L’actualité socio-politique au Bénin est marquée depuis le mardi 24 septembre 2024, par l’interpellation de l’homme d’affaires Olivier Boco, dont la proximité d’avec l’actuel président de la république est de notoriété publique. Au regard de son poids dans le landerneau politique et de son influence sur l’échiquier et même dans l’appareil d’Etat, il n’y a l’ombre d’aucun doute que ses actuels déboires vont induire une redistribution des cartes sur l’échiquier politique.
C’est un feuilleton sulfureux qui s’ouvre dans la sphère politique béninoise. L’arrestation du patron du groupe Denrées et fournitures alimentaires (Dfa), partenaire d’affaires et ami de Patrice Talon depuis plus d’une vingtaine d’années, ne sera pas sans conséquence sur le paysage politique. Même si à son annonce, l’information a été prise avec pincette par une certaine opinion, les heures qui ont suivi ont dissipé les doutes pour laisser place à l’évidence. Olivier Boko, « bras droit » et un des pions du régime Talon, que les partisans appellent communément « OB » par référence à ses initiales, a bel et bien été mis aux arrêts même si le mystère continue d’être entretenu sur le lieu de sa détention. 24 heures après son interpellation, l’opinion a été située sur les mobiles de ce que d’aucuns ont, aux premières heures, pris pour une plaisanterie. Au plan politique, Olivier Boko, reste une personnalité très influente quoique n’ayant assumé depuis 2016, aucune fonction officielle dans l’organigramme présidentiel. Au fil du temps, Olivier Boko qui, de sources très introduites, est le concepteur des stratégies politiques du régime, va se forger une grande influence au sein de la classe politique. Discret et généreux, l’homme a gagné l’estime d’une frange d’acteurs politiques (ministres, députés, maires, directeurs d’agences et de sociétés etc…) qui ont perçu en lui, un dauphin idéal à Talon et s’activent subséquemment depuis quelques années, le faire succéder à celui-ci. Une ambition mal perçue par l’actuel locataire de La Marina qui n’est pas allé du dos de la cuillère pour exprimer sa désapprobation quant à l’éventuelle candidature agitée de son ami. « Vous avez parlé de mon ami Olivier Boko. Moi, je ne sais pas s’il est candidat. Je ne sais pas. D’abord, le moment n’est pas arrivé. Deuxièmement, je ne suis pas du genre à faire la promotion de ma famille, de mes amis, de mes proches en matière politique. Ce n’est pas mon genre. Donc, ce ne serait pas ces genres de critères qui vont déterminer mon choix pour la promotion d’un tel ou tel candidat. C’est pour vous dire que je ne suis pas dans un tel schéma, mais je suis à égale distance de tout le monde», avait indiqué Patrice Talon au travers d’un entretien télévisé le 23 décembre 2023.
L’inévitable reconfiguration de la classe politique
Quoique ne laissant aucune fenêtre ouverte à la probable candidature de son ami, les déclarations de Patrice Talon n’ont pas émoussé outre mesure, l’ardeur des partisans de « OB ». Les suscitations de sa candidatures se multiplient et les acteurs politiques dans l’ombre, font feu de tout bois pour imposer leur joker. Même la révision du Code électoral intervenue début mars 2024, n’a pas entamé la détermination des soutiens de celui qui est considéré comme le vice-président de la république. Des indiscrétions font même état de ce que les stratégies seraient en train d’être ficelées pour contourner les « blocages » au parrainage insérés dans le Code électoral relativement au parrainage par la création d’un parti politique constitué des députés, maires, conseillers et autres acteurs politiques de tous bords acquis à « OB ».
Les compteurs remis à zéro
Avec l’interpellation de Olivier Boko qui sans nul doute, a pris de court ses soutiens, c’est une ambition présidentielle de taille qui vient d’être brisée. Les partisans de l’homme qui en ont fait un des challengers potentiels et sérieux pour le fauteuil, devront dès lors, envisager d’autres portes de sortie. Leur leader charismatique étant relativement ou quasiment forclos de la course à La Marina au regard du bourbier dans lequel il se retrouve, ils devront se trouver un autre joker ou une autre caution morale dans l’appareil car il est une vérité de Lapalisse que Olivier Boko est le parrain de nombre d’acteurs politiques, qu’ils soient ministres, députés, maires ou autres. L’équation ne sera sans doute pas aisée à résoudre pour ces derniers à moins de 18 mois de prochaines échéances électorales.
Gabin Goubiyi