(Des voies pour augmenter la production)
Au Bénin, l’apiculture est une activité génératrice de revenus. Elle génère divers produits tels que le miel, la cire, le pollen, la propolis, la gelée royale, le venin d’abeilles, etc. dont l’utilisation aussi bien en alimentation qu’en matière thérapeutique est établie. Les utilisations variées de ces produits par l’homme assurent un bon marché et représentent un revenu d’appoint pour l’apiculteur. En dépit de ces potentialités économiques et des services écosystémiques qu’offre l’apiculture, elle est confrontée à d’énormes défis, malgré le fait qu’elle bénéficie de l’attention des gouvernants.
Contrairement aux rumeurs et aux diverses insinuations, « le miel produit au Bénin ne coûte pas cher », a précisé Soumanou Raimi, secrétaire général de la Fédération des apiculteurs du Bénin, contacté par « Le Matinal ». « Payer le miel à 3500 Fcfa ou à 4000 Fcfa, ce n’est pas du tout cher. Dans la sous-région, le prix pratiqué est plus élevé que celui pratiqué au Bénin. Au Togo par exemple le litre du miel est en moyenne à 5000 Fcfa, pareil au Burkina Faso », a-t-il ajouté. L’apiculture est l’élevage des abeilles pour l’obtention du miel et de divers autres produits. C’est une activité très ancienne qui reste répandue dans le monde entier. Le miel, un aliment de grande valeur nutritive, est le principal produit de l’apiculture. Selon le codex alimentarius, « le miel est la substance naturelle sucrée produite par les abeilles à partir du nectar de plantes ou à partir de sécrétions provenant de parties vivantes de plantes ou à partir d’excrétions d’insectes butineurs laissées sur les parties vivantes de plantes, que les abeilles butinent, transforment en les combinant avec des substances spécifiques qu’elles sécrètent elles-mêmes, déposent, déshydratent, emmagasinent et laissent affiner et mûrir dans les rayons de la ruche ». La production de miel joue un rôle important dans l’économie et le mode de vie du pays.
5565 apiculteurs dont 172 femmes
La filière apicole emploie un nombre important de personnes. Selon le Recensement national de l’agriculture de la direction de la statistique agricole d’octobre 2021, l’apiculture est un pan de la production animale qui occupe nombre de Béninois dans tous les départements du pays à l’exception du Littoral. Ce recensement a permis d’identifier 4 803 ménages pratiquant l’apiculture dont 193 sont dirigés par des femmes. Il a été dénombré, au cours du recensement, 5 565 apiculteurs dont 172 femmes. Avec un poids de 47,24%, le Département de l’Atacora regroupe le plus grand nombre d’apiculteurs au Bénin. Il est suivi des départements du Plateau (12,92%), de l’Alibori (12,35%), de la Donga (11,14%) et du Borgou (7,51%). Par ailleurs, en termes de nombre de ruches, le Bénin en compte au total 25 536, soit une moyenne de 5 ruches par apiculteur. L’Atacora maintient la première place avec 11 707 ruches, suivi de l’Alibori (3791), de la Donga (2612), du Borgou (2498), du Plateau (2467) et des Collines (1109).
Une filière aux multiples défis
Selon Soumanou Raimi, le vrai problème auquel la filière est confrontée se situe au niveau des actes de vol et de vandalisme sur les ruches et les défis de formation. Ce qui fait que les acteurs de la filière apicole éprouvent des difficultés aux dires de Soumanou Raimi, sont essentiellement les actes de vol et de vandalisme sur les ruches qui permettent à ces gens malintentionnés ou à leur réseau de vendre du miel partout et aux abords des voies publiques. Alors même que la législation en vigueur voudrait que toute denrée alimentaire fasse l’objet d’autorisation avant sa mise sur marché pour être vendu. Le souhait de cet acteur apicole est que des textes de loi soient votés pour interdire la vente du miel aux abords des voies à tout venant. « Ceux qui détruisent les ruches des apiculteurs font usage des moyens prohibés. Ils utilisent de l’insecticide pour pouvoir décimer les abeilles pour récolter le miel. Ce faisant, quelques gouttes d’insecticide peuvent tomber dans le miel et quand on le consomme, on se rend malade », se désole Soumanou Raimi qui a fait remarquer qu’en tuant systématiquement toute colonie (80.000 abeilles au moins), ces voleurs empêchent ces insectes de jouer convenablement leur rôle dans la suivie de l’humanité. Ces abeilles sont des pollinisateurs. «Si les abeilles venaient à disparaître, l’humanité n’aurait plus que quatre ans devant elle». Cette phrase du chercheur Albert Einstein qui réapparaît dès que la question de la surmortalité des abeilles est soulevée, a été rappelée par Soumanou Raimi pour insister sur leur rôle. Il propose la sécurisation des ruches par les moyens technologiques comme l’internet en plaçant des caméras de surveillance. Mais là encore tous les apiculteurs n’ont pas les moyens pour le faire. Mieux, des zones restent encore non couvertes par la connexion internet. C’est pourquoi il demande aux gouvernants d’interdire dans les brefs délais la vente du miel au bord des voies. « Il ne suffit pas de détenir une ruche contenant des abeilles pour se déclarer apiculteur. Pour que la filière soit compétitive, on devrait avoir tous les maillons à savoir des équipementiers. On a un sérieux problème en ce qui concerne les équipements apicoles au Bénin. Nos artisans ne sont pas fins et cela fait qu’ils ont des difficultés à bien utiliser ces équipements de production et de transformation pour réussir pour atteindre les objectifs », a expliqué cet apiculteur.
Cadre légal et influences
La politique agricole influence aussi les chaînes de valeur du miel au Bénin. En tant qu’activité rurale, l’apiculture peut être influencée par les politiques d’accès au marché, d’accès au service et de croissance. De même, la promotion de certaines filières agricoles, dans le cadre de la politique agricole, constitue des opportunités pour l’apiculture. En effet, les plantations d’anacarde peuvent être associées à l’apiculture, accroissant les revenus qui en sont tirés par les producteurs ruraux. A l’inverse, les activités agricoles telles que l’élevage transhumant, le brûlis peuvent affecter considérablement l’apiculture. Enfin, quelques autres instruments législatifs et réglementaires peuvent influencer la performance des chaînes de valeur du miel au Bénin: les textes de loi sur la décentralisation, la politique fiscale. Les textes sur la décentralisation influencent, dans une certaine mesure, la gestion des ressources naturelles telles que les forêts dans les communes. En effet, la loi n° 97-029, portant organisation des communes en République du Bénin et l’installation des communes accorde des rôles et des responsabilités aux collectivités territoriales en matière de gestion des forêts, de la faune et des ressources naturelles dans le domaine forestier non permanent de l’État. En dehors du financement, la prolifération des réseaux de fabrication du faux miel à base du sucre et certaines pratiques de commercialisation (manipulation multiples des produits dans des emballages sans garantie d’hygiène) constituent des entraves à la performance des chaînes de valeur du miel au Bénin.
Sergino Lokossou (Coll)