(Zoom sur les incohérences du texte de loi)
Les députés pourraient probablement se pencher ce vendredi 1er mars 2024 sur les deux points les plus attendus de la première session extraordinaire de l’année 2024 qui s’est ouverte le 21 février dernier. Il s’agit de l’examen de la proposition de loi portant révision de la Constitution de la République du Bénin et celui de la proposition de loi modifiant et complétant la loi n°2019-43 du 15 novembre 2019 portant Code électoral en République Bénin. Dans la foulée, des points contenus dans la proposition du député Nourénou Atchadé suscite moult débats.
En attendant l’examen par la plénière de ces deux points cruciaux de l’ordre du jour, le peuple garde son souffle. Une question taraude cependant les esprits. Elle est relative au sort qui sera réservé à la proposition de loi initiée par le parti Les démocrates et portée par le député Nourénou Atchadé. A priori, on pourrait dire qu’au regard de l’infériorité numérique des députés soutenant la proposition de loi, d’autres facteurs risquent de compromettre son adoption. En effet, beaucoup estiment que certaines modifications suggérées par le député initiateur de la loi sont de nature à alourdir les dépenses liées à l’organisation des élections, une équation qu’a pourtant voulu résoudre le législateur en optant pour l’alignement pertinent des mandats à travers l’institution d’une année électorale. Sous ce registre, est cité l’article 37 nouveau qui dispose que soit créée pour chaque élection, une commission d’arrondissement composée d’un (01) représentant de la Céna, d’un (01) représentant de la Cour constitutionnelle et d’un (01) représentant de chaque candidat ou liste de candidats. Par ailleurs, l’alinéa 2 du même article prévoit même qu’« En cas d’élections couplées, législatives-communales/municipales, en plus des membres prévus au premier alinéa, un membre de la commission d’arrondissement est désigné par la Cour suprême.». L’autre modification qui est pointée du doigt parce que susceptible d’induire des dépenses supplémentaires à l’organisation des élections est celle contenue dans l’article 66 nouveau relativement aux membres des postes de vote. Il indique que « Le poste de vote est composé de: un (01) président ; deux (02) assesseurs. En cas de couplage, le poste de vote est composé de deux (02) assesseurs par urne ; un (01) représentant de la mouvance parlementaire ; et un (01) représentant de l’opposition parlementaire. ». Il y a enfin la modification suggérée à l’article 120 nouveau qui prévoit que « l’extraction de la liste électorale informatisée est faite sous la supervision d’une commission ad’hoc composée de : deux (02) représentants de la mouvance parlementaire ; deux (02) représentants de l’opposition parlementaire ; un (01) représentant issu de la plate-forme des organisations de la société civile intervenant dans le domaine de la gouvernance électorale ; deux (02) experts désignés, l’un par le Président de la République et l’autre par le chef de file de l’opposition. ». Ces trois modifications selon certains observateurs, révèlent une certaine incohérence du parti Les démocrates. Alors qu’il plaide pour une suppression du quitus fiscal, et une diminution du cautionnement, ce qui induit une diminution substantielle des ressources de l’Etat, le parti Les démocrates fait dans le même temps des propositions qui vont alourdir la ligne budgétaire des élections. Beaucoup trouvent incohérente cette approche du parti Ld qui n’est pas de nature à crédibiliser sa proposition de loi.
D’autres propositions sujettes à polémique
En plus de la volonté manifeste d’augmenter les charges financières liées aux élections, la proposition du député Nourénou Atchadé est taxée de remettre en cause la réforme du système partisan. C’est du moins la lecture qui se dégage de la modification suggérée à l’alinéa 1er de l’article 146 nouveau de la proposition de loi du député de la minorité parlementaire. L’article donne à lire que « Seules les listes, ayant recueilli ou moins 05% des suffrages valablement exprimés ou plan national, sont éligibles à l’attribution des sièges. ». En clair, il s’agit d’une réduction du pourcentage requis pour prétendre à l’attribution de sièges, lequel était de 10% dans la loi n°2019-43 du 15 novembre 2019 portant Code électoral en République Bénin. Quoique guidée par un souci de sauver les micro-partis qui sont éprouvés par cette disposition, beaucoup redoutent que cette proposition ne soit la porte ouverte à la création anarchique de partis politiques. Ce qui serait en totale déphasage par rapport à la philosophie de la réforme du système partisan qui vise à clarifier le paysage politique et promouvoir la création de grands ensembles.
Abdourhamane Touré