fait savoir Aurélien Agbénonci. Des centaines de personnes ont pris d’assaut le long de la route qui sépare l’aéroport de la présidence de la République pour regarder le passage de ces trésors, dont certains revêtent un caractère sacré. Au son des tambours et instruments de musique traditionnels, les Béninois venus de partout attendaient sur les trottoirs. Parmi les oeuvres figurent des statues totem de l’ancien royaume d’Abomey ainsi que le trône du roi Ghézo. Un tapis rouge a été déroulé dans les jardins de la présidence, où la cérémonie d’accueil a été dirigée par le chef de l’Etat, Patrice Talon. Une partie des oeuvres a été présentée lors de la cérémonie. Selon le calendrier, les 26 œuvres resteront deux à trois mois à la présidence de la République, le temps de l’acclimatation aux nouvelles conditions de climat et d’hygrométrie. Elles seront exposées au fort portugais de Ouidah en attendant d’être transférées définitivement au musée de l’épopée des amazones et des rois du Dahomey à Abomey. Un musée aux normes internationales, financé par l’Agence française de développement. Cette cérémonie solennelle au Bénin marque la dernière étape d’un processus inédit entamé avec la promesse faite en 2017 par le président français, Emmanuel Macron de procéder à des restitutions du patrimoine africain en France.
Adoption de la loi relative à la protection du patrimoine culturel
Pour marquer leur soutien et celui du peuple à l’initiative gouvernementale de réclamation des trésors royaux pillés, les députés ont approuvé à l’unanimité, le jeudi 14 octobre 2021 un important arsenal juridique en matière de protection du patrimoine culturel, après avis favorables donnés par la Commission de l’éducation, de la culture et des affaires sociales et celle des lois, de l’administration et des droits de l’homme. Avant l’adoption du texte, les élus du peuple, ont au cours du débat général, montré un intérêt particulier sur le sujet du retour des biens qui reste entre autres motifs majeurs de l’initiative de ce projet de loi. Ils ont notamment, apprécié l’initiative gouvernementale de réclamation des trésors royaux d’Abomey pillés pendant la période coloniale puis encouragée le chef de l’État et son gouvernement à aller jusqu’au bout de ce dossier. Leurs inquiétudes ont tourné essentiellement autour des infrastructures muséales à apprêter pour accueillir les œuvres, les ressources humaines formées pour la gestion et la conservation des biens, les dispositions sécuritaires prises et le sort réservé aux nombreux trésors royaux et patrimoniaux qui sont encore hors du Bénin. Le ministre du Tourisme, de la culture et des arts, dans son exposé de la vision du gouvernement et de la démarche qui sous-tend l’initiative de faire revenir les œuvres d’art dans le patrimoine de l’Etat, a fait savoir que le Bénin n’est pas dans une démarche conflictuelle, mais plutôt dans une démarche de coopération patrimoniale avec la partie française. Il s’agit notamment, de soutenir la vision du chef de l’Etat de bâtir le développement du Bénin sur l’agriculture et le tourisme en lien avec la culture et les arts. Une vision pour laquelle d’importants investissements sont faits, notamment dans la construction des infrastructures muséales et la formation des professionnels, la mise en œuvre des réformes. Cela, dans le but de mettre le tourisme béninois aux normes et standards internationaux.
Sur la question des préparatifs, Jean-Michel Abimbola a rassuré la Représentation nationale que « tous les aspects ont été pris en compte pour que le monde entier soit convaincu sur l’approche du gouvernement du président Patrice Talon. Il faut noter qu’à travers le vote de cette loi, le Parlement béninois vient de donner un appui au combat de l’Exécutif pour la protection de son trésor patrimonial et favoriser les options comme la restitution, la circulation des œuvres et autres faites par le Bénin. Des 90% de biens africains se trouvant hors de l’Afrique, le Bénin actionne ainsi la machine pour le retour au bercail des siens et prévenir toute tentative de pillage, destruction ou de transfert illicite de ces trésors, symboles de sa puissance royale. La loi relative à la protection du patrimoine culturel est un dispositif législatif de 164 articles organisés en 20 chapitres qui sont inclus dans 08 titres. Outre la protection du patrimoine, le nouveau texte de loi intègre des préoccupations nouvelles comme la circulation des biens culturels, leur transfert illicite, la protection des données informatiques liées au patrimoine culturel, la promotion du mécénat culturel et l’auto-assurance de l’État pour les biens culturels. Il prend également en compte la nécessité d’un meilleur encadrement juridique des musées publics et privés en tant que cadre de conversation et de valorisation du patrimoine culturel ainsi que le renforcement des sanctions pénales liées aux infractions touchant audit patrimoine.
Le Bénin révélé à ‘’The voice Afrique francophone’’
L’autre événement non moins majeur qui a aussi retenu l’attention au cours de l’année 2021, est la bonne participation du Bénin à la saison 3 de ‘’The voice Afrique francophone’’. Carina Sen, Mathilde Toussaint et Gyovanni Houessou ont vaillamment défendu les couleurs nationales à cette messe réunissant des talents musicaux venus du monde entier. Les trois (03) candidats en lice pour le Bénin n’ont pas pu franchir l’étape des demi-finales de la saison 3 de l’émission le samedi 24 avril 2021. De retour à Cotonou, les trois ambassadeurs de la musique béninoise ont été célébrés pour leur bonne prestation. Pour le ministre du Tourisme, de la culture et des arts, le gouvernement s’emploie à créer un environnement favorable pour qu’il y ait un engagement du secteur privé et aussi un marché afin que les investisseurs puissent récupérer leurs mises. L’objectif, c’est d’avoir de grosses maisons de production, de vrais managers, de vrais agents pour pouvoir accompagner l’ensemble des talents que nous avons au Bénin. Il faudrait créer la richesse en pariant sur ceux qui sont les plus talentueux, professionnels afin que cela rejaillisse sur l’économie.
Suspension des événements à caractère culturel
Face à la recrudescence des cas de Covid-19, le gouvernement béninois a pris le 23 août 2021, une série de mesures dont la suspension des événements à caractère culturel. Cette mesure a été provisoirement levée par le Comité interministériel de gestion de la crise sanitaire représenté par les ministres de la Santé, des Sports, du Tourisme de la culture et des arts à la suite d’une séance de concertation pour analyser la situation de la pandémie du Covid-19 au Bénin. Au regard donc de la diminution du nombre de nouveaux cas et de l’amélioration notable de la couverture vaccinale au Bénin, le Comité interministériel a provisoirement levé la mesure de suspension des manifestations culturelles le jeudi le 16 décembre 2021. Toutefois, l’organisation desdites manifestations est subordonnée aux autorisations habituelles requises dont celle du Ministère de la santé et leur déroulement doit se faire dans le strict respect des mesures de prévention recommandées notamment l’exigence d’un pass vaccinal ou d’un test Pcr de moins de 48 heures. La mesure de suspension a été réinstaurée le mardi 28 décembre 2021 du fait de la hausse des cas de Covid-19 qui font craindre le pire aux autorités du pays.
Odi I. Aïtchédji