Le Conseil des ministres du mercredi 19 février 2025 a franchi un nouveau cap en adoptant une mesure cruciale pour la sécurisation du secteur de la santé. Il s’agit des dispositions particulières transitoires applicables à la reconnaissance de l’équivalence des diplômes issus des établissements privés étrangers de formation aux professions de santé qui ne figurent pas sur la liste des établissements dont les diplômes sont directement éligibles à la reconnaissance de l’équivalence.
Depuis quelques années, le gouvernement béninois a amorcé une transformation en profondeur du secteur de la santé au Bénin. Cette politique de modernisation s’accompagne de nombreuses réformes visant à améliorer la prise en charge des patients et à garantir des soins de santé de qualité. Il est indéniable que cette initiative est un travail de longue haleine. Avec méthode et rigueur, le Gouvernement pose pierre après pierre, pour bâtir un système de santé à la hauteur des standards internationaux. La réforme du secteur sanitaire repose sur une approche holistique, prenant en compte aussi bien les infrastructures que les ressources humaines et la réglementation. La décision prise en conseil des ministres hier, mercredi 19 février 2025, cible spécifiquement les diplômés issus d’établissements privés étrangers de formation en santé qui ne sont pas reconnus par l’État béninois. Elle fait suite à un constat faisant état de ce que ces diplômés ne possèdent même pas le baccalauréat, ce qui soulève de sérieuses interrogations sur la fiabilité de leurs formations et la qualité des soins qu’ils pourraient dispenser. La problématique est d’actualité et suscite de nombreuses discussions : comment garantir que les Béninois formés à l’étranger et souhaitant exercer dans le pays répondent aux normes exigées ? Le gouvernement s’est intéressé de longue date à cette question et s’emploie à protéger le secteur de la santé tout en préservant les aspirations légitimes de ses citoyens formés à l’étranger.
Etat des lieux
On observe une prolifération d’établissements privés de formation médicale et paramédicale dans la sous-région, avec des standards parfois préoccupants. Face à cette situation, le Gouvernement a adopté des mesures pour encadrer le processus de reconnaissance des diplômes. Le décret du 18 octobre 2023, portant sur l’attribution, l’organisation et le fonctionnement de la Commission nationale d’étude des équivalences de diplômes, encadre strictement l’obtention de l’équivalence pour les formations médicales et paramédicales privées. Ce décret stipule, en son article 6, que seuls les diplômes issus d’établissements figurant sur une liste dérogatoire fixée par décret peuvent prétendre à une reconnaissance officielle. Si cette précaution constitue une avancée majeure, elle n’a pas suffi à dissiper toutes les inquiétudes. En effet, des erreurs médicales aux conséquences parfois irréversibles continuent d’être observées. La situation reste préoccupante, notamment en raison du nombre croissant de demandes d’équivalence en attente et des bénéficiaires de cette reconnaissance.
Vers un système de santé plus performant
La décision prise lors du Conseil des ministres du 19 février 2025 vient renforcer le dispositif existant en mettant en place un cadre transitoire plus strict pour l’évaluation des diplômes étrangers. Il s’agit d’une mesure essentielle pour garantir que le système de santé béninois reste performant et sécurisé, tout en valorisant des professionnels véritablement qualifiés pour exercer au service de la population. À ce jour, on dénombre au moins 16 médecins, 157 sages-femmes et 2097 infirmiers béninois titulaires des diplômes délivrés par ces établissements et dont les requêtes pour l’obtention de l’équivalence sont en attente. Ces chiffres ne prennent pas en compte ceux qui avaient déjà pu bénéficier de cette reconnaissance. Face à cette situation, il sied pour un gouvernement responsable d’aller plus loin. Afin de prémunir les populations contre les erreurs médicales aux conséquences irréversibles mentionnées plus haut, le gouvernement a décidé de mettre en place un dispositif spécial de recyclage des diplômés concernés afin de les habiliter à exercer au Bénin. Cette mesure, qui consiste en des sessions de recyclage, n’est pas une restriction supplémentaire mais vient apporter encore plus d’assurance. Elle concerne deux catégories de personnes : les professionnels de santé ayant déjà obtenu leurs diplômes dans ces établissements privés étrangers ne figurant pas sur la liste des établissements directement éligibles à la reconnaissance de l’équivalence et les étudiants ayant commencé leur formation en sciences de la santé dans ces établissements avant l’entrée en vigueur du présent décret.
Un filtre nécessaire
Le mode opératoire du dispositif repose sur l’évaluation des compétences des personnes concernées en vue d’organiser des sessions de renforcement de capacités adaptées. Ces sessions prendront la forme de modules de cours théoriques et de stages pratiques sur une période d’un an, dispensés dans les établissements de santé et sanctionnés par un certificat d’aptitude. Ce procédé n’est pas une invention béninoise. Le gouvernement peut être félicité pour avoir trouvé une solution juste qui ne pénalise pas excessivement ces diplômés. En comparaison, certains pays européens imposent des rétrogradations et des obligations d’études complémentaires aux diplômés dans des conditions similaires. Cette décision, bien que difficile, est courageuse et vise l’intérêt général. Elle a pour principal objectif la protection de la santé des populations. Elle ne remet pas en cause la validité des diplômes obtenus, mais s’assure que les compétences et qualifications des détenteurs sont conformes aux normes et standards du système éducatif béninois. Il est également important de préciser que cette mesure ne concerne que les diplômes issus des écoles privées, excluant ainsi ceux des écoles publiques, qui bénéficient d’une présomption de sérieux. En effet, on ignore souvent dans quelles conditions ces écoles privées sont autorisées à fonctionner ni qui sont les formateurs qui y dispensent les cours. Le Gouvernement, tout en garantissant à ses compatriotes leur droit aux soins, est également tenu par l’obligation de protéger la vie et d’assurer des soins de qualité. C’est dans cet esprit que cette décision a été prise, combinant à la fois le souci d’une formation adéquate et la nécessité d’un encadrement rigoureux des pratiques médicales dans le pays.
Gabin Goubiyi