Depuis quelques jours, l’actualité béninoise est marquée de toutes parts, par une floraison d’appels à la libération de Reckya Madougou et Frédéric Joël Aïvo, condamnés en décembre 2021, respectivement à 20 ans et 10 ans d’emprisonnement par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet). Face à cette pression qui ne dit pas son nom, les partis de la majorité présidentielle affichent une indifférence qui suscite des interrogations.
Les partis de la majorité présidentielle sont-ils décidés à laisser libre cours aux manœuvres de déstabilisation du régime du Nouveau départ? L’on est bien tenté de répondre par l’affirmative à cette interrogation au regard de l’attitude suspecte qu’affichent les soutiens du pouvoir tapis dans les rangs des deux partis politiques soutenant les actions du chef de l’Etat. L’Union progressiste Le renouveau et le Bloc républicain semblent en effet se désintéresser de la flopée de griefs et d’attaques contre le régime à la faveur de l’an 2 de l’arrestation de Reckya Madougou. Une circonstance à l’occasion de laquelle, anciens chefs d’Etat, acteurs politiques de l’opposition, membres de la société civile et députés du partis « Les démocrates » ont dégainé contre le pouvoir de Talon, le conjurant de mettre en liberté Reckya Madougou et Frédéric Joël Aïvo ainsi que tous les prisonniers dits politiques privés de leur liberté par le pouvoir. Même si la relative indifférence du chef de l’Etat face au tollé populaire peut être comprise par le fait qu’il a déjà donné son approche sur le sujet, paraît celle de ses soutiens suspecte à maints égards. Beaucoup peinent à comprendre en effet, ce qui justifie le silence des partis politiques Up Le renouveau et le Br relativement à cette actualité à l’aune de laquelle, les partis de l’opposition ont caporalisé l’espace public. Il n’est plus un secret que l’actualité est dominée par ce sujet sur lequel l’opposition surfe à volonté sans réplique de la part du pouvoir. A moins d’apporter la preuve contraire, le silence des formations politiques de la mouvance sur cette actualité, laisse croire à une adhésion aux revendications de leurs adversaires politiques. Sinon comprendre qu’en dépit de l’exacerbation de cette actualité sur laquelle l’opposition s’agrippe pour dépiécer le régime, les chiens de garde se comportent comme si de rien n’était et ne font montre d’aucune initiative de réplique. S’il est vrai qu’au-delà de la sensibilité du sujet en cause qui, quoiqu’on dise a été réglée par la justice, il reste une vérité indéniable que le combat qui se mène est éminemment politique en ce qu’il met le pays dans une situation inconfortable face aux graves cas de violation de droits du prisonnier évoqués çà et là. A qui devrait profiter un éventuel déclassement ou un isolement du Bénin à l’international ? L’on serait tenté d’indexer l’opposition mais à la vérité, les vrais auteurs d’une telle débâcle seraient dans les rangs des deux grands partis qui prétendent soutenir les actions du chef de l’Etat mais qui en silence, travaillent à faire infléchir la dynamique en cours depuis 2016.
La réaction de l’Up Le renouveau et du Br attendue
Abonnées au silence depuis les dernières élections législatives, les deux grandes formations politiques de la majorité présidentielle, pourraient à tort justifier leur posture par la nécessité d’un repli tactique après les échéances électorales du 8 janvier 2023. Mais à la vérité, aucun silence ne pourrait participer d’une stratégie politique quand votre leader charismatique et son régime sont attaqués avec une telle virulence. Au demeurant, l’indifférence des partis de la mouvance pourrait s’assimiler à une démission du champ politique. Quoique salutaire, les initiatives personnelles et les approches individuelles ne sauraient être confondues à une prise formelle de position par les partis en cause. Sur ce volet, il convient de reconnaître le mérite de Fred Houénou et Bertin Coovi qui ont osé briser l’omerta sur la question. A leur suite, les partis politiques devraient prendre le pli et apporter la réplique à l’adversaire qui ne rate aucune occasion pour bousculer les lignes et sonner le tocsin d’un système qui croyait depuis lors avoir le vent en poupe. Les réalités politiques n’étant plus les mêmes depuis l’entrée au parlement de l’opposition, l’Union progressiste le renouveau et le Bloc républicain doivent comprendre que la bataille ne sera pas aisée jusqu’aux prochaines élections générales prévues pour se tenir en 2026. 2026 semble peut être encore loin mais en vérité, il se joue déjà sur le champ politique. Et dans ce challenge, l’opposition joue déjà les cartes qu’elle a en main. En l’absence de réplique, elle fonce et donne l’impression de contraindre l’adversaire au silence. Elle a visiblement compris que l’affaire Reckya Madougou et Frédéric Joël Aïvo pourrait être la clé de voute des échéances électorales de 2026. En face, ça dort et ça donne l’impression qu’on n’a plus d’arguments pour convaincre ou qu’on veut cautionner par le silence, la fin d’une époque.
Gabin Goubiyi