La communauté internationale célèbre chaque année la fête de la musique. Occasion pour les acteurs de chaque pays de faire l’état des lieux afin de définir de nouvelles perspectives. Notre rédaction a recueilli pour vous, quelques avis des Béninois sur le sujet. Lisez plutôt !
Auguste Amoussou, manager : «Sur cent artistes béninois aujourd’hui, les vrais n’atteignent pas dix… »
« Je dirai simplement que la musique béninoise a évolué depuis 1960 à nos jours. Néanmoins, elle souffre de plusieurs insuffisances notamment au plan interne. Au niveau du Bénin, il manque cruellement la promotion. Nos radios et nos télévisions jouent à peine à 10%, les musiques qui viennent de chez nous alors que dans d’autres pays, ils n’écoutent et consomment que leurs musiques. Au plan international, le problème se pose aussi. Nous n’avons pas assez de références comme dans les pays comme le Sénégal, le Nigéria, la Côte d’Ivoire et le Congo où ils ont plusieurs artistes sur le plan international qui émergent. L’autre chose est que le Bénin n’a pas une identité sur le plan musical. Quand vous allez dans d’autres pays, ils sont identifiés à travers des rythmes, mais ici, on est consommateur des musiques qui viennent d’ailleurs. En outre, les artistes béninois ne s’aiment pas entre eux. Ils ont des difficultés d’abord à l’interne pour collaborer en raison des différends qu’ils entretiennent. Sur le plan professionnel, beaucoup sont venus dans le métier sans être véritablement des artistes. Sur cent artistes béninois aujourd’hui, les vrais n’atteignent pas dix. Je veux finir en demandant à tous les acteurs de la chaîne de la musique béninoise en commençant par les managers de se former. C’est important pour la valorisation de notre musique. Il faut aussi penser à mettre en place des mesures pour obliger les radios et télévisions à faire consommer aux populations la musique béninoise à plus 95% à des heures de grande audience ».
Jeannot Agbanha, animateur : « Comparativement à 10 ou 15 ans en arrière, la musique s’est développée… »
« Comparativement à dix ou quinze ans en arrière, il faut avouer que la musique béninoise a connu un développement ces derniers temps. Nous avons une nouvelle génération d’artistes qui font quand même plus ou moins la fierté du pays. Juste qu’il faut reconnaître que dans notre tête au Bénin, nous ne sommes pas encore à ce stade où nous devons imposer nous-mêmes nos artistes. On préfère écouter les artistes de l’extérieur plutôt que nos artistes d’ici. Ce qui fait que le développement que nous aurons souhaité pour les artistes tarde, mais j’ai foi qu’avec le travail qui se fait, d’ici les années à venir, nous serons fiers que le Bénin soit représenté beaucoup plus au niveau international ».
Kally Tayé Agbogba, journaliste culturel. « La véritable question est ce que l’Etat fait pour la musique béninoise… »
« La musique béninoise a évolué. Depuis quelques années. On assiste à une évolution encourageante de la part des créateurs et les autres acteurs de l’industrie musicale au Bénin. Nous devons rester sur cette ligne, mais la grosse problématique qui se pose aujourd’hui est ce que l’Etat central apporte comme soutien. Nous sentons que la musique béninoise est délaissée aux promoteurs privés. Nous sommes dans un pays et je pense que l’Etat central doit mettre la main à la pâte pour donner une bonne image et vendre autrement cette musique. Le tout ne suffit pas d’organiser des concerts périodiques, mais il faut mettre des politiques en place afin de permettre à tous les acteurs de vivre la musique et qu’elle soit vraiment professionnalisée ».
Lucette A, promotrice culturelle : « La majorité des Béninois préfèrent ce qui vient de l’extérieur… »
Au Bénin, nous avons de très bons artistes qui font un grand boulot que ce soit au plan moderne ou traditionnel. Néanmoins, il faut remarquer qu’à leur niveau, ils n’arrivent pas à se valoriser comme cela se doit et ne sont pas assez valorisés. La majorité des Béninois préfèrent ce qui vient de l’extérieur. Il est vrai que ce que vient de l’international est impeccable, mais c’est le fruit d’un grand travail et de longue date. Ils ne sont pas devenus ce qu’ils sont du jour au lendemain. C’est ce que les artistes béninois doivent aussi comprendre et beaucoup travailler. Je propose aux autorités et à tous les acteurs de l’industrie musicale d’offrir des opportunités aux artistes que ce soit les anciens ou les débutants de montrer leur savoir-faire. Il faut penser à varier les artistes invités sur des concerts organisés par le gouvernement ou les promoteurs privés, car nous remarquons que c’est toujours les mêmes qu’on retrouve sur les concerts. La promotion de la musique béninoise passe par là ».
Propos recueillis par Mohamed Yasser Amoussa (Coll)