(Sèhouéto, Gbénonchi et Houngbédji réticents)
L’initiative d’une proposition de loi spéciale d’amnistie pour la libération de Reckya Madougou, Joël Aïvo et d’autres opposants condamnés, en détention ou en exil risque de faire flop et pour cause. Les récentes déclarations du député Lazare Séhouéto sur un media en ligne de la place a en effet relancé le débat sur les chances d’aboutissement ou non du projet porté par le parti présidé par Eric Houndété.
Les députés du parti « Les démocrates » ont fait de la libération de Reckya Madougou, Joël Aïvo et autres opposants condamnés ou en exil, une question de vie de mort. Le sujet a pratiquement été au cœur de la campagne électorale des dernières Législatives pour le parti de l’opposition qui a vu son rêve d’obtenir la majorité au Parlement brisé au regard des résultats ayant sanctionné le scrutin. En effet, Eric Houndété et Cie n’ont pu obtenir que 28 députés, un score qui le met en situation de minorité. En dépit de ce statut qui ne leur permet pas d’avoir assez de marges de manœuvres, ces députés ont présenté à la presse le vendredi 24 mars 2023, une proposition de loi spéciale d’amnistie. La proposition est rédigée pour faciliter la décrispation, la pacification et la réunification, affirment-ils. Ils ont d’ailleurs à l’occasion invité « son Excellence Patrice Talon, président de la République et père de toutes les Béninoises et de tous les Béninois d’œuvrer pour l’aboutissement heureux de cette loi, toute chose qui renforcera son bilan économique, politique et social ». Quoique cette initiative confirme leur détermination à œuvrer à la libération de leurs compatriotes en conflit avec la justice, il n’en demeure pas moins que pour réaliser leur ambition, réitérée d’ailleurs lors de la constitution de leur groupe parlementaire, le parti de l’opposition radicale devra composer avec ses pairs de la majorité parlementaire.
Des postures qui mettent le projet en péril
Dans une récente interview qui a fait le tour des réseaux sociaux, le député Lazare Séhouéto a tout comme d’autres caciques du pouvoir en place (Gérard Gbénonchi et Wilfried Léandre Houngbédji) clairement indiqué sa position sur cette loi. L’élu de la 24ème circonscription électorale dit ne pas être favorable au vote d’une loi d’amnistie en faveur de Reckya Madougou. Il dit être cependant disposé à accorder son vote au profit du professeur Joël Aïvo puisqu’il estime « qu’il n’y a pas eu de preuves directement liées à lui qu’on pourrait rattacher aux actes criminels qu’on lui reproche. On peut dire qu’il est le commanditaire ». Une position qui montre la réticence de l’homme qui visiblement n’est pas en phase avec ses collègues porteurs de la proposition de loi. Avant lui, son collègue du même parti Gérard Gbénonchi avait exposé son approche. En effet, face à la loi d’amnistie des Démocrates, Gbénonchi a fait une autre proposition. Interrogé sur cette proposition de loi, le député Gérard Gbénonchi estime que cette proposition de loi n’a pas sa raison d’être. Pour le deuxième vice-président du parti Union progressiste Le renouveau, il y a déjà eu un précédent en 2019 avec le vote d’une loi d’amnistie pour permettre la libération des personnes incarcérées dans le cadre des violences pré et post-électorales de cette année-là. Le gouvernement, par l’entremise de son porte-parole a également été invité dans une de ses sorties médiatiques à se prononcer sur la position du gouvernement vis-à-vis de cette loi. A l’occasion, Wilfried Léandre Houngbédji avait indiqué que «si la loi arrive sur la table du chef de l’État, il va apprécier. Mais en amont, je ne sais pas » et d’ajouter qu’«ils (les députés toutes tendances confondues Ndlr) n’ont qu’à régler leur problème à l’Assemblée nationale ». Face à ces différentes approches, on se demande si véritablement les députés du groupe parlementaire « Les démocrates » parviendront à convaincre leurs collègues de la mouvance pour obtenir leur adhésion autour de la proposition de loi portant amnistie générale des prisonniers politiques. Wait and see.
Abdourhamane Touré