Le Bénin, pays désormais mis sur les rails du développement énergétique depuis avril 2016, a-t-il une politique en ce qui concerne le hors-réseau ? Cette immense question a fait l’objet de préoccupation lors de l’atelier national initié par la Cedeao dans le cadre de la mise en œuvre du Projet régional d’accès à l’électricité hors réseau (Rogeap) le 17 août 2022 à Cotonou.
Le hors réseau fait partie intégrante de la stratégie du gouvernement béninois visant à permettre l’accès à l’électricité à tous au Bénin d’ici l’horizon 2030. C’est l’assurance donnée par les cadres de la Direction générale des ressources énergétiques lors de l’atelier national initié par la Cedeao dans le cadre de la mise en œuvre du Projet régional d’accès à l’électricité hors réseau (Rogeap) le 17 août 2022 à Novotel à Cotonou. Il existe bel et bien une politique nationale du hors réseau. Selon ce document, la vision du Gouvernement du Bénin en matière d’électrification hors réseau est de « Fournir à chaque béninoise et béninois, particulier ou acteur économique, un accès équitable et sans discrimination à un service électrique adéquat et de qualité, grâce à l’implication accrue du secteur privé ». Trois objectifs stratégiques gouvernent ce bréviaire. Primo, il s’agit de rendre attrayante la participation du secteur privé à la réalisation et à la gestion de l’électrification hors réseau, notamment en développant un cadre réglementaire attrayant pour le privé, en accompagnant le financement du secteur privé, en définissant une tarification sécurisant l’investissement privé tout en garantissant un coût accessible pour les bénéficiaires finaux et en assurant le professionnalisme des acteurs de l’Ehr. Secundo, l’objectif stratégique N°2 vise à contribuer au développement économique, au bien-être des populations et au renforcement de la gouvernance. A cet effet, le gouvernement béninois œuvre de sorte à assurer un traitement non discriminatoire, à promouvoir l’utilisation des énergies renouvelables et une prise en compte du genre et de l’inclusion sociale dans l’Ehr. Cela, pour que l’activité économique soit au service du développement local. C’est pourquoi l’approche Ehr au Bénin est équitable du point de vue des départements et des consommateurs. Avec l’objectif stratégique N°3, l’Exécutif s’emploie à assurer la qualité de l’Ehr par une approche normative au niveau des produits, des systèmes et de la certification des techniciens. Ainsi, il développe et applique les normes de service Ehr, les normes de qualité des équipements, les normes techniques et la Réglementation environnementale.
Régime juridique du hors réseau
Au Bénin, l’installation ou l’exploitation d’un système d’électrification hors-réseau nécessite la détention d’un titre d’exploitation pour la fourniture de service public d’électricité, délivré par l’autorité compétente, après avis conforme de l’Autorité de régulation de l’électricité (Are). On distingue le régime d’autorisation et le régime de concession. Avec le régime d’autorisation, l’autorisation est délivrée pour les activités de production, de distribution, de vente d’électricité et de services électriques hors-réseau. La capacité cumulée totale doit être inférieure ou égale à (500Kva). Peut aussi être autorisé le système d’électrification hors réseau dans une même commune ou plusieurs communes limitrophes (Périmètre d’action bien défini). L’autorisation est délivrée par l’Aberme et nécessite l’approbation de l’Are. La durée est de 15 ans. Pour le régime de concession, la convention d’électrification hors réseau couvre les activités de production, de distribution et de vente d’électricité dans une zone hors-réseau. La capacité cumulée totale est supérieure à 500 Kva. La convention de concession est signée après avis conforme de l’Autorité de régulation de l’électricité (Are) pour une durée de 25 ans. En somme, ce régime juridique du hors réseau est en quelque sorte un cadre favorable à l’investissement privé, car l’intervention de l’Are est un gage de transparence. L’Autorité intervient à chaque étape importante du projet. Les modes de passation de projet s’établissent sur l’appel à concurrence. Il est obligatoire pour les projets d’une capacité cumulée supérieure à 500 Kva. Il doit se faire en deux phases: la phase de présélection et une phase de sélection. Les appels à concurrence se font sur la base d’une programmation triennale, sauf nécessité urgente. Les offres spontanées se font pour des projets dont la capacité cumulée à 500 Kva avec la nécessité d’avoir un mémorandum d’entente signé entre le promoteur et le maire de la localité où l’installation est envisagée.
Les délais de l’Aberme
L’Aberme dispose de 2 mois, à compter de la date de clôture de dépôt ou de dépôt de toute offre spontanée, pour se prononcer. Pendant cette période, l’Aberme peut demander aux promoteurs et aux parties prenantes toutes informations complémentaires. Elle soumet le dossier de projet d’analyse à l’avis préalable de l’Are qui dispose d’un mois à compter de la date de saisine pour prendre une décision. A défaut, elle est réputée avoir émis un avis favorable. En cas d’avis favorable de l’Are, l’Aberme dispose d’un délai de dix 10 jours ouvrés pour délivrer une autorisation. L’Autorité de régulation de l’électricité, quant à elle, dispose de 15 jours ouvrés à compter de la saisine pour prendre une décision sur la demande d’approbation de tout appel à concurrence A défaut, elle est réputée avoir émis un avis favorable. L’analyse des offres ne doit pas dépasser quatre 4 mois. L’Are dispose d’un 01 mois, à compter de la date de sa saisine, pour prendre une décision sur toute convention de concession, à défaut elle est réputée avoir émis un avis favorable. En cas d’obtention d’une autorisation, l’autorité dispose de quinze 15 jours ouvrés à compter de la date de saisine pour prendre une décision sur la demande d’approbation de tout appel à concurrence A défaut elle est réputée avoir émis un avis favorable.
La protection du partenaire privé à l’arrivée du réseau
L’objectif a été d’atténuer les effets de l’arrivée du réseau moyenne tension. Trois solutions sont envisagées. Le titulaire du titre a la possibilité de continuer son activité dans son périmètre. Il pourra acheter de l’électricité à partir du réseau moyenne tension afin de compléter sa propre production. Le tarif sera négocié avec le concessionnaire du réseau de distribution et approuvé par l’Autorité de régulation de l’électricité. Le titulaire du titre peut également abandonner son activité de distribution et de vente d’électricité hors réseau au profit du concessionnaire et conserver son activité de producteur indépendant d’électricité. Il peut dans ce cas demander une compensation et une convention de concession de production et un contrat d’achat seront négociés avec l’approbation de l’Are. Au cas où le raccordement au réseau causerait une détérioration irréversible des conditions de gestion financière du titulaire d’un titre d’exploitation, il peut demander la résiliation de ses obligations et solliciter une indemnisation de la part de l’autorité concédante. Il est important de souligner qu’afin d’atténuer les effets de l’arrivée de la moyenne tension, les normes de concessions exigées doivent être compatibles avec le réseau national.
Il convient de préciser que la coordination des activités d’électrification hors-réseau est faite par le Ministère de l’Energie. Le bras opérationnel du Ministère est l’Aberme. Le suivi-évaluation est mené par la Dgre. Le financement est tripartite : état-Ptd-secteur privé. Les renforcements de capacité sont aujourd’hui essentiellement menés par des institutions internationales comme l’Asi et la Giz.
Joël Samson Bossou