Le président Patrice Talon aura eu le mérite de donner du sens à la gouvernance locale et à la décentralisation depuis l’organisation en 1993 des états généraux sur l’administration territoriale. Dans sa dynamique de la Rupture, la décentralisation et la gouvernance locale ont porté le manteau de la régénérescence.
Dans son explication, l’expert Franck Kinnivo a souligné que le souhait du gouvernement est d’éviter que les Se ne soient de connivence avec les maires pour la mauvaise gestion des Communes, d’où l’instauration du tirage au sort. Selon lui, la sélection aurait porté sur 100 personnes pour être éligibles à la fonction de Secrétaire exécutif au lieu de 403. Alors, on demandera au maire de choisir sur ce fichier trois candidats qu’il portera devant le conseil de supervision de la Commune. « L’intérêt de cette procédure, c’est que le maire puisse leur dire, voilà la vision de notre Commune. Voilà ce qu’on attend de vous. Est-ce que vous êtes en mesure de faire ça…Et sur les trois, le conseil de supervision décide que c’est tel qui a le plus compris (la vision de la Commune) », a-t-il expliqué. Franck Kinninvo ajoute : « Les relations entre le maire et le secrétaire exécutif sont essentiellement fonctionnelles. Le maire ne peut pas l’instruire sauf dans les cas rares de l’exercice de la police administrative et de la protection civile. Le maire peut également le réquisitionner pour suppléer au dysfonctionnement du service public……L’une des fonctions de la tutelle la plus redoutée par les maires est le pouvoir d’annulation. La réforme du gouvernement sur la décentralisation et la gouvernance locale améliore la tutelle subséquemment à l’amélioration de l’administration communale. Ce qui ouvre la voie au déféré préfectoral. Ainsi, le juge administratif pourra enrichir le droit de la décentralisation qui, relevant du droit administratif, est prétorien. On peut donc espérer un développement du droit de la décentralisation au Bénin », a expliqué l’expert dans l’une de ses publications. Ses analyses démontrent que le gouvernement ne s’est pas trompé de chemin en initiant cette réforme. D’ailleurs, l’expert s’est interrogé sur la constitutionnalité et la légalité de la réforme.
Constitutionalité et légalité de la réforme, selon Fanck Kinnivo
« Pour analyser la constitutionnalité des réformes annoncées par le gouvernement dans le secteur de la décentralisation, il faut la confronter aux principes de « la libre administration des collectivités territoriales » et de « l’autonomie locale ». L’article 151 nouveau de la Constitution béninoise dispose : « les collectivités s’administrent librement par des conseils élus pour un mandat de cinq (05) ans dans les conditions prévues par la loi ». Cette libre administration s’étend au pouvoir réglementaire dont disposent les maires pour l’exercice des compétences de leurs Communes. La libre administration est un principe de protection des collectivités territoriales contre les immixtions et les injonctions de l’Etat central. Elle est renforcée par l’autonomie locale qui se définit comme le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de réglementer et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité, les compétences et les attributions de leurs organes. En analysant le contenu de la réforme, on peut se réjouir de son caractère législatif et de l’absence de l’immixtion de l’Etat dans le fonctionnement de la Commune, à quelques exceptions près. La réforme tant attendue est donc constitutionnelle et ne donne pas un droit d’immixtion à une structure autre que les organes de la Commune. Le retrait de la fonction d’ordonnateur du budget communal au maire au profit du secrétaire exécutif n’entrave en rien l’autonomie locale. La loi peut retirer au maire la fonction exécutive dont découle l’ordonnancement du budget, sans pour autant entamer la libre administration des collectivités territoriales. La vie des collectivités territoriales au Bénin est d’abord et avant tout organisée par la loi. La Constitution en énonce quelques principes de base. Les lois sur la décentralisation actuellement en vigueur ont conféré aux maires la compétence d’ordonnateur du budget. Parallélisme des formes oblige, la loi peut la transférer à un autre organe, pour peu qu’il soit de la Commune et sous la responsabilité du maire ou du conseil communal », a-t-il écrit.
Session d’intégration des Secrétaires exécutifs des mairies
Le jeudi 14 avril 2022, les Secrétaires exécutifs des mairies tirés au sort ont participé à un atelier d’intégration sur les modalités pratiques et les contours de leurs nouvelles fonctions qui a permis aux uns et aux autres de s’imprégner surtout des nouveaux textes devant régir l’exercice de la fonction de Se. C’était sous la présidence du ministre d’Etat en charge du Développement et de la coordination de l’action gouvernementale. A cette session de formation tenue au Palais des congrès de Cotonou, les Se ont bénéficié de plusieurs communications pour leur intégration dans leurs nouvelles fonctions. A cette occasion, le ministre d’Etat Abdoulaye Bio Tchané a notamment exprimé sa satisfaction de voir les 77 Secrétaires exécutifs répondre effectivement à l’appel. « Les commentaires positifs sur les réseaux sociaux illustrent la transparence du processus de désignation et de l’examen des dossiers », s’est-il réjoui. Il a, par la suite, félicité le comité de supervision, l’Ancb et son président, les maires et les personnes ressources pour leur contribution à l’aboutissement du processus. « Comme le disent les Latins, Alia jacta es, le sort est jeté. Nous devons inlassablement poursuivre la réforme. Les défis à relever sur le terrain sont immenses », a-t-il ajouté. Les thèmes retenus pour cette session d’intégration des Se sont : « Les objectifs de la réforme et des principales dispositions de la loi »; « Nouveaux organes de gouvernance des mairies : attributions et compétences respectives »; « Missions des Se, leurs attributions et leurs relations avec les préfets, les maires et le Conseil communal ». Il faut préciser que cette session a aussi permis la signature des contrats.
Bienvenue Agbassagan
(Suite dans la prochaine parution)
Djamilath Yérima, Se de Natitingou : « Notre collaboration avec les maires sera aisée »
« De façon globale, je ne peux qu’avoir de bonnes impressions. Tout ce qui est mis en œuvre pour la réussite de la réforme, est salutaire et nous sommes aptes à affronter tout ce qui nous attend comme tâches et à relever les défis pour le développement de nos Communes. Pour ce qui est de notre collaboration avec les maires, il n’y a rien qui sera fait de mauvais. La collaboration sera parfaite avec les maires. Ils sont là avant nous et nous avons besoin d’eux. Eux aussi, ils ont besoin de nous. Je crois qu’on aura de très bons moments de travail et nous allons établir une très bonne ambiance de travail entre nous. Donc, notre collaboration sera aisée. Elle ne sera pas du tout compliquée. Nous allons nous soutenir pour la réussite et pour le développement de nos communes. Cette réforme est bien partie pour réussir. Et d’ici deux à trois ans, vous allez avoir les retombées et elle sera bien perpétuelle ».
Jésugbé Jean Azanmasso, Se Savè : « La tâche ne sera pas facile sur le terrain »
« Mes impressions sont bonnes. Cette séance nous a permis de revoir, de revisiter notre mission, nos rôles, nos attributions en ce qui concerne la gestion des Communes. Quand on parle de réformes, il y a forcément des réticences. Donc, la tâche ne sera pas facile sur le terrain. Mais, nous allons nous y atteler afin qu’en collaboration avec le maire et les adjoints aux maires, nous puissions porter ces réformes. Moi, je suis un croyant, je n’ai pas d’inquiétude. Je sais que ça se passera bien. Je n’ai pas d’inquiétude. Par rapport à l’enquête de moralité qui est en cours, je suis confiant. Je crois que je n’aurai pas de problème, je serai toujours maintenu à mon poste. »