(Et si l’opposition faisait preuve de lucidité ?)
A peine le Cadre de concertation des forces politiques de l’opposition a entrepris sa tournée de prise de contact avec les partis politiques sur la question de l’audit du fichier électoral, qu’il essuie déjà ses premiers revers. En effet, au niveau des deux grandes formations politiques de la mouvance, l’Union progressiste le renouveau et le Bloc républicain, des griefs pertinents sont portés contre l’initiative d’audit projet, au point de la vider de son objet. Dès lors, l’opposition se retrouve dans un dilemme.
Depuis quelques mois, une frange de l’opposition béninoise, réunie au sein du Cadre de concertation des forces politiques de l’opposition, a engagé le débat et visant le contrôle du dispositif d’organisation des élections, notamment le fichier électoral. Une requête salutaire et légitime et à laquelle le gouvernement a d’ailleurs fait droit. En effet, l’audit du fichier électoral règle, le cas échéant, est un gage de transparence et de crédibilité du scrutin en ce qu’elle rassure les partis politiques engagés dans la compétition électorale quant à sa fiabilité. Cependant, l’unanimité semble ne pas se faire autour de l’approche des initiateurs de l’audit. C’est d’abord l’Union progressiste le Renouveau qui, au travers d’un communiqué en date du 25 novembre 2024, a fait des observations à la délégation du Cadre de concertation des forces politiques de l’opposition venue à son siège annexe. Ces observations sont relatives aussi bien à la forme et au fond. Dans la forme, le parti estime que l’initiative est fondée « sur un manque de confiance ». Pour ce qui est du fond, le parti présidé par Joseph Djogbénou se dit gêné par l’expression “fichier électoral” qui selon lui, n’a plus aucune réalité dans l’arsenal juridique et administratif du Bénin. Il trouve par ailleurs que « la demande est en déphasage avec les lois en vigueur au Bénin qui organisent l’établissement de la liste électorale informatisée (Lei) ». Autant de raisons pour lesquelles, le parti de la majorité parlementaire et présidentielle, dit ne pas s’associer à la démarche portée par le Cadre de concertations des partis de l’opposition.
Une méconnaissance des lois
indexée
Outre les observations faites supra, l’Union progressiste le renouveau, juge la démarche d’audit inopportune en raison de ce qu’au regard de la loi, la liste électorale devant servir aux élections de 2026, n’est pas encore générée. Observation réitérée par le Bloc républicain pour qui l’initiative manque de pertinence et cacherait même des intentions inavouées de révision du Code électoral.
Ce que prescrivent les textes
Conformément aux lois en vigueur notamment la loi n°2017-08 du 19 juin 2017 portant identification des personnes physiques en République du Bénin et la loi n° 019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral, « l’Anip transmet 180 jours avant la date du scrutin, la statistique relative à la Lei (ndlr estimations des citoyens en âge de voter et sans leurs centres de vote) ; 120 jours avant les élections couplées législatives/communales, l’Anip procède à l’extraction de la Leip du registre national (prise en compte des centres de vote ndlr ). La Lei est transmise à la Cena 60 jours avant le 1er scrutin de l’année électorale après l’avoir publiée pendant 15 jours ». A la lecture de ces dispositions, il se dégage clairement que l’opposition semble avoir méconnu ou mal apprécié les textes. Ce qui traduit son incurie et donné l’impression qu’elle s’aventure sur un terrain sur lequel elle risque de ne pas avoir de la matière.
Les options qui s’offrent à
l’opposition
S’étant retrouvée quasiment dans un trou de souris, l’opposition est désormais face à un dilemme. Faut-il foncer tête baissée vers un audit où la matière est inexistante ? Ou plutôt se raviser et attendre que les choses soient bien ficelées avant de faire l’audit. Déjà, il se susurre que l’audit se fera sur la liste électorale ayant servi à l’organisation des dernières élections en date, en l’occurrence les Législatives du 8 janvier 2023. De toutes les façons, le Cadre de concertation des forces politiques de l’opposition, se retrouve à un carrefour critique et joue sa crédibilité. Cela appelle de sa part, une décision responsable et objective puisqu’en définitive, le Cadre garde le lead de son initiative et des actions qui en découlent.
Gabin Goubiyi